L’arrestation de Salah Abdeslam vendredi après-midi à Molenbeek a généré un sentiment de soulagement qui parcourt la presse belge et internationale samedi matin.
« Un heureux hasard et un curieux manque de flair »
Passé les expressions de soulagement, beaucoup de titres de la presse internationale se montrent tout de même plus critiques envers le travail des services judiciaires et policiers belges et nuancent le succès des opérations menées hier. « Chaque jour qui passait était une gifle pour les services de sécurité », écrit Die Welt, qui semble toujours convaincu que les attentats du 13 novembre auraient pu être évités si les informations en la possession de la police et des services de renseignement avaient été mieux épluchées, « s’ils avaient travaillé plus soigneusement ».
La polémique était apparue au lendemain du déchaînement de violence de Paris. « Elle n’est pas éteinte pour autant, écrit le quotidien allemand. Car le fait que Salah Abdeslam ait pu se cacher au cœur de Bruxelles aussi longtemps renouvelle la question. (…) Sans un grand réseau de soutien, Salah n’aurait pas pu réussir cela. La question est maintenant de savoir pourquoi ce réseau n’a pas pu être démasqué plus tôt. »
« Si Salah avait refait surface en Syrie, cela aurait été moins gênant pour les services d’enquête », écrit Bart Sturtewagen dans De Standaard en creusant la même idée. « Cela aurait supposé qu’il faisait partie d’un réseau européen étendu et fort. Or, il semble qu’il est resté rivé à sa base arrière tout simplement. Cela rend le succès de son arrestation moins glorieux. »
Le Monde évoque pour sa part les « ratages » de l’enquête et le « cuisant échec » de l’opération de mardi à Forest. « C’est à la faveur d’un heureux hasard – et d’un curieux manque de flair – que les enquêteurs ont fortuitement découvert, trois jours avant l’assaut de vendredi, la planque de Salah Abdeslam et de ses complices », souligne le quotidien français. Ils n’en profiteront pas. Et c’est un coup de fil reçu d’un des amis du principal suspect qui les mettra sur la piste de l’habitation de Molenbeek. Ce qui permet au Monde de conclure : « La planque de Salah Abdeslam n’aura été découverte (vendredi) que grâce au coup de téléphone d’un de ses amis. Tout comme celle d’Abdelhamid Abaaoud, tué le 18 novembre à Saint-Denis lors d’un assaut du RAID, avait été révélée aux enquêteurs français par une jeune femme Marocaine proche de sa cousine, Hasna Aït Boulahcen. Les deux principaux fugitifs des attentats du 13 novembre n’auront été localisés que grâce à des témoignages spontanés. Un symptôme des limites des services de renseignement français et belges. »
« Molenbeek, une zone sans loi »
Avec l’arrestation de Salah Abdeslam et de plusieurs complices hier à Molenbeek, la commune bruxelloise n’échappe pas à un nouveau déchaînement de descriptions peu flatteuses. « Les événements de vendredi confirment l’impression que Molenbeek est une zone sans loi où l’ordre et le droit signifient peu de choses, écrit Bart Sturtewagen dans De Standaard. Molenbeek restera proverbialement un lieu où radicalisme et terrorisme peuvent pousser librement. Comment Abdeslam a-t-il pu rester aussi longtemps en dehors des radars de la police. Cela signifie sans doute qu’il a pu compter sur le soutien inconditionnel et prolongé de complices. »
« Le fait que le suspect ait pu rester caché aussi longtemps à Bruxelles montre la force du réseau là-bas », écrit également The Guardian. Le quotidien britannique ouvre d’autres perspectives également, celles qui se dessinent dans le prolongement de l’enquête en cours « Le procès sera un procès unique, potentiellement une mine d’informations sur les attaques de Paris, l’Etat islamique et les réseaux terroristes de Molenbeek. (…) Il y a eu beaucoup de procès de terroristes. (…) Mais l’importance des attaques suicides et la décision d’autres extrémistes de se donner mort à la police signifient que les détentions et les procès sont limités à des membres périphériques de ces organisations. »
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