Par Connectionivoirienne.net
La Côte d’Ivoire serait-elle devenue une prison à ciel ouvert ? Sous le fallacieux prétexte de la lutte contre l’impunité, on emprisonne à la pelle et on libère selon les humeurs et le bon vouloir du chef.
Il faut pourtant encourager la lutte contre l’impunité. Ne pas lutter contre l’impunité installerait notre pays dans le désordre et la chienlit. En toute chose, force doit rester à la loi.
Cependant l’emprisonnement systématique ne devrait pas constituer la réponse à toutes les transgressions de notre société toujours en quête d’un repère. L’emprisonnement, c’est l’option d’Alassane Ouattara depuis son accession au pouvoir. Loin de nous l’idée selon laquelle il faut bannir la prison. Quoique privative de liberté, la prison joue un rôle d’éducation et de resocialisation même si ces aspects sont souvent occultés au profit de ses aspects purement punitif et répressif. Mais se servir de l’épouvantail de la justice et de la prison comme d’un mode de gouvernance, nous semble aberrant dans une société ivoirienne en quête de réconciliation.
Hormis ceux qu’on qualifie de prisonniers de droit commun, les prisons ivoiriennes sous Ouattara regorgent de prisonniers d’opinion pour ne pas dire des prisonniers politiques, vocable rejeté par les tenants du pouvoir. Selon les sources, les chiffres de cette catégorie de prisonniers oscillent entre 240 et 450. Des chiffres qui seront revus à la hausse si l’on y intègre les prévenus des récents événements dans la crise des factures. C’est-à-dire ceux qui ont été arrêtés non pas en flagrant délit de destruction de biens mais dans les domiciles privés à Bouaké et ailleurs dans le pays.
« Un geôlier nous est né », affichait souvent en vignette un confrère de la presse bleue. Et rien ne semble arrêter « Ado solution » dans sa volonté de casser toute velléité de contestation de ses décisions et de saper le moral de ses opposants. Quel travail d’éducation aux valeurs de la République fait-il en amont pour amener ses compatriotes à se détourner des solutions désespérées ? « Je suis le prince, obéissez-moi simplement, je n’ai rien à vous expliquer », semble-t-il leur opposer.
Le chef de l’Etat ivoirien qui se réclame de la philosophie politique d’Houphouët exècre le dialogue, il considère la discussion et le débat comme du « bavardage inutile ». Ce n’est pas sa tasse de thé, ce n’est pas la matière dans laquelle il excelle. L’élève formaté dans le moule du Fmi et des oligarchies internationales est adepte des solutions rigides. « Je décide, vous appliquez et c’est tout ! »
Les étudiants des universités réclament de meilleures conditions d’étude depuis la réouverture de celles-ci à travers le slogan « départ nouveau ». Las d’attendre les solutions du gouvernement, ils déclenchent des mouvements de grève qui finissent dans la répression et dans l’emprisonnement. On déplace les problèmes sans les régler.
Des déguerpis de quartiers précaires s’élèvent contre le mode de déguerpissement qui les réduit au dénuement total, ils n’auront pour seule réponse que la prison. Des femmes qui n’en peuvent plus du manque d’eau dans la capitale tentent-elles de hausser le ton pour un mieux-être, elles seront rabrouées si elles ne sont jetées en prison pour trouble à l’ordre public.
Sous Ouattara, il n’y a pas d’alternative à la prison. L’héritier du père du dialogue, apôtre de la paix Félix Houphouët-Boigny fait fi des valeurs de tolérance et de la gouvernance de proximité. Enfermé dans sa bulle, il emprisonne, à tour de bras. Sans dialogue sincère, sans discussion comment peut-on appréhender les problèmes du peuple et les régler ? Ouattara aime le dialogue à son rythme et à ses conditions comme un bon chef d’entreprise. Il sait qu’il dispose de l’appareil répressif de l’Etat et peut en faire usage à tout moment. Il s’y adonne à cœur joie avec des emprisonnements choisis. Ce qui est scandaleux ici, c’est le caractère sélectif des candidats à la prison et la discrimination dans le traitement des dossiers par les juges. Tout est fait pour favoriser les amis du pouvoir ou les groupes influents et tout est mis en œuvre pour maintenir sans motifs valables derrière les barreaux, les ennemis et assimilés même pour les mêmes délits. Cela s’appelle de l’instrumentalisation.
SD à Abidjan
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