INTERVIEW Ben Rassoul (chef du cabinet privé de  »IB ») rompt le silence et dit tout sur le commando invisible – « Le Général Doué, Soro et nous »

Ben Rassoul Timité est le chef du cabinet privé de Ibrahim Coulibaly alias  »IB », qui réclame la paternité du commando invisible installé dans les communes d’Abobo et d’Anyama. Pour en savoir un peu plus sur ce sujet qui polarise l’actualité sur le front militaire, nous avons pu entrer en contact avec M. Timité, un proche collaborateur de celui qui s’affuble désormais du titre de général. Dans cet entretien réalisé grâce à; l’Internet, M. Timité rompt le silence sur tout et fait d’importantes révélations sur leur combat, les objectifs poursuivis et les moyens à leur disposition.

Vous revendiquez le commando invisible d’Abobo au même titre qu’un autre groupe tapis dans l’ombre et visiblement rattaché aux dirigeants enfermés à l’hôtel du Golf. Qui croire?

Permettez d’abord qu’au nom du Général IB et en mon nom propre, je m’incline devant la mémoire de tous ceux qui sont morts depuis le déclenchement de la crise armée du 19 septembre 2002. Tout en souhaitant un prompt rétablissement aux blessés, nous présentons nos condoléances les plus attristées aux familles endeuillées. Le Commando Invisible n’a d’autre chef que le Général Ibrahim Coulibaly dit IB. Nous ne rentrons pas dans des querelles de clocher qui consistent à perdre notre temps dans des revendications farfelues assimilables à de la pantalonnade. La réalité se passe sur le terrain. Vous vous souvenez qu’en hiver 2003 et été 2004, des polémiques du même genre étaient monnaie courante quant à la paternité des mouvements rebelles devenus Forces Nouvelles. D’aucuns lui ont contesté le titre de pére-fondateur de la révolution inachevée du 19 septembre 2002. Mais, plus tard, des voix beaucoup plus autorisées se sont élevées dans des journaux panafricains pour lui reconnaitre son rôle dans la création des mouvements armés à savoir le MPCI, le MPIGO et le MJP. D’ailleurs, vous-même faites bien de signifier qu’ils sont tapis dans l’ombre. C’est la preuve que ces revendicateurs ne sont que l’ombre d’eux-mêmes; parce qu’en réalité il ne s’agit pas de s’attribuer des exploits au détour d’une connexion Internet; il faut avoir le courage de revendiquer à visage découvert comme l’a fait le Général IB.

Quelles preuves pouvez-vous donner que c’est vous qui opérez à Abobo?

La meilleure preuve en pareille situation, c’est de vous rendre dans notre QG d’Abobo PK 18 d’où je vous parle pour vérifier par vous-même. Toute autre spéculation en dehors de cela est vaine et chimérique.
Vos premières sorties ont suscité des réactions, qui disent que IB est au Ghana d’où il tente une récupération d’un mouvement dont il ne sait rien. Qu’en dites-vous?
L’objectif de ces individus sans foi ni loi est un secret de polichinelle. Ils se sont inscrits dans une logique de diabolisation du Général IB et de toutes ses actions. Quand un enfant réussit, il devient pour tout le monde. Mais quand il devient fou, il est rejeté par la société. Ce à quoi on assiste y ressemble. La victoire à plusieurs pères. Le Général est à Abidjan pour voler au secours du peuple de Côte d’Ivoire. Et c’est cela l’essentiel.

Comment êtes-vous arrivé dans cette commune?

On avait déjà des hommes à Abidjan prêts à parer à toute éventualité le moment opportun. Et c’est ce que nous avons fait. A l’image d’Abobo, nous avons des hommes positionnés dans presque toutes les communes du pays, attendant les ordres du Général.
Qui vous a fourni toutes ces armes lourdes et comment ont-elles pu être acheminées à Abidjan?
Depuis 2002, à partir du moment où le général IB a constaté les dérives sociales, il a décidé de prendre ses responsabilités. Il s’est donc doté de moyens adéquats pour rendre au peuple sa liberté et sa dignité. La provenance de l’arsenal du Général IB n’est pas le plus important. C’est plutôt la justesse de son combat qui devrait interpeller les Ivoiriens.

Combien d’hommes revendiquez-vous?

Nous avons un effectif de plus de 13500 hommes repartis sur le territoire national. A l’heure où je vous parle, je ne saurais vous donner un chiffre exact d’autant que la cellule de l’Etat-major chargé des ralliements enregistre régulièrement de nouvelles adhésions.
Il est difficile de croire qu’IB vienne établir un tel mouvement dans une zone comme Anyama et Abobo sans base-arrière ou base de repli. N’est-ce pas un mouvement suicidaire si c’était vraiment lui, le cerveau de ladite troupe?

Non, ce n’est pas un mouvement suicidaire. IB est un Général digne de ce nom. En nous installant à Abobo, nous avons pris toutes les dispositions qui vaillent pour sécuriser les populations. C’est plutôt la tentative de nous déloger qui est suicidaire. Retenez que nous voulons avancer et non reculer. Et nous avancerons pour instaurer la démocratie. Le constat est là, implacable.

Sur quoi comptez-vous pour avancer, surtout que les Forces nouvelles au Nord et FDS au Sud peuvent vous prendre en tenaille à tout moment?

Entre nous et les Forces Armées des Forces Nouvelles, il ne peut y avoir de combat sinon elles ne seraient plus en train de lutter pour la démocratie. Ce sont nos frères et au chevet d’une mère malade, on ne se bat pas même si nous avons les moyens de parer à toutes les éventualités. Les Forces Nouvelles, ce n’est que le contenant. Le contenu n’est rien d’autre qu’un fétiche conçu par le Général IB. C’est pourquoi, espérer ou penser que les Forces Nouvelles peuvent en arriver à un affrontement avec les Forces de Défense et de Sécurité Impartiales de Côte d’Ivoire auxquelles appartiennent le Commando Invisible, relève de l’illusion. Il en est de même pour les quelques FDS restées fidèles à M. Laurent Gbagbo. Je ne crois pas que cela puisse trotter dans l’esprit des frères d’armes. Et c’est du reste ce qui justifie le fait que Gbagbo Laurent a fait un recrutement massif de mercenaires dans des pays connus de tous parce que convaincus qu’à l’exception de quelques brebis galeuses, les FDS ne se dresseront pas contre leurs frères d’armes. Je reste convaincu qu’elles sont prêtes à braver la peur et à suivre l’exemple de l’armée égyptienne. Nous avons déjà lancé un appel à nos frères des FAFN et des FDS afin de nous rejoindre dans le combat. Au nom du Général IB, je profite de ce canal pour réitérer cet appel à l’union sacrée. C’est de l’union que naîtra une Côte d’Ivoire nouvelle, un vœu cher au Général Ibrahima Coulibaly
Avez-vous des soutiens à l’extérieur?
Affirmatif.

Quel objectif visez-vous en créant ce kyste en plein Abidjan?

La souffrance du peuple de Côte d’Ivoire doit prendre fin et force doit rester à la démocratie.

Depuis l’arrivée du commando invisible, les morts ne se comptent plus dans le District d’Abidjan. Ne craignez-vous pas de revendiquer un tel mouvement?

Nous n’avons aucune crainte d’autant que depuis notre arrivée, les tueries massives se sont estompées, car Gbagbo Laurent et ses miliciens ont compris qu’il y a des Ivoiriens prêts à se sacrifier pour sauver des vies humaines, pour maintenir le pays débout. C’est à ce travail de protection des populations civiles que nous nous sommes attelés depuis notre irruption sur la scène. Des rapports qui nous parviennent de nos services de renseignements, il ressort que la population est fière de nous. Mais nous ne comptons pas nous arrêter là. Jusque-là, nous n’avons mené que des combats défensifs. Très bientôt, nous passerons à une autre étape.
Laquelle?

Vous le saurez.

Jusque-là, on voit derrière le commando invisible des combattants agissant pour l’installation de Ouattara au pouvoir. Qu’en dites-vous?

Le Commando Invisible n’est à la solde de personne. Nous nous sommes assigné une mission de protection des populations civiles. C’est à cela que nous nous attelons d’abord. En même temps que nous le faisons, nous nous battons aussi pour que l’expression populaire soit respectée. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire. C’est le peuple qui donne le pouvoir et c’est le même peuple qui décide de le retirer. Il faut donc respecter sa volonté pour faire l’économie des vies humaines.

Si ce n’est pas le cas, pour qui combattez-vous?

Nous combattons pour le peuple de Côte d’Ivoire.

Pour vous, qui est l’adversaire?

Plus que des adversaires, ce sont des ennemis; la dictature gbagboienne, les violations des droits de l’Homme, l’injustice, les détournements de deniers publics, etc.
Quelle est votre position par rapport au résultat du scrutin du 28 novembre passé?
Le peuple de Côte d’Ivoire de façon souveraine s’est exprimé le 28 novembre 2010. Nous nous inclinons devant cette expression populaire. Nous pensons par ailleurs que justice doit lui être rendue.
Pourquoi engagez-vous une offensive alors qu’une médiation est en cours pour rapprocher les positions?
Jusque-là nous n’avons fait que protéger la population tout en réagissant aux offensives sporadiques des miliciens de Gbagbo Laurent.

Pourquoi vous attelez-vous coûte que coûte à la voie des armes alors que vous aviez annoncé vous-même en vain votre participation à la présidentielle passée?

Nous n’avons pas encore recouru aux armes. Nous nous défendons et protégeons les civils selon nos possibilités. Notre participation au scrutin présidentiel n’a pas résisté aux contradictions internes relatives à certaines défaillances sur le processus électoral qui avaient été relevées par certains de nos camarades de l’UNIR (Ndlr: Union pour les Ivoiriens du Renouveau). Si d’autres détails vous paraissent nécessaires pour éclairer la lanterne des Ivoiriens sur ce sujet, alors je vous invite à prendre attache avec les instances du parti. Pour l’heure, je vous parle au nom du Général IB.

Si Gbagbo est la cible commune, va-t-on assister à une paix des braves IB-Soro bientôt?

Notre combat n’est pas dirigé contre un individu mais contre un système. En tout état de cause, le Général IB n’a jamais été fermé au dialogue. Il a tendu la main à son jeune frère qu’il a lui-même recruté. Si le Général doit le réitérer, il le fera au nom de la cohésion, de la réconciliation et de l’unité nationale.

Croyez-vous avoir les moyens militaires de livrer bataille à Laurent Gbagbo et le déloger du pouvoir, face à l’armée ivoirienne qui lui est restée fidèle et loyale?

Il n’y a qu’une minorité au sein de l’armée qui s’agite autour de Gbagbo Laurent et qui sert de guide aux miliciens recrutés avec l’argent du contribuable. Ils ont tenté plusieurs incursions dans nos positions, qui se sont soldées par des échecs cuisants. Les armes seules ne suffisent pas pour protéger une population, il faut du courage, de la bénédiction des populations qu’on défend et surtout être engagé sur les sentiers de la vérité. Je vous exhorte à lire Samuel 17 verset 50 dans la Bible, quand le jeune berger David que les musulmans appellent Daoud a relevé le défi de mettre hors d’état de nuire le tout-puissant Goliath. Vous comprendrez que tôt ou tard le dictateur sera bouté hors du palais.

Sérieusement, IB peut-il être à Abobo sans qu’il ne puisse être identifié?

Ecoutez, nous sommes dans une situation d’exception qui requiert évidemment des mesures d’exception. Par ailleurs, vu que le Général IB n’est pas un vendeur ambulant, il est donc difficile de l’apercevoir à tout point de rue d’Abobo au point de l’identifier. En dehors des théâtres d’opération, il s’occupe à l’encadrement stratégique des différents commandants d’opération. En période d’accalmie, il échange beaucoup avec des officiers supérieurs de l’armée ivoirienne sans oublier les appels qu’il reçoit de l’extérieur. Voici autant de tâches qui ne lui donnent pas la possibilité de se balader dans les ruelles d’Abobo pour peut-être dire bonjour aux braves populations.

Pour combien de temps va durer votre combat, qui fait fuir et souffrir les populations?

Notre combat durera autant de temps que le peuple sera massacré, autant de temps que la dictature va sévir dans notre pays. Nous ne sommes en rien responsables de la fuite des populations. Tout au contraire, depuis que nous avons pacifié les communes d’Abobo et Anyama, les populations vivent dans la quiétude et la sérénité. Ceux qui étaient partis reviennent et la vie redevient progressivement normale. Il y a quelques difficultés certes, mais nous nous attelons à les résoudre. Avant notre prise de responsabilité, les populations dormaient avec un œil ouvert et l’autre fermé. Désormais, elles dorment les yeux fermés.
Pendant que vous occupez Abobo, d’autres combats font rage à l’ouest. Vous reconnaissez-vous dans ces combats?
Nous avons quelques hommes à l’Ouest du pays qui attendent les instructions du Général IB, qui décide en fonction de l’évolution de la situation sociopolitique. Nos hommes mènent parfois des opérations tactiques dans l’Ouest afin que la population ne puisse pas souffrir. Nous saluons toutefois la progression de nos frères des FAFN qui viennent de prendre la localité de Toulepleu. C’est le lieu pour nous de réitérer notre appel à l’union sacrée car c’est de cela que naîtra une Côte d’Ivoire nouvelle. Je redis que nous allons bientôt mettre fin à notre stratégie défensive pour passer à la vitesse supérieure.

Il semblerait que vous êtes en connexion avec le Général Mathias Doué. Confirmez-vous l’information?

Nous n’avons pas de contact avec le Général Mathias Doué. Mais je puis vous rassurer que le Général IB est en train de faire des pieds et des mains afin que tous les démocrates, où qu’ils soient, qui aiment encore leur pays, nous rejoignent dans notre combat pour la justice, la liberté et la paix, gage d’un développement durable.
Quels sont vos rapports avec les forces onusiennes qui semblent s’interposer entre vous et les FDS fidèles à Laurent Gbagbo?
Nous n’avons pas de rapport étroit avec les forces onusiennes. Nous aurions aimé qu’elles nous appuient mais leur mission ne le leur permet pas. Néanmoins, tout comme nous, nous les exhortons à redoubler d’ardeur dans leur mission de protection des populations civiles.

Vous ont-elles identifiés comme différents des combattants pro-Ouattara ?

Je ne pense pas que cela fasse partie de leur mission. Mais si éventuellement elles manifestent le désir de discuter avec nous, nous sommes disposés à les recevoir. Dans tous les cas, ce ne sera pas le premier du genre.

Ne craignez-vous pas une offensive contre vous, de la part de communauté internationale qui reconnaît Ouattara comme président de la République régulièrement élu?

Nous ne nous battons pas contre la communauté internationale encore moins contre des hommes fidèles à M. Alassane Ouattara. Je ne sais donc pas pourquoi la communauté internationale mènerait une offensive de quelque nature que ce soit contre nous. D’aucuns veulent donner l’impression que le Général IB mène ce combat pour s’accaparer le pouvoir. C’est une mauvaise lecture de notre action. Si ce n’est pas le cas, alors cela pourrait s’apparenter à de la mauvaise foi. Car certes le monde est vieux, mais l’avenir sort du passé. La mémoire collective doit se rappeler que le 24 décembre 1999, un militaire, Ibrahim Coulibaly, faisait son entrée dans l’histoire en sauvant son peuple de l’implosion sociale. Alors qu’il avait toute la latitude d’occuper le fauteuil présidentiel, il s’est effacé, rappelant régulièrement au chef de la transition, le Général Guéi Robert, leur promesse au peuple de Côte d’Ivoire. Ce qui lui a valu d’être affecté près l’ambassade de la Côte d’Ivoire à Ottawa en qualité d’attaché de défense pour briser en lui toute idée de révolution. En refusant donc de s’installer dans le fauteuil présidentiel après le coup d’Etat, IB venait de poser un acte historique. Suite aux accords de Linas Marcoussis en 2003 qui ont impliqué le partage du pouvoir entre le régime de Laurent Gbagbo, l’opposition politique et les mouvements rebelles, le Premier ministre Seydou Elimane Diarra lui a demandé de désigner les ministres des trois mouvements rebelles qui devaient siéger au gouvernement. Il les a désignés sans occuper un seul portefeuille. IB venait encore de poser un autre acte qui prouve qu’il n’est pas obnubilé par le pouvoir. C’est tout de même méchant de savoir tous ces actes et de propager que le Général IB mène un combat de conquête du pouvoir d’Etat en vue de son exercice. Le Général IB n’a d’autres ambitions que d’apporter sa pierre à l’édification d’un pays de paix et de démocratie telles que prônées par le père fondateur de la nation, feu le président Félix Houphouët-Boigny. Toute autre spéculation en dehors de cela s’apparente à de la sorcellerie.

Entretien réalisé par F.D.BONY
L’Inter

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