Funérailles d’Arafat en Côte-d’Ivoire: Le prêtre a-t-il trahi l’Église?

Avant tout propos, je prie pour le repos de l’âme d’Ange Didier. Que Dieu, dans sa miséricorde infinie, lui accorde le repos éternel. Je prie également pour sa mère, son épouse, ses enfants et tous ceux qui sont touchés douloureusement par cette séparation.

La présence du prêtre à la veillée

A partir des milliers de commentaires sur les réseaux sociaux, des réactions contradictoires entre catholiques et même entre prêtres, j’aimerais donner ma modeste contribution qui n’engage que ma personne, ma foi et mon éducation.

Que dit l’Église catholique concernant les funérailles chrétiennes?

A cette question, les canonistes diront avec le Canon 1184:

 » 1. Doivent être privés des funérailles ecclésiastiques, à moins qu’ils n’aient donné quelque signe de pénitence avant leur mort:
1 les apostats, hérétiques et schismatiques notoires;

3 les autres pécheurs manifestes, auxquels les funérailles ecclésiastiques ne peuvent être accordées sans scandale public des fidèles.
§ 2. Si quelque doute surgit, l’Ordinaire du lieu, au jugement duquel il faudra s’en tenir, sera consulté.

Can. 1185 – Toute messe d’obsèques doit être aussi refusée à la personne exclue des funérailles ecclésiastiques ».

Selon le droit, seuls les chrétiens baptisés qui n’ont pas renié leur foi ainsi que ceux qui sont en route pour le baptême ont droit à des funérailles chrétiennes. Avec le droit canon, nous comprenons donc que les funérailles chrétiennes constituent un droit pour le fidèle du Christ. Si nous comprenons bien, le chrétien catholique qui est en communion avec l’Église, le chrétien catholique qui n’a pas renié publiquement sa foi en adhérant à d’autres pratiques contraires à la doctrine de l’Église doit avoir des funérailles chrétiennes. Voici donc l’enseignement de l’Église catholique romaine. Maintenant cet enseignement est appliqué par chaque diocèse au niveau pastoral en tenant compte des milieux.

Au niveau pastoral

La pastorale est le domaine théologique qui prend en compte la pratique de l’enseignement de l’Église. L’Église laisse la liberté à tous les évêques d’appliquer la doctrine de l’Église en tenant compte des lieux, des cultures, des régions, des mentalités sans remettre en cause ce que dit l’Église. Nous pouvons donc pratiquer le même enseignement en tenant compte des réalités.

C’est pourquoi dans certains diocèses, il est demandé que le défunt catholique soit à jour dans ses cotisations, d’autres parleront de son appartenance à une association de laïcs et dans d’autres diocèses on ne tiendra pas compte de ces critères mais on acceptera d’enterrer tous les baptisés sans tenir compte de leur engagement dans l’Église. Raison pour laquelle dans des Églises comme celles de Europe, on ne restera pas rigoureux sur les disciplines pastorales mais on utilisera les funérailles comme des lieux de présence de l’Église, des opportunités d’évangélisation, surtout que les gens n’écoutent plus la parole de Dieu.

Lors des funérailles, les prêtres sont donc présents pour montrer que l’Église est aux côtés de ceux qui pleurent et l’on profite pour montrer un autre visage de l’Église que celui diffusé par les médias. Évidemment le contexte n’est pas le même en Côte d’Ivoire où les églises sont pleines.

La présence d’un prêtre sur un territoire pastoral

Au nom de la communion et aussi pour éviter la pagaille, un prêtre catholique ne peut pas intervenir dans une paroisse sans l’avis du curé ou de l’évêque. Même l’évêque de Yopougon ne peut pas intervenir à Bassam sans l’avis de l’ordinaire du lieu, l’évêque. C’est dans l’ordre que souffle l’Esprit et non dans l’anarchie.

Que retenir?

1-Si Ange Didier est baptisé et n’a jamais renié sa foi catholique mais aussi si il remplit les conditions pastorales prévues par l’Archidiocèse d’Abidjan au sujet des défunts, il peut avoir des funérailles chrétiennes: c’est-à-dire une veillée catholique, une messe de requiem avec l’absoute ou une célébration liturgique avec absoute sans la messe.

2-Le prêtre qui a prié, n’a pas célébré de messe de requiem ni d’absoute. Il a pris simplement la parole. Il peut être un ami d’Arafat, un frère, un cousin, un ami de la famille. Cependant, si le confrère n’a pas eu d’autorisation de l’archidiocèse d’Abidjan, il doit être interpellé. Il commet une faute disciplinaire.

3-Si le confrère a eu l’autorisation, a été mandaté par l’Archidiocèse d’Abidjan, il ne commet aucune faute parce qu’il a prié pour un défunt, il a accompagné une famille en tristesse, un peuple en larmes, c’est aussi la mission de l’Église. Ici le confrère n’a pas célébré de messe de requiem ni d’absoute.

4-Pourquoi les chrétiens réagissent?

Il ne faut pas condamner les chrétiens catholiques ivoiriens qui se posent des questions.

Au niveau des funérailles chrétiennes nos règles pastorales ne lèsent-elles pas les pauvres?

Notre attitude de compréhension de la douleur ne se limite-t-elle pas à ceux qui ont un nom?

Si les chrétiens se plaignent ce n’est pas parce que l’on a prié pour Ange Didier. Peut-être ont-ils été témoins de plusieurs attitudes pastorales lors de funérailles où ils ont subi de la discrimination dans leur propre Église.

C’est pourquoi plutôt que de se lancer des flèches et des piques, nous devons réfléchir sur la pastorale des funérailles chrétiennes en supprimant tous les critères qui riment avec le gain, tout ce qui peut choquer le monde d’aujourd’hui, tout ce qui empêche l’Église d’être présente là où le peuple est rassemblé.

Oui, revoyons toutes les règles qui ne nous permettent pas de partager d’un point de vue pastoral les joies et peines de nos pauvres chrétiens alors que c’est ce qui est recommandé par la Constitution pastorale Gaudium et Spes.

A combien de catéchistes dans nos villages, combien d’âmes généreuses, combien de chrétiens n’avons-nous pas refusé des messes de requiem? Combien de chrétiens engagés n’avons-nous pas enterré « hors les murs » parce que sans papiers?

Père Marius Hervé Djadji

Professeur de théologie dogmatique
au Grand séminaire Notre Dame de Namur
Contact: nguessanmh.2006@hotmail.com.

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2 réflexions au sujet de “Funérailles d’Arafat en Côte-d’Ivoire: Le prêtre a-t-il trahi l’Église?”

  1. PRIEZ sur un CADAVRE HUMAIN est une sorte de COMEDIE.
    Quand un être humain meurt, son CADAVRE ne représente plus RIEN. Il devient comme une SIMPLE ORDURE.. Voilá pourquoi certains peuples(qui ont compris cela) brûlent leurs cadavres(Inde, Pakistan, Sri Lanka…) ou les enterrent simplement comme on plante une bouture de manioc dans le sol(cas des musulmans…).

    L’ÂME qui est l’élément moteur IMMORTEL et ETERNEL de notre corps, sort de notre corps juste après notre dernier soupir pour aller reprendre son cycle habituel et ensuite rentrer plutard dans un autre foetus humain en formation .
    Les églises, nous enseignent des CONNERIES . Les messages de Emmanuel alias Jesus Christ ont été déformés(et falsifiés) après sa disparition en Palestine, suite á sa mort temporaire sur la fourche(et non la croix).

    Il n’existe ni PARADIS et ni ENFER …après la MORT….. Mais il existe simplement une sorte de « banque-de-données » COSMIQUE oú tout ce que nous faisons est enregistré et stocké.. Apres la mort nos AMES passent meme un bref séjour en ce lieu avant de pénétrer á nouveau dans un autre foetus humain….
    Voilá pourquoi tous les membres d’une meme famille(frères et soeurs) ne se ressemblent JAMAIS de par leurs attitudes, capacités physiques et intellectuelles et autres dons…
    BREF ! je m’arrete lá

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