Par Seidik Abba Source: Mondeafrique
La rencontre n’était pas initialement prévue à l’agenda du président français François Hollande, mais elle aura finalement lieu jeudi 4 février en fin de journée au palais de l’Elysée. La présidence française s’étant résolue à lui trouver un créneau.
Si le président ivoirien Alassane Ouattara a souhaité, toutes affaires cessantes, rencontrer son homologue français, c’est parce qu’entre la France et la Côte d’Ivoire, les sujets de « franches discussions » ne manquent pas dans la conjoncture actuelle. A commencer par celui qui fâche sérieusement, la mise en examen en décembre dernier du président de l’Assemblée nationale ivoirienne Guillaume Soro (deuxième personnalité de l’Etat) par la juge française Sabine Khéris. A Abidjan, la décision de la magistrate, qui instruit la plainte de Michel Gbagbo pour « séquestrations et traitements inhumains», de délivrer un mandat d’amener contre M. Soro avant de le mettre en examen a suscité une vive colère. Fait rarissime dans les relations entre Paris et l’ex vitrine de la Françafrique, l’ambassadeur de France en Côte d’Ivoire, Georges Serres, a été convoqué au ministère ivoirien des Affaires pour s’expliquer. Ensuite, le ministre des Affaires étrangères Charles Diby Koffi et son collègue de la justice Gnenema Mamadou Coulibaly ont été remerciés lors du dernier remaniement du gouvernement pour n’avoir pas su gérer « le sorogate ».
Nul doute que Ouattara profitera de l’entretien qu’il aura jeudi avec Hollande pour revenir sur cette question tout en sachant que son hôte pourra toujours s’abriter derrière l’indépendance de la justice française.
Le cas Gbagbo
Les discussions devraient être plus consensuelles entre Hollande et Ouattara sur le procès en cours à la Haye de l’ex-président ivoirien Laurent Gbagbo. Depuis l’ouverture du procès le 28 janvier, la défense de Gbagbo et de son ancien ministre de la jeunesse Charles Blé Goudé n’a de cesse d’incriminer la France pour son rôle « controversé » pendant la crise électorale ivoirienne de 2010 et 2011. Le président Ouattara est, pour sa part, accusé dans les prétoires de la Cour pénale internationale (CPI) d’avoir instrumentalisé les violences pour s’emparer du pouvoir, avec le soutien de son « ami » Nicolas Sarkozy.
Tout porte donc à croire que Paris et Abidjan tenteront jeudi de définir les modalités d’une stratégie commune de contre-attaque. Ce sera d’autant plus facile d’y parvenir que l’Etat ivoirien a choisi comme avocats pour sa défense devant la CPI Me Jean-Paul Benoit et Jean-Pierre Mignard, deux proches de François Hollande.
Abidjan, prochaine cible des djihadistes ?
Bien plus que le procès Gbagbo, c’est la menace terroriste, devenue pressante en Afrique de l’Ouest par les attentats contre Bamako (novembre 2015) et Ouagadougou (janvier 2016) qui inquiète Alassane Ouattara.
Pour le journaliste Lemine Ould Salem, auteur de Le Ben Laden du Sahara, sur les traces du djihadiste Mokhtar Belmokhtar, la capitale ivoirienne est une cible privilégiée pour les mouvements djihadistes à cause de la forte concentration de grands groupes français : Carrefour, Orange, CFAO, BNP, Société générale, Bolloré…
Son analyse est partagée par les services de renseignement français et leurs collègues ivoiriens qui ont d’ailleurs placé plusieurs mosquées d’Abidjan sous étroite surveillance. Autre signe de la persistance de la menace, la Côte d’Ivoire avait arrêté sur son sol en septembre 2015 puis extradé vers le Mali 7 djihadistes présumés.
Le président ivoirien, qui vient juste d’entamer son second mandat, devrait donc insister auprès de son hôte en faveur d’un soutien plus accru de la France dans la lutte contre la menace terroriste. Paris avait déjà augmenté en 2015 le nombre de ses soldats présents en Côte d’Ivoire après avoir décidé d’installer à Abidjan la base logistique de l’Opération Barkhane, dédiée à la lutte contre le terrorisme au Sahel.
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