OIPI: « La Côte d’Ivoire enregistre en moyenne 600 marques et entre 22 et 25 brevets par an »

Lorsqu’un pays dispose d’un écosystème de la propriété intellectuelle suffisamment robuste, celui-ci contribue pleinement à la croissance économique dudit pays, indique le Dr. Paul Assandé, Directeur général de l’Office Ivoirien de la Propriété Intellectuelle (OIPI) dans un entretien accordé au Centre d’Information et de Communication Gouvernementale (CICG).

Présentez-nous l’Office ivoirien de la propriété intellectuelle ?
L’Office ivoirien de la propriété intellectuelle (OIPI) est un établissement public national à caractère administratif créé par décret en 2005 et qui a pour mission d’administrer le système de la propriété intellectuelle.
Il faut noter d’emblée que la propriété intellectuelle regroupe l’ensemble des œuvres de l’esprit. Le système de la propriété intellectuelle est en effet un dispositif juridique qui permet de protéger toutes les œuvres de l’esprit. Et cette protection se fait suivant deux dimensions.
La première est la propriété artistique et littéraire qui couvre l’ensemble des œuvres d’art (musique, littérature…). Et la seconde est la propriété industrielle qui couvre l’innovation ou la création technologique, la création de marques.
Le rôle de l’OIPI est de gérer la protection de toutes ces créations dans un premier temps, ensuite d’accompagner les détenteurs des titres, une fois protégés, à les valoriser, et enfin de les aider à défendre les titres contre toutes les velléités de contrefaçon.

Comment faire certifier sa marque ou son projet par l’OIPI ?
À l’OIPI, nous parlons plutôt d’enregistrement lorsqu’il s’agit des marques et des autres titres, et puis de labellisation lorsqu’il s’agit des produits du terroir.
Aussi, toute entreprise ou toute personne physique, qui a une marque à protéger, s’adresse aux services de l’OIPI qui vont l’assister à renseigner un certain nombre de documents. Ils vérifieront certaines informations, puis le document sera transféré à l’OAPI (Organisation africaine de la propriété intellectuelle), qui, en dernier ressort, délivre le certificat après examen.
Mais à l’endroit de tous les entrepreneurs et autres détenteurs de marques ou de titres de propriétés qui voudraient les protéger, nous leur proposons, lorsqu’ils viennent au service technique, d’effectuer la recherche d’antériorité afin de s’assurer que dans la base de données qui existe aussi bien à l’OAPI que dans d’autres espaces, la marque ou le nom à protéger ne sont pas déjà utilisés. Les usagers ne sont cependant pas prompts, le plus souvent, à accepter cette proposition et par la suite, cela soulève d’autres préoccupations.
Telle est donc la démarche que les usagers doivent suivre lorsqu’ils ont envie de protéger des créations sous forme de marques ou de brevets.

Aujourd’hui, combien de marques, de brevets ou de titres sont enregistrés au compte de la Côte d’Ivoire à l’OAPI ?
Cette question est un peu complexe, mais globalement, nous enregistrons en moyenne 600 marques et entre 22 et 25 brevets par an, en Côte d’Ivoire.
Ce qu’il faut retenir d’important, c’est que l’espace OAPI compte 17 pays qui ont la langue française en commun. Et sur ces 17 pays, la Côte d’Ivoire est dans le Top 3 en termes de nombre de titres déposés par an dans l’espace OAPI. Nous sommes premiers sur certains titres, deuxième sur d’autres, puis troisième. Il faut noter que le nombre de dépôts est corrélé à la dynamique de l’activité économique.
Cependant, nous estimons à l’OIPI que nous n’avons pas encore atteint la vitesse de croisière au regard de l’intensité de l’activité économique en Côte d’Ivoire. Nous pensons que nous pouvons faire mieux. Voilà pourquoi nous sommes engagés dans une vaste campagne de communication, depuis deux ans, pour exhorter toutes les entreprises, ainsi que les personnes physiques qui ont des titres à protéger, à venir vers nous pour qu’on puisse ensemble créer cet écosystème de propriété intellectuelle qui puisse concourir au développement économique de notre pays.

Quel est l’impact de l’OIPI sur le développement socio-économique de la Côte d’Ivoire ?
Pour mesurer l’impact de la propriété intellectuelle, puisque l’OIPI gère la propriété intellectuelle, il faut faire des études. Nous ne pouvons nous hasarder à estimer aujourd’hui l’impact. Je vais toutefois vous emmener à exploiter les données d’études qui sont menées en Europe par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), ainsi que d’autres structures techniques de la propriété intellectuelle en Europe qui mènent des études régulièrement. Ceux-ci sont arrivés à la conclusion qu’un petit échantillon de 600 entreprises qui utilisent intensément la propriété intellectuelle (protègent régulièrement leurs marques, font des inventions techniques protégées sous forme de brevets, protègent le design de leurs produits), contribuent à environ 50% (47% plus précisément) au Produit Intérieur Brut (PIB) de l’Union européenne. Voyez le poids que représente ce petit échantillon dans l’économie européenne, qui va jusqu’à 80% au niveau de l’exportation.
Ceci pour attester que lorsque nous avons un écosystème de la propriété intellectuelle qui est suffisamment robuste, il contribue pleinement à la croissance économique dans le pays. L’innovation est le moteur de la croissance, mais l’on ne peut parler d’innovation sans parler de propriété intellectuelle. À l’OIPI, nous disons que si l’innovation est le moteur de la croissance, pour qu’un moteur tourne, il faut du carburant. La propriété intellectuelle est donc le carburant de cette innovation.

Monsieur le Directeur Général, votre mot de fin
Je voudrais lancer un appel à l’endroit des entreprises, et de toute la population ivoirienne, de sorte que nous conjuguions nos efforts pour faire émerger, dans notre écosystème entrepreneurial, une culture de la propriété intellectuelle. Cela suppose une chose principale, celle d’avoir le réflexe de protéger ses créations, sous forme de marques, de brevets… Et bien évidemment, une fois la création protégée, l’on peut la valoriser davantage.
Je voudrais par ailleurs indiquer qu’hier, pour valoriser une entreprise, l’on regardait son patrimoine physique. Mais aujourd’hui, la valeur d’une entreprise est constituée à environ 80% de son actif immatériel (marques, brevets). Ce qui atteste de l’importance de la propriété intellectuelle dans l’économie d’un pays.
Je voudrais par conséquent encourager les entrepreneurs, les responsables de PME, les chercheurs, et les instituts de recherche à se rapprocher de l’OIPI pour qu’ensemble nous trouvions le chemin qui puisse conduire la Côte d’Ivoire vers l’émergence en utilisant aussi la propriété intellectuelle. Je vous remercie.
CICG

Commentaires Facebook

Laisser un commentaire