(Agence Ecofin) – 4725 milliards de FCfa, soit 26,3% du Produit intérieur brut (PIB) du pays. Selon les statistiques du ministère des Finances, tel est le montant de l’encours de la dette publique camerounaise au 31 décembre 2016, en hausse de 5% par rapport à l’année 2015.
Depuis le début de l’année 2017, les dettes contractées par le Cameroun, aussi bien au plan intérieur qu’auprès de ses partenaires financiers internationaux, a porté le niveau d’endettement du pays à 30% du PIB (5383 milliards de FCfa à fin mai 2017), en hausse de plus de 1000 milliards de francs Cfa en cinq mois, apprend-on de sources autorisées. Cependant, au regard de ces statistiques, le Cameroun peut encore, mathématiquement, s’endetter à hauteur de 40% de son PIB, avant d’atteindre le plafond de 70% du PIB autorisé dans la zone Cemac.
C’est fort de cette réalité que les autorités camerounaises, malgré les inquiétudes du Fonds monétaire international (FMI), soutiennent toujours que le niveau de l’endettement du pays est soutenable. La preuve de cette assurance est apportée par la note souveraine de B/B assortie de perspectives stables, qui est invariablement attribuée au Cameroun depuis 2 ans par l’agence de notation américaine Standard & Poor’s (S&P). Cette agence de notation, dans son rapport d’avril 2017, s’inquiète toutefois de « l’augmentation de l’endettement public » du Cameroun, avant d’indiquer qu’elle s’attend « à ce que la croissance économique du Cameroun reste solide, grâce à la mise en œuvre de vastes projets d’investissements publics ». Voilà l’expression lâchée : investissements publics.
En effet, depuis 2012, le gouvernement camerounais s’est lancé dans un vaste programme de construction d’infrastructures, dans le cadre de son programme « des grandes réalisations », destiné à réaliser des projets structurants sur le territoire national. C’est ainsi qu’ont été successivement lancés les chantiers de construction des barrages de Lom Pangar, Memvé’élé, Mékin ; le 2ème pont sur le fleuve Wouri et les pénétrantes Est et Ouest de la ville de Douala, projets réclamés depuis des années par les opérateurs économiques ; ou encore le port en eau profonde de Kribi, qui revendique aujourd’hui le plus grand tirant d’eau sur la côte ouest-africaine.
Autoroutes, CAN 2019, Planut…
Toutes ces infrastructures ont été financées par des prêts octroyés au gouvernement par les bailleurs de fonds internationaux tels que la Banque africaine de développement, la Banque mondiale, l’Agence française de développement, la Banque européenne d’investissement, la Banque de développement des Etats de l’Afrique centrale, ou encore Eximbank China, institution financière chinoise devenue principale pourvoyeuse de fonds pour la réalisation des projets d’infrastructures au Cameroun.
Toujours dans sa quête de densifier son tissu infrastructurel, le Cameroun a initié, simultanément, la construction de deux axes autoroutiers. Le premier, sur un linéaire de 20 km, vise à relier l’aéroport de Nsimalen à la capitale. Le second, long de 250 km, permettra de relier les deux principales villes du pays que sont Douala et Yaoundé. Les financements pour la construction des 60 premiers kilomètres de cette dernière autoroute ont été pourvus par Eximbank China.
La construction, encore en cours, de certains tronçons des routes transfrontalières Sangmélima (Cameroun)-Ouesso (Congo), ou encore Bamenda (Cameroun)-Enugu (Nigeria), projets destinés à augmenter le niveau des échanges commerciaux avec ces pays voisins, a également nécessité des financements extérieurs.
Depuis 2015, à l’effet d’accélérer l’implémentation plutôt lente de son Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (Dcse), le gouvernement camerounais a lancé le plan d’urgence triennal (Planut), doté d’une enveloppe globale initiale de près de 1000 milliards de FCfa.
Besoins d’endettement de 1145 milliards de FCfa en 2017
Articulé autour de la construction de routes, de logements sociaux, du développement de l’agriculture, de l’élevage et de l’amélioration de l’offre sanitaire dans le pays, le Planut n’est réalisé qu’à coups de financements octroyés par des bailleurs de fonds. Au même titre que les infrastructures liées à l’organisation des CAN 2016 et 2019 par le Cameroun.
En clair, la courbe ascendante prise par l’endettement public au Cameroun ces dernières années, est consécutive aux ambitions de développement des infrastructures dans le pays. Ces efforts, selon Issac Tamba, le directeur général de l’économie et de la programmation des investissements publics au ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du territoire (Minepat), vont se poursuivre jusqu’en 2019.
Ceci, en dépit des vents contraires, tels que la lutte contre Boko Haram qui nécessite la mobilisation quasi-quotidienne d’importantes ressources financières ; l’entrée en vigueur des APE, qui contribue à obérer les recettes fiscalo-douanières ; ou encore la chute des cours mondiaux des matières premières. Cette conjoncture porte un sérieux coup à la trésorerie publique et n’offre pas au gouvernement d’autres choix que le recours à l’endettement.
Pour preuve, selon le ministre des Finances, Alamine Ousmane Mey, les besoins d’endettement du Cameroun en 2017 sont estimés à 1145 milliards de francs Cfa, ce qui représente plus de 25% de l’enveloppe budgétaire globale du pays cette année.
Afin de donner une certaine flexibilité au Trésor public, qui ne doit pas être étreint par le service de la dette, cet endettement se fait de préférence auprès de bailleurs de fonds pratiquant non seulement des taux d’intérêts concessionnels, mais aussi des échéances de remboursement sur le très long terme (au-delà de 10 ans).
Brice R. Mbodiam
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