Par T. Briga
Naturellement rien n’est simple. Tout choix génère un coût, un prix à payer. Ce choix s’avère d’autant plus difficile et délicat, qu’il peut engendrer des pertes de positions sociales individuelles. C’est le cas du PDCI-RDA.
Ministères, présidences de quelques institutions et autres postes juteux… L’accession à ceux-ci, ne dépend que de la seule volonté d’un seul homme. Ces postes grassement rémunérés, offrent des possibilités pour détourner impunément des sommes colossales d’argent. Trivialement parlant, ces places octroient le permis de voler. Dire non à Dramane Ouattara, comporte donc de nombreux risques. La peur instillée, pourrait expliquer la docilité et la soumission des partis membres du conglomérat rhdp, dans lequel la réalité du pouvoir n’est détenue et exercée que par le seul rdr.
La peur, les humiliations et l’arrogance du rdr.
Depuis le début de leur accouplement contre nature, pour évincer le Président Gbagbo, le rdr n’a fait qu’infliger des humiliations, rabrouements, mépris et chantage de perte de poste, aux autres membres du rhdp, essentiellement le PDCI-RDA d’Houphouët. Dans le duo PDCI/rdr, le premier malgré son poids, semble avoir été anesthésié et à la remorque du second. Tout se déroule comme si ce puissant parti, naguère unique, le premier du pays, n’avait jamais existé.
La logique commanderait que le rdr soit une force d’appoint du PDCI et non le contraire. Un crapaud qui avale un éléphant, curieuse et incompréhensible situation à laquelle il est donné d’assister. Cette étrangeté, contrariant les lois de la physique, semble avoir tétanisé le PDCI, au point qu’il n’ose franchir le Rubicon pour se joindre à ceux qui luttent, manifestent et réclament une modification des règles, en battant le pavé.
Des insignifiants, occupent des postes qu’ils n’auraient jamais obtenus pour leurs compétences. Ils s’appuient sur la crainte qu’inspire le rdr, pour instaurer un nouveau modus operandi de gouvernance. Ils braillent à tue-tête, lancent des invectives, humilient, intimident, promettent de punir ceux qui ne s’accroupiraient pas devant eux. Ainsi, on entend une Kandia traiter Billon de politicien alimentaire, sait-elle au moins le sens de cette formule ? Ce dernier désigné par le magazine américain Forbes comme le plus riche de Côte d’Ivoire, pourrait employer et rémunérer dame Kandia jusqu’à la fin de ses jours. Dans le même temps, un certain Bictogo le qualifie de politicien de salon, et Guikahué d’irresponsable.
L’arrogance les aveugle et leur fait perdre le sens des valeurs. Car ils se croient au-dessus de tout, parce que détenteurs d’un pouvoir éphémère acquis au prix du sang des ivoiriens. Le niveau du discours politique est tombé avec eux, dans les bas-fonds de la vulgarité, à moins que ces agitations nerveuses, ne soient provoquées par la perte du pouvoir dans un futur très proche. Le chant du cygne.
Les tentatives de s’affranchir.
Sans le PDCI, parti relégué aujourd’hui au second plan et déconsidéré par le rdr, le régime actuel n’aurait eu aucun semblant de légalité. A force d’être honni, le PDCI a fini par comprendre que son appendice (le rdr), l’utilisait juste, comme son objet de légitimation vis à vis de l’extérieur et rien d’autre. Le premier signe avant-coureur de cette prise de conscience a été le refus de constituer un groupe parlementaire rhdp, après les législatives de 2016.
Cependant, la classe dirigeante du PDCI RDA, connaissant la cruauté de son allié, n’a pas voulu ouvrir les hostilités. Elle s’est tue, préférant participer au festin, même si sa portion s’est considérablement amenuisée depuis.
Le sort brutal réservé au clan de Kigbafori Soro, quand ce dernier est tombé un moment en disgrâce est plein d’enseignements. Pour le mettre au pas, certains de ses suiveurs ont été emprisonnés, d’autres dépouillés des fonctions lucratives qu’ils occupaient non par compétence, mais comme gage de leur servilité, si bien que leur renvoi n’a affecté aucun service. La brutalité n’a pas non plus épargné, deux membres influents du rhdp, qui réclamaient à l’occasion des législatives des investitures pour leur parti. Séance tenante, ils ont été débarqués du gouvernement et leurs cadres exclus des postes qu’ils occupaient. Ces éléments ont refroidi et freiné les ardeurs revendicatives du PDCI-RDA dans sa quête d’autonomie.
Pour phagocyter et museler définitivement son allié PDCI, ainsi que les petits groupuscules, genre Udpci, Upci, Mfa…, la création d’un parti unifié a germé. Cette idée a fait son chemin. Elle serait aujourd’hui réalité, si des militants et sympathisants de base ne s’étaient opposés à son avènement tant à Abidjan qu’en Europe, notamment Adjé Koffi Nestor et ses camarades à Paris.
Réconfortés, par la témérité des militants, les hauts dirigeants ont vaincu leur peur. Kakou Guikahué, Secrétaire Exécutif, Jean-Louis Billon porte-parole, ont tour à tour durci le ton, pour réclamer la refonte de la CEI, la révision de la liste électorale et le redécoupage des circonscriptions et le report du débat sur le parti unifié aux calendes grecques. Roland Diko, Secrétaire Exécutif chargé des élections au PDCI, déclare le 23 janvier 2018, cf. le site Connectionivoirienne « C’est au gouvernement de répondre à la réforme de la commission électorale”
La CEI n’a pas été reformée et les voici candidats aux prétendues sénatoriales en se déjugeant. A l’heure où tous les partis parlent le même langage et peuvent agir de concert, le PDCI, lui, a choisi de briser cet élan.
L’heure du consensus est arrivée. Et le PDCI est devenu soudainement invisible et inaudible.
La quasi-totalité des partis politiques ivoiriens, le PDCI compris porte les mêmes revendications à savoir : la refonte de la CEI, la révision de la liste électorale, le redécoupage des circonscriptions, la recherche d’une vraie réconciliation nationale avec la libération de l’ensemble des prisonniers politiques.
La classe politique non inféodée au régime de Dramane Ouattara, comme le FPI de Sangaré à qui le pouvoir dénie toute existence officielle ; l’Union républicaine pour la démocratie (URD) de Madame Danièle Boni-Claverie, le LIDER de Mamadou Coulibaly et Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (EDS) de G. Ouégnin, mais également ceux qui supportaient peu ou prou le régime, à l’instar des Affi Nguessan chef d’une opposition, nommé par le pouvoir, Kobena Anaki membre du rhdp, Gnamien Konan, plusieurs fois ministre de Dramane Ouattara, ont compris qu’il fallait stopper la dérive dictatoriale du pouvoir. La société civile n’est pas en reste.
Ce Pouvoir est aux abois, d’où les sorties effrénées et haineuses de ses membres qui se sentent menacés si le pouvoir disparaissait de leur emprise. Tous les ingrédients sont réunis pour mettre en porte à faux le rdr. Les ivoiriens se révoltent. Ils descendent dans la rue pour le manifester.
Mais le PDCI demeure invisible, préoccupé qu’il est par des calculs électoralistes peu gratifiants au vu de la gravité du sort du pays. Il pose en préalable l’alternance de 2020, la désignation d’un des siens comme le futur président du pays. Ce raisonnement présente des limites. La réforme de la CEI doit précéder tout choix égoïste d’homme. Car elle représente l’intérêt général, gage d’élections transparentes pour tous ceux qui veulent concourir aux différents scrutins dont celui de 2020. Si la CEI est viable, le PDCI pourra présenter son candidat hors tutelle rhdp, avec la certitude que des voix ne lui seront pas distraites pour favoriser un autre candidat comme ce fut le cas en 2010.
Le PDCI se cache, reste muet et donne l’impression de se désolidariser de ce vaste mouvement qui reprend pourtant certaines de ses revendications. Aujourd’hui où toute l’élite politique se bat à l’unisson, on ne voit pas le PDCI.
Quand on songe à la décrépitude dans laquelle le pays se trouve et la décadence vers laquelle le régime adultérin en place le conduit, le PDCI pour sa dignité et crédibilité futures devrait couper le cordon ombilical, s’affranchir du Rhdp sous domination rdr, pour la survie du pays.
Il sortirait grandi d’avoir accepté de sacrifier des positions individuelles pour sauver le groupe; la patrie. Quelle grandeur cela pourrait être !
T. Briga
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