Enquête exclusive: Affaire Mamadou Sanogo contre Dramera Ousmane

Enquête réalisée avec: Crocinfos.net, l’Éléphant déchaîné, le Perroquet libéré et l’Enquêteur

L’acquisition d’un bien immobilier est souvent perçue comme un rêve devenu réalité. Cependant, pour Mamadou Sanogo, cette expérience s’est transformée en un véritable cauchemar. L’enquête retrace les événements marquants de cette affaire, en mettant en exergue les dates clés, les actions entreprises par les différentes parties ainsi que la ruse avec la police économique, ainsi que le Pôle pénal économique et financier (PPEF), le plaignant, et une hypothèque excessive de plus d’un milliard FCFA.

 

L’achat du bien immobilier

L’affaire qui oppose Mamadou Sanogo, gérant d’entreprise, à Dramera Ousmane, chef d’entreprise, et Maître Adeline Kassi-N’Goroma, notaire, dans un litige de vente de terrain qui, au lieu d’être une simple transaction, s’est transformée en un véritable casse-tête judiciaire.

Le 12 mai 2020, Mamadou Sanogo acquiert des mains de Dramera Ousmane une parcelle de terrain urbain, sise au II-Plateaux 7e tranche, formant le lot 2825 îlot 235, d’une superficie de 960 m², contre le paiement d’un montant de 320 000 000 FCFA.

Cette transaction s’est faite sous la supervision de Maître Adeline Kassi-N’Goroma, notaire. Malgré la promesse de vente signée, elle n’a toujours pas procédé à l’enregistrement de l’acte de vente, laissant ainsi l’acheteur, M. Sanogo dans l’incertitude quant à son acquisition complète du bien.

Pourtant, cette promesse synallagmatique de vente (sous conditions suspensives) notariée stipule clairement, à propos de la ‘’propriété-jouissance’’ que : « L’acquéreur sera propriétaire de l’immeuble actuellement vendu à compter du jour de la signature de l’acte authentique constatant la réalisation effective de la vente. Il en aura la jouissance à compter de ce même jour, par la prise de possession réelle et effective, ledit immeuble étant libre de toute location ou occupation quelconque, ainsi déclaré par le vendeur. » De plus, il est mentionné : « Enfin, il s’acquittera de tous les droits, frais et honoraires afférents aux présentes, ainsi que des formalités qui y seront inhérentes, y compris, le cas échéant, les frais des formalités nécessaires, à ce moment-là ou dans l’avenir, pour la conservation des droits du vendeur. »

En l’absence de retour de Maître Kassi-N’Goroma, le bénéficiaire, M. Sanogo engage de ce fait un autre notaire, Me Karidja Touré-Ballo puis un commissaire de justice, Me Kouamé Bohoussou du Cabinet Koffi Kra Olivier, pour obtenir des informations sur la situation.

Deux ans plus tard, en mars 2022, plusieurs courriers sont échangés, mais les chèques destinés à régler les frais d’honoraires du notaire sont refusés.

Une plainte est alors déposée auprès de la Chambre des Notaires le 3 mars 2022, suivie d’une convocation devant le Procureur Général le 29 mars 2022.

Au cours de la susdite procédure menée par l’avocate Général du Parquet, le conseil de Sanogo Mamadou transmis, dans une correspondance datée du 20 mai 2022, des copies de chèques afin de prouver que l’ensemble des paiements avait été effectués. Ces paiements concernent le prix de vente du bien à hauteur de 200 000 000 FCFA pour l’achat du terrain auprès de Maître Adeline Kassi-N’goroma et 120.000.000 FCFA pour la construction de l’immeuble.

⚫ Chèque SIB N°4535601 d’un montant de cent millions (100 000 000 FCFA) du 15 avril 2020

⚫ Chèque SIB N°1000270 d’un montant de cinquante millions (50 000 000 FCFA) du 15 mars 2021

⚫ Chèque SIB N°4535715 d’un montant de quarante millions (40 000 000 FCFA) du 19 mars 2021

⚫ Chèque SIB N°4535714 d’un montant de dix millions (10 000 000 FCFA) du 19 mars 2021

Le conseil conclut cette justification en ces termes : « Dans un souci d’économie de procédure judiciaire, je vous mets à disposition les copies des chèques attestant le paiement intégral du montant convenu. » [Fac-similé de l’un des chèques attestant que les paiements ont bien été effectués]

Aussi, sur instruction du Parquet Général, M. Sanogo a payé à nouveau au notaire, Adeline Kassi, ses honoraires et frais d’un montant de 22 463 180 FCFA en vue de la mutation du bien immobilier à son profit, lesquels ont été encaissés le 31 mars 2022 :

⚫ Chèque SIB n°100499 d’un montant de 21 530 750 FCFA ;

⚫ Chèque SIB n°1000513 d’un montant de 932 430 FCFA.

Les 320.000.000 c’est 200.000.000 payer

Une sorte de complicité et d’escroquerie

 

La notaire a été assignée en référé, le 29 juillet 2022, par Sanogo Mamadou pour la restitution de pièces afin de confier le dossier à un autre notaire. Cet acte demandait ainsi au Tribunal de bien vouloir ordonner à Maître Kassi-N’goroma de restituer l’intégralité du dossier de cession, sous peine d’une astreinte de 1.000.000 F CFA par jour de retard.

Malheureusement, aucune pièce permettant cette transmission à un autre notaire n’a été communiquée.

À cet effet, concomitamment à cette procédure de référé, lassé de l’inaction de Maître Kassi-N’goroma, M. Sanogo a aussi sollicité du Parquet Général d’ordonner la restitution du dossier de cession par Me Kassi-N’goroma et de l’attribuer à un autre notaire. Cette demande est également restée sans réponse. « Cela ne me paraît pas très transparent de la part de la notaire et me donne l’impression qu’elle [notaire] s’est mise dans une sorte de complicité avec M. Dramera pour ne pas faire les formalités requises », lâche une source judiciaire proche du dossier.

Approchée pour avoir la version des faits impliquant la notaire, la secrétaire de l’étude de Maître Adeline Kassi-N’goroma nous a informés par échange téléphonique que la notaire était en séminaire. Elle nous a conseillé de faire parvenir notre préoccupation par message WhatsApp. Nous avons donc suivi cette recommandation, d’abord le 19 décembre 2024, puis par une relance le 6 février 2025. À ce jour, après plusieurs relances nous n’avons reçu aucun retour.

Ousmane Dramera, avec qui nous avons aussi échangé au téléphone puis via WhatsApp au mois de décembre 2024, m’a conseillé de contacter son avocat, Me Souleymane Sakho de la SCPA Sakho-Yapobi-Fofana & Associés, nous transmettant ses coordonnées. Ce dernier nous a, à son tour, informé qu’il n’avait reçu aucune instruction de la part de son client. Lorsque nous nous sommes de nouveau tourné vers M. Dramera, le chef d’entreprise a changé de parole. Il nous a demandé finalement de laisser tomber, précisant qu’il n’était pas prêt à répondre à un journaliste concernant cette affaire.

blank blank

Le jeu trouble de la notaire et de Dramera Ousmane

Maître Kassi-N’Goroma s’est engagée à finaliser les formalités de vente dans un délai de dix jours lors de la première audition. Cependant, le 9 mai 2022, la notaire ne s’est pas présentée à la seconde audition. Par la suite, l’Avocate Générale, Mme Assi Dosso Juliette, a reçu un courrier de Maître Kassi-N’Goroma dans lequel Dramera Ousmane, le vendeur, s’oppose à la mutation du bien, prétextant que Sanogo n’a pas réglé intégralement le prix. Or, les paiements du prix du bien, évalué à 200 millions de FCFA, ont été effectués par différents chèques entre le 15 avril 2020 et le 19 mars 2021. En ce qui concerne les honoraires de la notaire, d’un montant de 22 463 180 FCFA, ceux-ci ont été encaissés le 31 mars 2022. Les preuves ont été communiquées à l’Avocate Générale.

Sanogo Mamadou, qui semble être lésé dans cette affaire complexe, a déposé une plainte le 27 juin 2024 au Pôle pénal économique et financier (PPEF) pour stellionat, après avoir constaté l’inscription d’une hypothèque frauduleuse d’un montant de 678 000 000 FCFA, soit deux fois le prix de vente, auprès de l’AFG BANQUE (anciennement Banque Populaire) par le vendeur Dramera Ousmane sur le bien en question. [Fac-similé]

Ruse et une hypothèque de plus d’un milliard FCFA

 

Cette affaire, d’ampleur colossale, a été confiée à la police économique pour enquête. Soumahoro Droh, commissaire de police au Pôle pénal économique et financier (PPEF) en charge du dossier, s’est engagé de son propre chef de mener une médiation entre les parties de l’enquête. L’on s’interroge : « Un enquêteur mandaté par le procureur est-il habilité à négocier un règlement à l’amiable dans le cadre d’une enquête en cours instruite par le Magistrat du parquet ? »

Sanogo et son conseil, qui nourrissaient le désir d’être remboursés, étaient loin de s’imaginer qu’ils avaient affaire à un individu rusé.

Lors de la confrontation du 25 juillet 2024, Dramera Ousmane prend l’engagement, en présence des enquêteurs de la police, de rembourser la somme de 320 000 000 FCFA au plus tard le 29 août 2024.

Cette rencontre, dont nous détenons copie du procès-verbal, a enregistré la présence de plusieurs acteurs clés dans le cadre de l’affaire en cours, notamment :

  • Soumahoro Droh : commissaire de police en charge du dossier.
  • Mme Gnadro épse Adelaïde Tabley : capitaine de police et officier de police judiciaire ;
  • Mamadou Sanogo : le plaignant ;
  • Ousmane Dramera : le vendeur ;
  • Me Nambeya Ouattara : avocat du plaignant.

Au cours de cette rencontre, divers points importants ont été abordés, notamment : l’objet de la vente, la partie renonciatrice à la vente, la question du remboursement, ainsi que la question de l’hypothèque, qui constitue le cœur de la plainte.

Les différentes auditions ont toutefois révélé des absences répétées de la partie adverse, ce qui a soulevé des doutes quant à la bonne foi de M. Dramera. En cause, malgré les engagements pris lors des confrontations et l’accord proposé, les promesses de remboursement n’ont pas été tenues. À la date de remboursement, le 29 août, M. Sanogo apprend, par l’intermédiaire du commissaire de police en charge du dossier, que M. Dramera est hors du pays et ne peut pas respecter ses engagements.

Après plusieurs mois d’attente, le dossier est transmis au Procureur Adjoint, Angan Simplice. Néanmoins, le traitement du dossier semble toujours bloqué. La situation d’incertitude de Sanogo Mamadou quant à l’issue de cette affaire va le bouleverser davantage.

Après une enquête dûment diligentée en juillet 2024, la police économique a finalement transmis le procès-verbal d’enquête sous le n°528/DPEF/SDEF du 04/07/2024, ainsi que le document n°127/MIS/DGPN/DGACPJ/DPEF du 09 septembre 2024. Après plus de six mois, M. Sanogo et son conseil n’ont toujours pas accès à ce procès-verbal (au moment où nous rédigeons cette enquête).

Pis, dans ce même mois de septembre 2024, Dramera a contracté une seconde hypothèque sur le même bien, portant ainsi le montant total à 1 130 000 000 FCFA, aggravant considérablement la situation dans la même banque.

Nous avons alors adressé une demande d’informations à AFG Banque concernant l’existence d’une première hypothèque conventionnelle de 678 millions de FCFA inscrite en mars 2023, qui a ensuite été portée à 1,13 milliard de FCFA en septembre 2024, établie par M. Dramera et enregistrée au bénéfice de cette même banque le 6 février 2025, et ce, malgré le paiement intégral du bien à 320 millions FCFA par M. Sanogo.

La direction de l’institution n’a pas jugé opportun de nous éclairer sur ce mouvement suspect en répondant à notre requête.

Une justice qui tarde depuis 5 ans

blank blank blank

 

Pendant que la plainte suit son cours, le dossier au pôle pénal économique reste en attente d’affectation à un juge d’instruction alors que les résultats de l’enquête ont été transmises depuis le 9 septembre 2024. Pourtant, Dramera Ousmane continue d’être en toute impunité libre de ses mouvements pour une infraction présumée avérée.

L’affaire opposant Mamadou Sanogo à Ousmane Dramera et Maître Adeline Kassi-N’goroma, notaire, met les projecteurs sur des dysfonctionnements au sein du système judiciaire et des pratiques douteuses dans le domaine immobilier. Malgré les nombreuses démarches entreprises, M. Sanogo se heurte à des obstacles à chaque étape.

Cette situation soulève des questions sur l’efficacité des institutions et la protection des droits des acquéreurs en Côte d’Ivoire. Alors que l’affaire se poursuit, l’espoir d’une résolution rapide semble s’éloigner et, M. Sanogo Mamadou attend toujours que justice soit faite pour être rétablie dans ses droits de propriétaire de bonne foi.

En dépit de cela, la victime de cette injustice, depuis environ 5 ans, reste persuadé que le droit sera dit et que justice sera rendue : ‘’ Je reste confiant et persuadé que la vérité éclatera dans cette affaire.’’

blank blank

 

Commentaires Facebook

Laisser un commentaire