Après une accalmie; le conflit à l’Est de la RDC occupe en ce début d’année les feux de l’actualité africaine. Lors de la demi finale de la CAN qui les a opposés aux éléphants de CI le 07 Février dernier, les léopards de la RDC ont mis un brassard noir pour protester que le conflit à l’Est de leur pays.
L’Est de la RDC ne parvient pas à être stabilisé depuis Octobre 1996, date où l’ AFDL ( Alliance des Forces Démocratiques de Libération ) de Laurent Désiré Kabila, un mystérieux groupe rebelle inconnu jusque-là, est apparu à la frontière rwandaise. Après environ six mois d’une progression fulgurante qui a étonné toute l’Afrique, les troupes rebelles pénétrèrent dans en Mai 1997 dans la capitale Kinshasa, alors que le Président Mobutu avait fui pour le Togo, deux jours auparavant. Les rebelles ont bénéficié de l’apport des armées rwandaise, ougandaise, et dans une moindre mesure burundaise.
Depuis cette date, cette partie du Congo échappe au pouvoir de Kinshasa. Plusieurs groupuscules rebelles ont vu le jour et imposent leur loi aux populations. La question qu’on peut se poser aujourd’hui est de savoir pourquoi en 28 ans, l’armée de la RD Congo n’est pas parvenue à solutionner durablement le problème ? Pratiquement tous les pays de la zone ( Rwanda, Ouganda, Burundi, Angola …….) en ont terminé avec les mouvements de rébellion qu’ils connaissaient. Pourquoi ce n’est pas le cas en RDC ?
Aujourd’hui le M-23, ce mouvement rebelle appuyé par le Rwanda, fait subir défaites sur défaites à l’armée congolaise. La grande ville de Goma, capitale provinciale de plus de deux millions d’habitants, avec ses immenses camps de réfugiés et de déplacés, est aujourd’hui leur objectif. Les combats font rage depuis le début du mois de Février 2024.
L’une des clés pour comprendre les difficultés de l’armée de la RDC à venir à bout des groupes rebelles, tient en l’immensité du territoire. La RDC est le second pays le plus vaste du continent après l’Algérie. En avion, plus de 5 000 km séparent la capitale Kinshasa des provinces de l’Est, là où se déroulent les combats. Par la route, c’est environ 8 000 km qu’on parcourt entre Kinshasa et Goma
A l’instar des autres pays africains, en RDC, tout est concentré dans la capitale. Il faut donc projeter, c’est-à-dire acheminer les hommes, le matériel et toute la logistique sur cette distance. Il faut ensuite faire des rotations en avions gros porteurs pour ravitailler et relever les troupes, acheminer les munitions et pièces de rechange etc….etc… C’est un défi logistique et financier majeur qui pèse lourdement sur l’effort de guerre congolais. C’est connu, plus le théâtre des opérations est lointain, plus la guerre est coûteuse. A l’inverse, la ville de Kigali est à moins de 100 km de Goma, ce qui permet au Rwanda de porter facilement assistance au M-23.
La RDC est un pays entièrement couvert de forêts. C’est un facteur qui handicap l’effort de guerre congolais. La forêt reste une entrave à l’utilisation des blindés légers, des canons mobiles, elle se prête aussi aux embuscades. Les combats se font essentiellement au « corps à corps ». Les américains ont connu ce problème au Vietnam. Ils faisaient face à des troupes aguerries aux combats en pleine jungle, alors que leurs chars et blindés ne pouvaient pas manœuvrer dans un tel environnement. L’armée rwandaise qui arme et encadre le M23 est à l’origine une armée de maquisards, rompus aux combats en pleine forêt. Les Rwandais sont très expérimentés pour ce type de guerre, à l’inverse des congolais qui ont une approche beaucoup plus conventionnelle des combats.
Dans le Nord du Nigéria, le groupe Boko Haram avait pour base arrière la vaste forêt de Sambisa que l’armée nigériane a mis longtemps à reconquérir. Les djihadistes ont définitivement été chassés de la zone grâce à l’utilisation intensive du fameux drone turc Bayraktar TB-2. Il est reproché à l’armée congolaise de « fuir le combat ». Le » manque d’engagement des troupes » est souligné dans plusieurs articles parus sur cette guerre. L’armée RD congolaise se replie dès qu’il y a accrochage, abandonne trop vite ses positions pour adopter une attitude défensive, laissant entièrement l’initiative aux rebelles du M-23. Les officiers du contingent tchadien déployés au Mali, une fois rentrés au Tchad, avaient aussi reproché cela à l’armée malienne, affirmant qu’elle » attend qu’on fasse tout le boulot à sa place ». Souvent on assiste à des révoltes des populations de l’Est de la RDC contre leur armée, à qui elles reprochent de ne pas « vouloir se battre ». C’est dire que ce mal est profond.
Les minerais jouent en faveur de la guerre dans le pays, alors qu’ils devraient plutôt favoriser le développement. Les nombreux groupes rebelles se financent sur le trafic de pierres précieuses, et des essences de bois, le tout exporté via les pays limitrophes. Un tel trafic est favorisé par la corruption qui règne en RDC, et c’est le dernier point à relever. Au Mali et au Niger, on a assisté à des scandales de corruption au niveau de l’armée, lorsque des milliards de CFA destinés à l’achat d’équipement se sont volatilisés. La RDC n’échappe pas à ce phénomène. On assiste régulièrement à ce type de scandale. Et c’est quelque chose qui handicap l’effort de guerre, qui démoralise les troupes.
Pour terminer, il faut noter que la nation congolaise, toutes tendances politiques confondues, fait bloc derrière son armée. Le pays reste soudée sur cette question. Il faut aussi relever que malgré toutes les défaites qu’elle subit sur le front, malgré tous les massacres attribués aux groupes rebelles, l’armée congolaise reste fidèle au pouvoir en place, contrairement aux armées des pays du Sahel confrontés aux groupes djihadistes, qui ont renversé les pouvoirs civiles. C’est un point positif qu’il convient de relever quand on analyse ce conflit.
Enfin la presse spécialisée faisait état d’informations selon lesquelles le régime congolais aurait été démarché par la firme de mercenaires russes Wagner. Il y a eu un démenti formel du côté du gouvernement congolais. Pourtant il faudra tout de même attendre quelque peu pour y voir un peu clair, tous les gouvernements qui ont eu recours à cette milice ont tous démenti les premières informations qui ont fuité.
Douglas Mountain
Le Cercle des Réflexions Libérales
oceanpremier4@gmail.com
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