Côte d’Ivoire – Que gagne le pays à maintenir les ex-FDS en prison et les politiciens en liberté

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«Quand l’ordre est injustice, le désordre est déjà un commencement de justice» Romain Rolland

Les Ex-FDS sont-ils les oubliés de la justice sélective ?

Dr. Prao Yao Séraphin,
Délégué national au système monétaire et financier à LIDER

S’il y a un concept que la crise ivoirienne a rendu célèbre, c’est bien celui de la réconciliation nationale. A la maternelle, on parle de réconciliation, à l’hôpital, de réconciliation, même dans les couples. C’est une bonne chose car aucun peuple ne peut s’élever en dignité sans une cohésion sociale. Le seul problème, c’est que le processus de réconciliation nationale oublie une frange importante de la société : les anciennes Forces de Défense et de Sécurité (Ex-FDS). L’actualité ivoirienne est rythmée par les libérations provisoires de personnalités politiques mais les autorités judiciaires oublient les Ex-FDS emprisonnés à la suite de la crise post-électorale. Tout porte à croire que ces Ex-FDS emprisonnés sont des otages du pouvoir.

Tous arrêtés à la suite des mêmes évènements

A la suite de la crise post-électorale et de la prise du pouvoir par M. Ouattara, certaines personnalités politiques et des Ex-FDS ont été jetés en prison. Les chefs d’accusation varient selon les fonctions occupées. Certains politiciens sont inculpés pour atteinte à la sureté de l’Etat et d’autres personnes pour crimes de sang, atteinte à la sûreté de l’État et/ou infractions économiques, notamment détournement de fonds publics.

Pour les Ex-FDS, la chasse à l’homme a été systématique et la traque silencieuse. Les prétextes de cette «purge» au sein des éléments des Forces de défense et de sécurité, sont entre autres : «tentative de déstabilisation », «complot contre l’Etat», «tentative de coup d’Etat», « racket et contusion », « détournement de fonds », « faute administrative »…. Le régime Ouattara a transformé la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan (MACA) et la Maison d’arrêt Militaire d’Abidjan (MAMA) en camps militaires. Pour des faits liés à une prise de pouvoir par la force, des policiers, des gendarmes et des militaires croupissent en prison dans l’indifférence totale des ivoiriens. Qu’ils s’agissent des politiciens ou des Ex-FDS, ils sont tous en prison pour des faits qui sont liés à la crise post-électorale et de la prise du pouvoir par les nouvelles autorités.

Certains sont libres et pas d’autres

Il semble enfin qu’en Côte d’Ivoire, les cœurs soient disposés à la réconciliation. Le pouvoir ivoirien a fait quelques gestes d’apaisement envers l’opposition ivoirienne, et notamment le Front populaire ivoirien (FPI), parti de l’ex-chef de l’État, Laurent Gbagbo, actuellement détenu par la Cour pénale internationale. La justice ivoirienne a, en tous cas, décidé d’accorder la liberté provisoire à 14 personnalités pro-Gbagbo emprisonnées dans le cadre des enquêtes qui ont mené aux violences postélectorales, en 2010-2011. Ce qui est gênant dans ces libérations provisoires, c’est qu’elles concernent que les politiciens et non les Ex-FDS comme si être un politicien est un masque de supériorité. C’est simplement une libération sélective qui conduit à une justice sélective. Et c’est dangereux pour la réconciliation. Si les ivoiriens s’accordent pour apprécier ces gestes d’apaisement envers les opposants, il faut également que les Ex-FDS soient libérés tout simplement. Si la loi est opposable et applicable à tous alors pourquoi libérer certains et laisser d’autres en prison ?

Il faut arrêter la justice sélective

On ne peut pas corriger une injustice par une injustice. Il est admis qu’une justice punitive ne marchera jamais dans le contexte ivoirien encore moins une justice sélective. Si les ivoiriens veulent une réconciliation sincère, il faut en finir avec les libérations sélectives. M. Hamed Bakayoko et M. Ange Kessy sont les maillons forts de cette répression psychologique gratuite contre les Ex-FDS. Que gagne la Côte d’Ivoire en maintenant ces Ex-FDS en prison alors que les autres sont en liberté ? Peut-on réconcilier les ivoiriens avec une telle injustice ? Bien sûr que non. M. Hamed Bakayoko et M. Ange Kessy doivent libérer sans délais ces Ex-FDS qui meurent en silence à la MACA et à la MAMA. Refuser de les libérer, c’est entretenir une haine car comme le dit Karl Marx « Ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur existence, c’est au contraire leur existence sociale qui détermine leur conscience ».

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