La Cédéao a t-elle perdu sa crédibilité sur la Guinée ?
En plus de la suspension de la Guinée, les dirigeants de la Cédéao ont exigé le respect de l’intégrité physique du président Alpha Condéet sa libération immédiate et sans condition, ainsi que celle de toutes les personnalités arrêtées.
Le chef de l’Etat ghanéen, Nano Akufo-Addo, a déclaré que « la Conférence exprime sa très vive préoccupation face aux développements politiques survenus en République de Guinée suite au coup d’Etat du 5 septembre 2021 et leurs conséquences sur la paix et la stabilité régionale ». Dans son communiqué publié mercredi soir, la Cédéao »condamne, avec la plus grande vigueur, ce coup de force ».
Cependant, le sommet n’a pas imposé de sanctions économiques à la Guinée et n’a pas non plus visé les auteurs du coup d’Etat de dimanche dernier.
NE PAS PÉNALISER LE PEUPLE GUINÉEN
Aïssata Tall Sall, ministre sénégalais des Affaires étrangères, parle d’une sanction minimale.
Selon elle, « la Cédéao ne peut pas accepter dans son espace des régimes qui ne seraient pas des régimes issus d’une expression démocratique. Je dois dire d’ailleurs que c’est la sanction minimale. On aurait pu aller au-delà. Mais en fait, le souci des chefs d’Etat c’est aussi de ne pas pénaliser le peuple guinéen en portant les sanctions sur ces institutions actuelles. Et puis, en espérant que la Guinée puisse sortir de ce cycle, en organisant une transition maitrisée et en revenant surtout à l’ordre constitutionnel démocratique »
L’ancien Premier ministre guinéen, Lansana Kouyaté, dit ne pas être surpris. Il souhaite aussi que son pays renoue avec la légalité constitutionnelle au plus vite.
« On sait que les sanctions aussi ne payent pas. C’était le cas du Mali. Moi, ça ne m’étonne pas. Les grands pays, pris individuellement, ont condamné. Mais ça ne veut pas dire qu’ils approuvent le régime précédent. Il y a un premier défi. Il faut organiser les élections et il faut se presser lentement, en essayant de poser les jalons pour que, finalement, on rentre dans la démocratie », soutient l’ancien secrétaire exécutif de la Cédéao.
FAILLITE DE LA CÉDÉAO
Même si l’institution sous-régionale va dépêcher une mission diplomatique afin de s’enquérir de l’évolution de la situation, Mamadou Aliou Barry, qui dirige le Centre d’analyse et d’études stratégiques de Guinée, affirme que la Cédéao a perdu toute crédibilité.
Il affirme que « les Guinéens ne croient plus en la Cédéao. Le Mali, c’est la même situation. Les Maliens, aujourd’hui, ne croient plus en la Cédéao. Je n’épargne pas non plus l’Union africaine. Donc il est temps de réfléchir à la mise en place d’une vraie commission, des gens recrutés qui ne dépendent pas des gouvernements des 15 Etats membres pour qu’on puisse aller vers une commission qui ait du poids et qui puisse appliquer, faire respecter le pacte qui a été signé par les 15 Etats membres (le protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Cédéao, signé à Cotonou le 24 juillet 1993). »
La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest est en effet critiquée pour n’avoir pas pu empêcher le président Alpha Condé et son homologue ivoirien, Alassane Ouattara, de modifier la Constitution de leur pays pour briguer un troisième mandat controversé. Elle avait aussi suspendu le Mali de l’organisation, au lendemain du coup d’Etat qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keita, le 18 août 2020.
Elle avait aussi pris des sanctions économiques comme l’arrêt des échanges commerciaux, hors produits de première nécessité, et la fermeture des frontières. Ces sanctions avaient été levées à la suite de l’engagement des militaires maliens sur la voie d’une transition, de 18 mois maximum, pour rendre le pouvoir à des dirigeants civils issus d’élections.
La délégation diplomatique de la Cédéao annoncée pour ce jeudi devrait arriver à Conakry vendredi [10.9.21] seulement. Cette délégation sera composée des chefs de la diplomatie du Burkina Faso, du Nigeria, du Ghana et du Togo ainsi que du président de la commission de la Cédéao
Eric Topona
Commentaires Facebook