CÔTE-D’IVOIRE: Polémique autour d’une inculpation

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Si les autorités ivoiriennes pensaient qu’il suffisait d’inculper formellement l’ancien président Laurent Gbagbo et son épouse, Simone pour faire taire tous les bruits de ses avocats, c’est qu’elles méconnaissent les subtilités du droit. En effet, depuis la chute de l’ancien couple présidentiel, il n’a jamais été au centre d’une polémique aussi vive que celle qui a résulté de son inculpation formelle, le jeudi dernier. C’est comme si les avocats de Simone et de Laurent Gbagbo avaient tendu un piège dans lequel les autorités se font ainsi prendre. La thèse du piège est d’autant plus probable que c’est fondamentalement suite aux dénonciations répétées des proches et défenseurs de l’ancien couple présidentiel quant au vide juridique qui entourait, estimaient-ils, leur assignation en résidence surveillée, que la décision d’inculpation a été prise, le jeudi 18 août dernier. Et aussitôt cette dernière rendue publique que les mêmes avocats brandissent l’argument d’un vice de procédure

Les défenseurs pensent en effet qu’aux termes de la loi ivoirienne, Laurent Gbagbo, ayant dirigé le pays pendant une dizaine d’années, il devait, en dépit de tout, jouir d’un statut de privilège accordé à tous les anciens chefs d’Etat ivoiriens. Ce statut devait alors, selon eux, déboucher sur une procédure spéciale pour juger l’ancien président.

De même, de par son statut d’ancien président, Laurent Gbagbo est membre de droit du Conseil constitutionnel ivoirien. Ce qui lui confère une immunité reconnue à tous les membres de cette haute juridiction. Une immunité qui n’aurait pas été levée et qui serait donc violée. Quant au cas de Simone Gbagbo, elle aussi jouirait d’une immunité parlementaire, car elle était membre de l’Assemblée nationale ivoirienne.

Les autorités pensent, quant à elles, qu’il est facile de balayer l’argument concernant Simone Gbagbo. Son immunité ne serait plus de cours, car la législature dont elle revendique l’appartenance était déjà à expiration. Mais en ce qui concerne l’ancien président, les choses risquent d’être moins faciles. Notamment en ce qui concerne la procédure spéciale que nécessite le jugement d’un ancien président. Une loi de 2005 le stipulerait de manière explicite. Même par rapport à son immunité qu’il tire de son appartenance au Conseil Constitutionnel, l’argument n’est pas à négliger. Là, puisqu’il n’est pas question d’un mandat électif qui arriverait alors à terme, le seul moyen de se conformer à la loi pour poursuivre Laurent Gbagbo, aurait été de réunir les membres de l’institution pour qu’ils décident de la levée de l’immunité de l’ancien président.

Comme on le voit, l’inculpation de Laurent Gbagbo et de son épouse, annoncée en grande pompe risque bien de se révéler un boulet aux pieds d’Alhassane Ouattara et de ses collaborateurs. Une erreur de procédure qui pourrait être interprétée comme une précipitation dictée par une justice plus revancharde que réparatrice. Surtout que les précédentes inculpations renforcent cet argumentaire.

Pivi Bilivogui pour GuineeConakry.info

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