Source: Lebanco.net
D’août à octobre presque chaque année, en saison pluvieuse, Grand-Bassam est victime d’inondations. Les Bassamois que nous avons rencontrés égrènent les mauvais souvenirs et pointent du doigt les causes de leurs malheurs.
Ce 19 mars 2023, nous sommes à Grand-Bassam, la première capitale de la Côte d’Ivoire. Une ville au relief plat, au sol sablonneux, et par endroits très affaissé, à quelques mètres seulement du niveau de la mer. La lagune est couverte d’herbes à plusieurs endroits. Les habitants de Petit Paris, Odos et Quartier France, qui longent cette lagune, se souviennent encore, des moments d’inondation, où l’eau a envahi leurs quartiers. En particulier l’inondation de 2019, au cours de la saison pluvieuse.
« Nous avons maintenant un caniveau ici. Il n’y en avait pas avant. Cela nous a permis de ne pas trop sentir la montée des eaux, ces derniers temps. Sinon, quand l’eau monte, ce sont les pirogues que nous utilisons pour pouvoir nous déplacer ici » , explique Mohamed Diakité, un habitant du quartier Odos. Son quartier, situé en bordure de la lagune, est régulièrement inondé.
Manque de canalisations
« Cela fait plusieurs années que nous subissons des inondations ici à Bassam. Surtout à Petit Paris. Tout cet endroit était inondé », soutient Pierre N’Guessan, ouvrier. Il garde encore en mémoire l’inondation de l’année 2019, l’une des plus graves. Ils ont dû dormir hors de leurs maisons, à des endroits aménagés. Les malades et les vieilles personnes ont été évacués dans d’autres villes proches. C’est le cas de sa maman qui ne se sentait pas bien à l’époque et qui a été évacuée à Bonoua.
Le quartier France, situé entre la lagune et la mer, a connu également les conséquences liées à la montée des eaux. Ce quartier abritant des constructions de type colonial, est régulièrement envahi par les eaux, aux dires des habitants. Martin Koua, employé dans l’un des nombreux hôtels qui bordent la mer, est l’un des témoins. Cette vendeuse de friandises en bordure de lagune ne dit pas le contraire. Elle habite le quartier. A chaque fois qu’il y a inondation, les taxis arrivent difficilement dans le quartier. Ce qui limite les déplacements, voire les activités commerciales.
L’inondation n’est pas sans conséquence sur la santé des populations. Les nombreux points d’eaux stagnantes qui en résultent, sont des nids de moustiques. Les cas de paludisme sont alors fréquents, surtout pendant ces moments d’inondation, selon des habitants que nous avons pu interroger.
La source du mal
Pour nombre d’habitants, l’une des raisons de la montée des eaux est le manque de canalisations dans la ville. « A mon avis, c’est parce qu’il n’y a pas assez de caniveaux. Ce qui rend difficile l’évacuation des eaux de ruissellement. Les eaux des toilettes se retrouvent stagnées derrière les maisons, dans les rues », confie Aboubacar, habitant du quartier Odos. Il ajoute que certains quartiers de la ville n’ont pas de caniveau et met en cause l’incivisme des populations. Celles-ci n’hésitent pas à boucher le peu de caniveaux qui existe avec les ordures ménagères, les excréments et autres déchets. « Quand il pleut cette voie est difficile à traverser », poursuit Aboubacar. C’est la rue à laquelle fait face son magasin. Il indique le Carrefour Jeunesse où il y a toujours de l’eau, même quand il ne pleut pas, du fait, selon lui, du manque de canalisations.
Chez Mamadou Camara et Seydou Keita que nous avons rencontrés au quartier Impérial Phare, ce sont les mêmes observations. « Notre problème, à Bassam, c’est qu’on n’a pas de caniveaux. Et puis des constructions ont été faites sur des bassins d’orage », soutiennent-ils. Ils citent l’exemple de Mockeyville où l’eau pouvait rejoindre la lagune si les canalisations avaient été faites. Et à la moindre pluie, l’eau inonde tout. Il n’y a pas de canalisation. Les caniveaux ne sont pas suffisamment larges, pour contenir et évacuer correctement les eaux usées et les eaux de ruissellement jusqu’à la lagune. « Allez-y voir à Bromakoté. Il n’y a pas de route », disent-ils. C’est un quartier qui manque du minimum d’infrastructure routière.
Pour certains habitants, l’inondation que subit la ville de Grand-Bassam est un phénomène naturel dû à l’ensablement de l’embouchure du fleuve Comoé. « Ce que nous vivons à Grand-Bassam, ce n’est pas une inondation due à l’eau de pluie », soutient Mamadou Camara. Selon lui, c’est l’eau des fleuves qui viennent des pays du Nord et qui doivent se reverser dans la mer. Mais avec la fermeture de l’embouchure du fleuve Comoé, l’eau se trouve bloquée. Et il s’ensuit la montée de ces eaux. C’est un phénomène naturel. « Quand il pleut c’est toute la zone qui est inondée. Tous les villages jusqu’à Bonoua. Le sable avait bouché l’embouchure du fleuve Comoé, de sorte que l’eau du fleuve ne descendait plus dans la mer et ça remontait dans les quartiers de la ville et dans les villages alentours », explique l’un des vigiles du chantier des travaux de l’ouverture de l’embouchure du fleuve Comoé.
Diomandé Karamoko
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