Marie-Rose Guiraud: “Ouattara m’a demandé de rentrer”

Exilée aux Etats-Unis d’Amérique, depuis plusieurs années, et âgée aujourd’hui de 67 ans, la fondatrice de l’Ecole de danse et d’échanges culturels (EDEC) située à Cocody-Riviera Palmeraie envisage de rentrer au pays pour se mettre à la disposition des nouvelles autorités. Dans cet entretien qu’elle a accordé au site abidjan.net, dont nous vous proposons quelques morceaux choisis, Marie-Rose Guiraud, danseuse et chorégraphe émérite, donne les raisons de son retour au pays.
Question : Les Ivoiriens aimeraient bien savoir ce que devient leur Marie-Rose Guiraud. Vous avez quitté le pays depuis si longtemps déjà…
Marie-Rose Guiraud : J’ai assisté, impuissante, à tout ce qui est arrivé à mes parents. Vous savez, moi, Marie-Rose Guiraud, j’appartiens à toute la Côte d’Ivoire, je n’ai pas de préférence, j’ai des amis, des parents, des frères et des sœurs partout. Qu’on tue au Nord, au Sud, au Centre, à l’Est comme à l’Ouest, je me sens concernée, parce que dans ma troupe, il y a des enfants de toutes les régions. Dans mon école, l’EDEC d’Abidjan, j’entretiens soixante-dix enfants, dont certains ne sont même pas Ivoiriens. Il y en avait plus avant que je ne quitte le pays. Dans ces conditions, vous pouvez imaginer ma souffrance. Je ne faisais que pleurer chaque fois que j’apprenais que le sang était versé ici ou là…

Q : Envisagez-vous de rentrer un jour ? Si oui, quand?
M-R.G : Le 24 septembre 2011, de passage à New York, le chef de l’Etat, le Président Alassane Dramane Ouattara a rencontré la communauté ivoirienne. A cette occasion, il nous a invités, mon mari et moi, à le rejoindre dans sa suite de l’Hôtel Waldorf. Là-bas, nous nous sommes entretenus pendant une vingtaine de minutes avec lui et son épouse, la Première dame, en présence du ministre Adama Bictogo. Le Président m’a demandé de rentrer participer à la réconciliation nationale. Cela n’a rien de politique. Il s’agit pour moi de faire ce que je peux, de contribuer à ma manière, à la réconciliation nationale. En ce qui me concerne, je viens de fêter mes 67 ans, et je suis déterminée, si l’on m’en donne les moyens, à jeter mes dernières forces dans la bataille pour recoller le tissu social, réconcilier les Ivoiriens et participer à la reconstruction de mon pays. J’ai ma petite idée derrière la tête. Il me faudra aller sur le terrain.

Q : Serait-il alors possible d’avoir une idée de la période choisie pour le grand retour, et également de savoir ce que sera votre partition ?
M-R.G : Je compte rentrer à la mi-février. Vous savez, c’est l’Ouest du pays qui a payé le plus lourd tribut à la guerre. C’est aussi ma région natale. Jai donc décidé d’y organiser un festival de danses, plus précisément à Kouibly. Je l’ai baptisé « Fête de génération pour la réconciliation et la cohésion nationale ». Mais, dès que j’ai commencé à en parler, on m’a encouragé à étendre les manifestations à d’autres localités. En définitive, trois villages de Man ont été retenus : Kouibly, Pagnebly et Ouyably.

Q : Depuis le passage du Président, vous avez donc mis la machine en marche…
M-R. G : Oui, grâce à l’ambassadeur Diabaté, la communauté ivoirienne d’ici a, d’ailleurs, pu avoir un avant-goût de ce que je prépare. Nous avons organisé une petite manifestation à l’ambassade. Il n’y a eu aucune publicité autour, mais le public est venu nombreux. C’est dire comment ils ont soif de se réconcilier. Vous comprenez ? C’est le signe que nous sommes toujours ensemble.

Q : Quel sera le contenu du festival?
M-R.G : Bien sûr, dans un premier temps, le festival permettra à de nouveaux talents d’éclore. Je pourrai auditionner des enfants de 8 à 15 ans qui vont chanter et danser. Le festival est consacré aux enfants victimes de la guerre. Il s’agit d’exorciser par l’art tout le mal qui les a traumatisés. Ensuite, les vainqueurs remporteront des bourses d’études pour étudier dans des écoles comme l’EDEC.

Q : Travaillez-vous sur le projet avec le ministère de la Culture ou encore des organismes du système des Nations unies ?
M-R.G : Non, je n’ai, malheureusement, pas de contact avec le ministre Maurice Bandaman. C’est difficile d’établir le pont à distance. Ni le ministère, ni l’Onuci, aucune organisation nationale ou internationale, bref, je n’ai encore soumis le projet à aucune des agences des Nations unies impliquées dans la réconciliation et la reconstruction.

Q : Parlons maintenant de votre profession. Avez-vous continué d’exercer, depuis que vous avez quitté le pays, ou alors, avez-vous mis toutes vos activités en veilleuse?
M-R.G : Je suis avant tout artiste, je dirais même plus, je suis Art. Je n’ai jamais arrêté. Au contraire. Ici, je me suis réalisée. Je me produis régulièrement, entre deux cours dans les universités. Par ailleurs, je viens de finir mon autobiographie. Je suis née artiste. A l’origine, Je suis une miraculée. Je suis quelqu’un qui aurait pu être complètement handicapée, mais qui a pu s’en sortir grâce à la prière. Chaque minute, chaque seconde de ma vie vaut de l’or. J’ai mis mon corps au service de Dieu. C’est la danse qui a aidé mon corps à se développer. Mais je préfère vous laisser découvrir la suite dans mon livre.

(Source: abidjan.net)

Commentaires Facebook