Viré de l’Uemoa – Un haut fonctionnaire ivoirien, ancien Dg du Trésor court derrière ses droits depuis 13 ans

Il accuse des proches de Ouattara

Déclenchée en novembre 2004 quand le gouvernement Gbagbo a voulu le remplacer par Jérôme Bro Grébé suivant l’acte additionnel n°06/2004 du 15 novembre 2004, l’affaire Eugène Yaï n’a pas encore connu son dénouement.

L’ancien commissaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa) qui a pris fonction le 1er mars 2003 après sa prestation de serment avait fini par perdre son poste (alors que son mandat courrait jusqu’en 2007) au profit du défunt époux de Geneviève Bro Grébé mais sa situation financière est aujourd’hui des plus catastrophiques.

C’est que, la décision de son renvoi ne fut pas facile à appliquer en son temps. Elle a été actée trois fois par la Conférence des chefs d’Etat en violation des articles 16, 27, 28 et 30 du traité instituant l’Uemoa. Trois fois il a attaqué cette décision en justice à la Cour de justice de l’Uemoa qui lui a, chaque fois, donné raison. Dans tous les cas, il ne fut pas maintenu à son poste et la Cour a demandé aux autorités compétentes d’indemniser M. Yaï à hauteur de 266 millions de FCFA à titre de dommages et intérêts puis 1,5 milliard de FCFA pour préjudice moral. Depuis maintenant 13 ans, cet argent ne lui a jamais été versé.

En lâchant du lest dans cette affaire, Eugène Yaï avait jugé utile, pour sa sécurité de se réfugier en France où il obtint le statut de réfugié de la part des autorités françaises. L’arrivée d’Alassane Ouattara au pouvoir sonnait pour lui comme l’ère de gloire d’autant plus que le chef de l’Etat ivoirien, ancien haut fonctionnaire lui-même, est président de la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Uemoa. Vite, il rentre dans le réseau et obtint en 2011, un tête à tête avec le nouveau président ivoirien en 2011 lors d’un séjour de celui-ci à Paris. C’est Alassane Ouattara, selon les dires de M. Yaï, qui le conseille de mettre fin à son exil et de rentrer à Abidjan pour voir sa situation se décanter. Eugène Yaï, sans tarder, prend une carte de militant Rdr et rentre au pays, laissant femme et enfant à Paris.

Cela fait bientôt sept ans qu’il est là et il n’a perçu aucun sou. Tous les accès à Alassane Ouattara lui sont fermés. Même le courrier qu’il lui envoie et qui est enregistré le 12 mai 2016 à 17 h 33 par le chef du service courrier de la présidence n’eut pas de suite. Dans cette lettre, il décrivait sa situation de détresse face au non-paiement des dommages et intérêts ainsi que sa non-affectation à un poste de travail en Côte d’Ivoire.

M. Yaï, faut-il le rappeler a occupé avant sa nomination à l’Uemoa, le poste de directeur général du Trésor et de la comptabilité publique (24 mai 2000 – 4 mai 2001). C’est un cadre chevronné au parcours exemplaire. Il a été un collaborateur d’Alassane Ouattara en tant que responsable du secrétariat technique des négociations avec le FMI et la Banque mondiale au début des années 90.

Eugène Yaï est aujourd’hui un homme désemparé, malade mais déterminé à lutter pour sa dignité. « Je suis complètement à bout. De 7,5 millions CFA de salaire, je me retrouve aujourd’hui à seulement 350 mille CFA comme salaire de fonctionnaire à deux mois de ma retraite. Je ne sais plus à quoi sert ma carte Rdr. Ou bien veut-on me condamner à la maladie et à la mort ? (…) J’ai leur carte et le ministère de l’intérieur enquête sur moi ! Je suis en exil intérieur dans mon propre pays », se désole-t-il lors d’une conférence de presse à Abidjan le jeudi 23 novembre.

L’ancien haut fonctionnaire qui avait aussi des entrées chez Blaise Compaoré en son temps, pointe du doigt des mains occultes qui lui feraient ombrage pour avoir son dû. Il révèle qu’après s’être confié à plusieurs émissaires, quelqu’un dans l’entourage du chef de l’Etat serait venu lui proposer d’abandonner la moitié de ses indemnités s’il veut être payé dans les jours qui suivent. Une proposition indécente qu’il n’a pas acceptée, selon ses dires. Et depuis, il est à la recherche de la clé de son problème, réduit à végéter dans Abidjan loin de son épouse et de sa fille restées à Paris.

SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr

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3 réflexions au sujet de “Viré de l’Uemoa – Un haut fonctionnaire ivoirien, ancien Dg du Trésor court derrière ses droits depuis 13 ans”

  1. « Je ne sais plus à quoi sert ma carte Rdr ». On en rirait presque s’il n’y avait pas de drame associé à l’affaire. Yako mon frère. Comme dit l’adage, « l’herbe est toujours plus verte ailleurs ». Prends conseils auprès de Mamadou Koulibaly, lui aussi dans la même situation où l’on pisse à la raie des décisions de justice défavorable au Prince.

  2. UNE AUTRE LECTURE DE CETTE AFFAIRE

    Viré de l’Uemoa – Un haut fonctionnaire ivoirien, ancien Dg du Trésor court derrière ses droits depuis 13 ans

    « IL ACCUSE DES PROCHES DE OUATTARA ». Rien que cette première phrase suffit à polluer les esprits !

    Présenté sous cet angle, effectivement l’affaire pourrait sembler « une affaire Ouattara » alors que c’est bien l’ancien Président ivoirien Laurent Gbagbo en 2005 qui l’avait démis, suivant l’acte additionnel n°06/2004 du 15 novembre 2004, en tant que représentant de notre pays à l’UEMOA . Pour le remplacer par feu Monsieur Jérôme BRO GREBE (époux de Madame Le Ministre au poste de Commissaire ivoirien de l’UEMOA, en charge des fonds structurels et de la coopération internationale au sein de l’institution économique et monétaire ouest-africaine.

    Naturellement cette décision était lourdement entachée de faute administrative et juridique (l’article 27 du traité de l’UEMOA pose le principe de l’irrévocabilité du mandat des commissaires).

    Pour les aspects juridico-juridiques je vous renvoie à l’arrêt n° 03/2005 du 05 avril 2005 dans l’affaire Eugène YAI contre la Conférence des Chefs d’Etats et de Gouvernement.) lui-même mais aussi et surtout à l’excellent article de Robert Yougbare « La nature juridique de l’acte additionnel dans le système juridique de l’UEMOA. A la lumière de l’affaire « Yaï ».

    Malgré tous les actes de remise en cause et de droit, Jérôme Bro Grégbé en tant que commissaire au nom de l’Etat de Côte d’Ivoire prêtera serment le 6 juin 2005 !
    Il est connu que l’UEMOA sur ce dossier avait failli !

    Dans les mêmes conditions un autre Commissaire, l’ancien commissaire sénégalais aux politiques économiques à l’Uemoa, El Hadj Abdoul Sakho, sera relevé de ses fonctions.

    Par son pays ! Malgré la forte assistance juridique, sa plainte instruite en avril de cette année, a été déboutée !

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    Avril 2017, La Cour de Justice de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) s’est prononcée ce 18 avril 2017 sur les Requêtes N°11R006 du 17 novembre 2011 aux fins d’appréciation de légalité et N°12R001 du 05 avril 2012 aux fins d’indemnisation opposant Monsieur El Hadji Abdou SAKHO à la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement et à la Commission de l’UEMOA.
    Ainsi, la Cour, statuant publiquement et contradictoirement en matière de Fonction Publique Communautaire en premier et dernier ressort, après avoir déclaré recevables les recours en annulation et en indemnisation de Monsieur El Hadji Abdou SAKHO, l’a débouté de toutes ses demandes.
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    Le Président Ouattara at-til pouvoir de tout régler ce délicat dossier d’un coup de baguette magique sans créer de précédents graves ?

    On pourrait plaindre Monsieur YAI Eugène et déplorer certainement la faiblesse de nos institutions africaines !
    Mais il faut noter que l’affaire a été jugée et rejugée bien avant l’accession de Ouattara à la tête de l’Etat. On ne saurait donc personnaliser le débat ici !

    Au demeurant le citoyen lambda pourrait au passage s’interroger sur ce que font réellement ces augustes commissaires pour percevoir un salaire de 7,5 millions de nos francs. Soit 360 millions F CFA en quatre petites années de mandat ! Quand un honorable fonctionnaire à la veille de sa retraite ne reçoit que 350 000 F soit 21 fois moins (chiffres donnés par YAI).

    Comment M. Yaï, qui fut Directeur général du Trésor et de la comptabilité publique, ne perçoit que 350 mille ? C’est un autre débat ! Est-il en position de disponibilité ? On ne le sait pas. A trop creuser on peut ouvrir d’autres portes pas forcément glorieuses…

    Sur un autre registre, M. YAI nommé par Guei, DG du Trésor en mai 2000 jusqu’à mai 2001, devrait garder également profil bas !

    Beaucoup de nos compatriotes nommés par décret présidentiel se sont vus remis dans un garage par simple note de service ! Ce sont des dossiers pendants et des effets collatéraux…

    Le ministre Adama KONE de mai 2001 à novembre 2010, occupa le poste de Directeur Général Adjoint du Trésor et de la Comptabilité Publique avant d’occuper enfin de décembre 2010 au 12 janvier 2016 le poste de Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité Publique. Un long parcours de combattant…
    L’administration a ses grandeurs mais aussi ses servitudes !

    Ramenée toute cette affaire à une question de carte de militant RDR ne grandit par notre frère YAI Eugène. Certaines personnes qu’on suppose intelligentes, ne retiendront volontairement que cet aspect de l’affaire. Cette posture qui témoigne du reste du militantisme alimentaire, reflète hélas un état d’esprit propre à bien de nos cadres dits supérieurs.

  3. L’IMMENSE POUVOIR DES CONSEILLERS ET SECRÉTAIRES DU PRÉSIDENT

    On se rappelle encore en 2009 de Dame Emilienne Gomé, cette secrétaire du président ivoirien Gbagbo Laurent, qui s’était rendue coupable d’une escroquerie …. de plus de 65 millions de francs CFA au détriment de la société de télécommunication sud-africaine MTN.

    Qu’il s’agisse donc de Ouattara ou de Feu Félix HOUPHOUET BOIGNY en passant par Bédié, Guéi, le pouvoir des conseillers et proches des chefs d’Etat, est toujours immense !
    Avec eux, l’adage « le plus mauvais arrangement vaut mieux que le meilleur procès » prend tout son poids !
    Du détournement des enveloppes présidentielles aux autres méthodes qui s’apparentent toutes à des pratiques de « coupeurs de routes », la liste est longue !
    Au point que seuls ceux qui ont suffisamment à manger peuvent résister à des propositions jugées indécentes !

    Ce sont des pratiques qu’il faut combattre. Mais qui peut les dénoncer et véritablement les combattre, ceux qui en savent parfois, un peu trop sur leur chef ?

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