Lors de l’audience dans l’affaire Gbagbo – Blé Goudé du 12 juillet à la Cour pénale internationale (CPI), un témoin protégé, dont on ignore le numéro d’immatriculation, est intervenu à la barre. Emmanuel Altit, l’avocat de Laurent Gbagbo, s’en est pris à l’ancienne rébellion en demandant au témoin de parler d’anciens rebelles, dont Chérif Ousmane.
Par Clara Sanchiz Ivoirejustice.net
L’audience s’est ouverte avec des questions d’Emmanuel Altit, conseil principal de Laurent Gbagbo, sur Messieurs Montoya et Lafont. Selon le témoin, le premier aurait livré du matériel militaire aux autorités ivoiriennes en 2002-2003. Le second, M. Lafont, serait l’un des premiers légionnaires français venus en Côte d’Ivoire. Altit voulait savoir s’ils étaient liés aux services secrets français, mais le témoin a répondu qu’il ne savait pas.
La défense a ensuite posé des questions sur le bombardement du Camp d’Agban, à Abidjan, le 10 avril 2011. Le témoin aurait dit dans une audience précédente que le camp contenait environ 3 000-3 500 personnes, dont 1 500-2 000 civils réfugiés. Le témoin a raconté que l’ONUCI et les forces françaises ont bombardé le camp avec deux hélicoptères « Gazelle ». Il a expliqué en détail les circonstances du décès d’Andréa, une fille de 14 ans décédée à cause du bombardement.
Duékoué, Forces nouvelles et ONUCI
Emmanuel Altit a demandé si l’ONUCI et les forces françaises avaient lancé d’autres attaques avant ce jour-là. Le témoin a parlé des attaques de Duékoué où, selon lui, les Forces nouvelles avaient des difficultés à avancer. L’ONUCI et les forces françaises auraient donc mené des attaques, ce qui aurait permis aux Forces nouvelles d’avancer. Les rebelles auraient attaqué des civils réfugiés dans une église et, par la suite, ils auraient massacré 800 personnes.
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Interrogé sur d’autres occasions où l’ONUCI et l’armée française auraient exécuté des attaques, le témoin a cité la résidence présidentielle, la base maritime de Yopougon ainsi que les casernes de Koumassi et Akouédo. Cette dernière aurait été bombardée avec les mêmes hélicoptères que celle d’Agban. Pour illustrer l’interrogatoire, Emmanuel Altit a montré au témoin une vidéo demandant s’il reconnaissait le lieu. Le témoin a dit qu’il n’avait pas de repères et Altit a donc expliqué qu’il s’agissait d’une vidéo prise par un civil montrant la destruction de la poudrière d’Akouédo.
Après quelques minutes de huis clos, Altit est revenu sur l’attaque du camp d’Agban. L’avocat a rappelé qu’il aurait été question d’obus lancés sur le camp par des éléments de Chérif Ousmane (commandant au sein des Forces nouvelles à l’époque) depuis un endroit proche du Lycée technique d’Abidjan. Suite aux questions d’Altit, le témoin a précisé que les attaques sur le camp d’Agban ont été réalisées, entre autres, avec des obus de 60 mm, des RPG (lances roquettes), des Kalachnikhovs et des AA52. Le témoin a dit qu’autour du 12-13 avril, il a entendu des cris de femmes qui auraient été violées par des éléments rebelles au Lycée technique. Des femmes qui seraient allées au Lycée pour se réfugier.
Les attaques du Commando invisible
L’avocat de Laurent Gbagbo a ensuite interrogé le témoin à propos du Commando invisible. Le témoin a expliqué sa stratégie, qui consistait a ériger des barricades et brûler des pneus pour attirer l’attention des éléments des FDS (Forces de sécurité). Une fois les FDS sur place, le Commando invisible les attaquait.
Le témoin a expliqué en détail comment, un jour, le Commando invisible a organisé une embuscade au rond-point de la gare d’Abobo. Alors que certains éléments ont agi comme s’ils étaient des manifestants en érigeant des barricades, d’autres ont emprunté des wôrô-wôrô et se sont rapprochés du rond-point. Quand les FDS sont arrivés, le Commando invisible a lancé son attaque.
Le bilan total des policiers morts suite aux attaques du Commando invisible serait de 32 selon le témoin.
En conclusion, le témoin a donné son analyse des conséquences des actions du Commando invisible. Pour lui, les FDS ont, à partir d’un moment, eu peur d’intervenir. Il a expliqué qu’une zone opérationnelle sous commandement des Forces nouvelles a été créée suite à l’abandon des postes des policiers, et que tout Abobo, sauf le Camp Commando, était entre les mains des rebelles. À partir de janvier 2011, le ravitaillement du Camp Commando est donc devenu compliqué, puisque tous les axes du rond-point de la gare d’Abobo (zone transitaire) étaient sous contrôle des rebelles.
Le complot du cheval blanc
Ensuite, Emmanuel Altit a posé au témoin des questions sur des attaques survenues avant la crise post-électorale. Il a commencé en demandant des détails sur le « Complot du cheval blanc », l’attaque qui a eu lieu contre le général Robert Guéï, le 18 septembre 2000. L’avocat était intéressé par les auteurs de l’attaque. Le témoin a cité des noms comme Chérif Ousmane, Tuo Fozié et Diomandé Souleymane, dit La Grenade. Altit a demandé si ceux qui étaient à la manoeuvre contre Guéï étaient les mêmes que ceux, qui, en 2010, se sont positionnés contre Laurent Gbagbo. « Oui, on peut le dire », a répondu le témoin.
Le conseil de Gbagbo a demandé au témoin de raconter le coup d’État de Robert Guéï en octobre 2000. Il est ensuite passé au 8 janvier 2011, où la caserne d’Agban a été attaquée. Le témoin a expliqué que les organisateurs étaient les mêmes éléments que ceux du complot du cheval blanc, et il a ajouté le nom de Youssouf Ouattara, dit Kobo.
L’avocat a ensuite posé des questions à propos de l’attaque du 18-19 septembre 2002, aussi survenue à la caserne d’Agban. Selon le témoin, des résidences de proches de Laurent Gbagbo ont aussi été attaquées. Emmanuel Altit a voulu s’assurer encore une fois que les assaillants étaient les mêmes que ceux du complot du cheval blanc. Le témoin a répondu, d’un ton assez énervé, que quand il dit les mêmes, ça veut dire les mêmes.
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