Ce que révèle le rapport d’audit de l’Igf
Dans une publication du 27 juin 2023, le confrère Ivoir’Hebdo affichait en première page la ministre de la Solidarité et de la lutte contre la Pauvreté. Selon le confrère, celle-ci prendrait quelque liberté dans la gestion du portefeuille des filets que gère son département. Il mettait même en cause les compétences de ses services suivant un rapport de l’Inspection générale des finances. Telle une réponse du berger à la bergère, la ministre éclaire ici les principes qui gouvernent la gestion de son département et revient sur ce rapport d’audit qui l’aurait épinglé.
L’Inspection Générale des Finances (IGF) joue pour tous les projets du portefeuille de la Banque Mondiale la fonction d’audit interne. A ce titre, selon un plan d’audit convenu avec les projets, elle a des missions ordinaires en vue de les accompagner par ses conseils/recommandations vers l’atteinte de leurs objectifs.
C’est dans ce contexte que se situe la mission à laquelle l’hebdomadaire Ivoir’Hebdo fait référence à travers ce qui est, à l’analyse, une exploitation partielle et équivoque des données du rapport y afférent. L’IGF a effectivement réalisé des missions de contrôle des opérations financières et d’évaluation de l’efficacité du processus des transferts monétaires à Abidjan sur la période 2021 – 2022. Il convient de préciser que le rapport de ladite mission conclut que, « de façon générale les procédures comptables, financières et de passation de marchés ont globalement été respectées ». En outre, « à l’échelle de l’échantillon audité, le processus des transferts monétaires dans le district d’Abidjan est globalement efficace ».
Au titre de son rapport et concernant les constats d’audits formulés par l’IGF dans les règles de l’art, aucune irrégularité de nature à être qualifiée de « grave » n’a été relevée. Aucun problème de compétence n’a été évoqué. Le niveau de criticité des risques a été jugé moyen et comme dans tout audit, les causes ont été passées en revue. Des échanges entre les auditeurs et le programme audité ont permis de clarifier les différents points et de les assortir de recommandations utiles. Il aurait été certainement plus judicieux de mettre en lumière le périmètre desdites recommandations et leur état d’exécution en se rapprochant des structures mises en situation, c’est-à-dire l’IGF et le Ministère de la Solidarité et de la Lutte contre la Pauvreté (MSLP).
Ces recommandations font du reste l’objet de missions de suivi. Ainsi, la mission dite de « suivi des recommandations des missions d’audits antérieures » du Programmes des Filets Sociaux effectuée par l’IGF du 22 février au 09 mai 2023 permet de relever que l’ensemble des points cités par l’hebdomadaire Ivoir’Hebdo ont été exécutés et jugés satisfaisants.
Sur la « tenue irrégulière des réunions de comités de trésorerie », les réunions sont effectivement tenues et les relevés des conclusions ont été reversés comme éléments de preuves à la mission. Sur cette question, la Coordination du programme a clarifié que les parties concernées par le Comité de Trésorerie (Agence Comptable, Contrôle Financier, Coordination) avaient convenu d’un mode opératoire qui privilégiait des points de situation virtuels dans un souci de diligence et d’efficacité. Ainsi, dans l’esprit des dispositions réglementaires et en ligne avec l’objectif d’optimiser la mobilisation des ressources, ainsi que la gestion de la trésorerie, ceux-ci ont convenu d’animer le comité de trésorerie via des échanges de mails avec comme objectif de maintenir les mêmes niveaux d’anticipation, de veille et de performance. Aucun retard de paiement n’a été relevé à ce jour depuis le démarrage du projet comme imputable à une défaillance du Comité de Trésorerie. Toutefois, la recommandation d’audit visait des rencontres en présentiel et c’est ce qui a été fait, avec des procès-verbaux tenus à la disposition de l’IGF qui les a jugés satisfaisants et en cohérence avec les objectifs de performance fiduciaire.
Sur la « Planification et suivi insuffisants des congés et permissions », il convient de noter les clarifications ci-après.
Les difficultés d’observance des dates de congés d’une année à l’autre, incluant la volonté propre des concernés à ajourner ou annuler la manifestation de leurs droits en la matière, avaient effectivement conduit à l’indisponibilité d’un planning actualisé en 2021. Le fichier en cours de révision au moment de l’audit n’avait pu être tenu à la disposition des auditeurs sans que cela soit constitutif d’un « grave dysfonctionnement », encore moins d’un « laisser-aller » ou d’un « laisser-faire ».
Bien au contraire, vu le niveau de l’urgence à tenir à bonne date les préparatifs et le paiement des ménages éligibles au programme, la planification des départs en congé fait l’objet d’une mise en œuvre dans les limites de la flexibilité convenue entre la Coordination du programme et ses ressources humaines, y compris une reprogrammation prenant en compte leur meilleure volonté.
Sur la « Non mise à jour du fichier de suivi des immobilisations », le projet ne comptabilisant pas les amortissements, les discussions avec l’équipe d’audit de l’IGF impliquaient en fait une réorganisation du processus comptable de saisie des immobilisations défectueuses qui ne pouvait se faire selon le schéma conventionnel. Au demeurant, sous cette rubrique, les constats et recommandations relevés étaient suggestifs d’une action déjà prise en charge par les équipes fiduciaires du projet sans préjudice des convenances de méthodologie.
Sur la « Supervision et suivi insuffisants des Consultants Agents Communautaires (CAC) par les Directions Régionales et les Centres Sociaux d’Abidjan », la Coordination du Programme relève ce qui suit.
La supervision est gérée à bon droit comme une activité de routine par les Directeurs Régionaux (DR). Elle est en outre retracée dans le Système d’Information et de Gestion (SIG) du programme. La planification des activités des CAC se fait dans le SIG. Par conséquent, avec une traçabilité numérique, les DR peuvent y avoir accès à tout moment sans les supports matériels auxquels s’attendaient les auditeurs. Il est aussi organisé des réunions des DR avec les CAC et travailleurs sociaux. Dans le SIG, les DR procèdent à la consolidation des rapports des CAC et les transmettent. Une formation à cet effet leur a déjà été dispensée et un accompagnement au quotidien se fait pour garantir une meilleure appropriation par les acteurs de mise en œuvre. Ils ont par conséquent accès à tous les rapports mensuels des CAC de leur ressort et peuvent les consulter et les valider avant synchronisation pour transmission. Il convient de noter pour une meilleure information des lecteurs, qu’à l’instar de tous les projets du portefeuille de la Banque Mondiale, outre l’IGF, le Programme des Filets Sociaux fait également l’objet d’audits externes, ainsi que de missions régulières de supervision du bailleur sur tous les plans (processus techniques, gestion financière, passation de marchés). A ce sujet, depuis 2015, date de démarrage de sa mise en œuvre, aucune irrégularité dite « grave » n’a été relevée ni par la BM, ni par les auditeurs. Les différents comptes ont été certifiés, les résultats sont jugés globalement satisfaisants et le programme est au nombre des plus performants du portefeuille comme cela peut être vérifié auprès de la Cellule de Coordination du Ministère de l’Economie et des Finances.
Au surplus, il y a lieu de noter que le rapport d’audit n’est pas appréhendé par le MSLP comme le délibéré d’un procès à charge, mais comme une co-construction adossée à un regard extérieur dont la contribution aux objectifs de performance est hautement appréciable.
Concernant la cérémonie organisée le 24 février 2023 par le Ministère de la Solidarité et de la Lutte contre la Pauvreté (MSLP) à l’Institut National de la Jeunesse et des Sports (INJS), elle n’a nullement été un prétexte pour rendre un hommage à Madame la Ministre de tutelle du Programme des Filets Sociaux. Bien au contraire, il s’est agi d’une manifestation de la reconnaissance des nombreux représentants de bénéficiaires au Président de la République et au Gouvernement. Elle participe de l’impératif de transparence et de redevabilité qui commandent que le Gouvernement puisse valoriser les acquis des actions de lutte contre la pauvreté déployées à l’endroit des populations, particulièrement les plus vulnérables.
Contrairement aux allégations reflétées dans la publication, la communication en la matière donne l’avantage de la visibilité, mais au-delà, contribue fortement à la sensibilisation des bénéficiaires et des non-bénéficiaires, à l’adoption ou la poursuite de comportements propices au bon investissement des ressources mobilisées. Plus qu’un simple rassemblement, la cérémonie de l’INJS, évoquée dans l’article de presse permet de faire le bilan sans complaisance sur ce qui marche bien ou moins bien, de manière à ce que les leçons apprises puissent permettre de garantir la qualité des résultats.
Somme toute, le Ministère de la Solidarité et de la Lutte contre la Pauvreté voudrait prendre à témoin, l’opinion nationale et internationale sur la rigueur de son engagement, sous l’égide du Premier Ministre et de SEM le Président de la République, à conduire le renforcement de la résilience des populations fragiles, et ce, dans le seul but de la promotion de leur bien-être et de leur intérêt supérieur.
NB : Les titres et chapeau sont de la rédaction
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