Côte d’Ivoire – Les élucubrations de Maître Altit ?

Zagadou Seri Djaty – Source: Lebanco.net

Maître Emmanuel Altit, l’Avocat très français du très anti-français Laurent Gbagbo vient de sortir du chapeau de l’apprenti magicien qu’il est ce qu’il pense être l’arme fatale, pensant sortir son tristement célèbre client de la mauvaise passe dans laquelle il se trouve en ce moment: L’INCOMPÉTENCE DE LA COUR PÉNALE INTERNATIONALE À JUGER LAURENT GBAGBO.

Dès que cette information a été rendue publique, j’ai contacté un ami avocat, bien ivoirien celui-là et même pro-LMP, pour lui demander ce qu’il pensait de la pertinence d’un tel argument. Il m’a répondu ceci: « Tu sais, nous les Avocats, quand nous commençons à contester la compétence d’un tribunal ou à critiquer les éléments périphériques du dossier tels que l’erreur de l’huissier dans l’établissement de son acte, ou la faute du policier dans la rédaction de son procès verbal, c’est que nous ne croyons pas en la solidité de nos arguments sur le fond de l’affaire ».

En reprenant les arguments de Maître Altit, on ne peut que donner raison à mon ami.

En effet, le défenseur de Laurent dit d’abord ceci: « La Cour Pénale Internationale n’est pas compétente parce que la Côte d’Ivoire n’a pas encore ratifié le Traité de Rome, et que la déclaration de reconnaissance faite par Alassane Ouattara ne peut pas être prise en compte car au moment où il la signait, le Conseil Constitutionnel ne l’avait pas ENCORE reconnu comme Président de la République ». Cet argument contient une vérité et un mensonge.

La vérité est que, en disant cela, il avoue déjà que, même s’il l’a fait avec du retard, le Conseil Constitutionnel avait fini par reconnaître Alassane Ouattara comme Président de la République. Sur ce point, il a parfaitement raison car, comme dirait l’ivoirien moyen, « C’est ça qui est la vérité ». Il faut lui en donner acte de cette grande et importante vérité, et demander aux Akoun Laurent, Agoh Marthe et autres d’en prendre de la graine, eux qui, il y a moins de deux semaines, soutenaient encore qu’ils ne pouvaient pas reconnaître Alassane Ouattara comme Président de la République.

Mais le mensonge de Me Altit, concerne le moment qu’il dit être celui de la déclaration de reconnaissance de la CPI par la Côte d’Ivoire. À ce sujet, il faut commencer par porter à sa connaissance que juste après le déclenchement de la rébellion en Septembre 2002, Laurent Gbagbo, alors dans la plénitude de sa Présidence, avait déjà signé une déclaration de reconnaissance de la CPI, juridiction devant laquelle il entendait faire poursuivre Guillaume Soro et tous les siens. La déclaration faite en 2011 par Alassane Ouattara ne visait donc finalement qu’à confirmer que la République de Côte d’Ivoire reconnaissait bien la compétence de cette juridiction internationale. Sur ce même sujet, il faut aussi informer Me Altit que lorsque le Conseil Constitutionnel, version Yao Ndré, a fini par reconnaitre la victoire d’Alassane Ouattara, il a fait remonter ladite victoire au 4 Décembre 2010 en employant utilisant cette formule qui avait provoqué un tonnerre d’applaudissement dans la salle: « Déclare valides tous les actes accomplis par Mr Alassane Ouattara depuis le 4 Décembre 2010 ». Me Altit peut se renseigner auprès de Miaka Oureto qui était présent dans la salle ce jour là. C’est même sur cette base que la Chambre administrative de la Cour Suprême a rejeté le recours en annulation que Laurent Gbagbo avait initié contre les décisions qu’Alassane Ouattara avait prises depuis l’hôtel du Golf. Me Altit, pour sa gouverne personnelle doit donc savoir que dans la proclamation tardive de la victoire d’Alassane Ouattara, le Conseil Constitutionnel a validé la déclaration de reconnaissance de la CPI que celui-ci avait signée.

Pour contester la compétence de la CPI à juger Laurent Gbagbo, son Avocat soutient aussi que ce dernier a été détenu dans de mauvaises conditions à Korhogo. C’est comme si un Avocat disait à la barre d’un tribunal: « Vous êtes incompétent pour juger mon client parce que, avant d’être conduit devant vous, il a été gardé à la Police dans un violon étroit et sale, et a été privé de nourriture ». Ce serait une hérésie judiciaire. Si par contre Me Altit a entendu expliquer que les conditions de détention de Laurent Gbagbo à Korhogo l’ont rendu fou, qu’il le dise clairement et qu’il sollicite une expertise psychiatrique en demandant à l’expert de préciser le moment où son client est devenu zinzin. Les résultats de cette expertise intéresserait bien les ivoiriens car, à un certain moment de la crise post électorale, nombreux sont ceux parmi eux qui étaient persuadés que Gbagbo était devenu subitement fou parce qu’il avait perdu trop brutalement le pouvoir face à un adversaire qu’il avait trop haï.
S’agissant précisément de cette fameuse détention à Korhogo, il me semble nécessaire que les autorités ivoiriennes, en l’occurrence les Ministères de l’Intérieur et de la Justice, expliquent clairement à l’opinion nationale et internationale que Laurent Gbagbo n’était pas en prison à Korhogo. Il était en résidence surveillée. C’est une procédure qui existe dans notre législation depuis l’indépendance. Elle est conduite par le Ministère de l’Intérieur. Il y a un abus de langage lorsque les gens parlent de « détention arbitraire ou illégale ». Et lorsqu’on a vu sur Internet et dans la Presse écrite des images de Laurent Gbagbo, les mains dans les poches, se promenant en compagnie de ses Avocats et amis, dans les jardins de la résidence du Chef de l’État à Korhogo, on n’a plus besoin d’un dessin pour savoir qu’il ment comme un arracheur de dents lorsqu’il affirme aux Juges de la CPI que c’est seulement lorsqu’il pleuvait qu’il savait qu’il y avait un ciel au dessus de sa tête.

Cela dit, il ne serait pas inutile d’ajouter quelques considérations d’éthique. En effet, Laurent Gbagbo et son Avocat acceptent de se présenter devant un tribunal et y font le show, à l’occasion de l’audience de première comparution. En sortant de là , ils plaident l’indigence et demandent des millions et des millions pour préparer leur défense. On les leur donne. Quand ils ont fini de « manger ça », comme on dit chez nous, ils disent, comme on dit aussi chez nous, le cure-dents dans la bouche pour extraire les débris de leurs ripailles:  » Et d’ailleurs même, ce tribunal là, est-ce qu’il est compétent même pour juger notre affaire? » Ce n’est pas très honnête, et ces deux larrons en foire devraient arrêter leur esbroufe. À la place de Me Altit, après avoir découvert que le client qui l’avait fait plaider l’indigence pour avoir des subsides avait des milliards disséminés sur des comptes bancaires à travers le monde, un Avocat probe et diligent se comporterait autrement, en commençant par se méfier de cet homme à la réputation de boulanger dans son pays.

Zagadou Seri Djaty

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