Côte d’Ivoire – Démonstration de force c’est çà qui est là ? Alors, tant mieux !

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L’opposition au Président Alassane Ouattara a donc montré ses muscles, samedi dernier, lors d’un meeting organisé à la place Ficgayo de Yopougon, commune réputée être le fief de Laurent Gbagbo, l’ex-Chef de l’Etat dont l’électorat est très courtisé par cette opposition.

Les images de ce meeting qui ont circulé sur les réseaux sociaux nous montrent une mobilisation plutôt maigrichonne, quand Radio France internationale (Rfi), que l’on peut difficilement accuser de partialité en faveur du pouvoir ivoirien, nous parle de 3000 à 5000 personnes. Sur ces mêmes réseaux sociaux, les opposants à M. Ouattara se montrent plutôt satisfaits de leur démonstration de force.

Alors, tant mieux ! L’essentiel est que l’opposition ait pu s’exprimer librement, sans que le pouvoir lui ait opposé aucune entrave et qu’elle ait atteint ses objectifs. Mais si cette opposition, réunie en une coalition, ne réussit à mobiliser, tout au plus, que 5000 personnes dans le fief de Laurent Gbagbo, elle devrait s’interroger sur sa représentativité et sur sa stratégie de conquête du pouvoir. Mamadou Koulibaly qui, malgré tout, a les pieds sur terre, a tout de même reconnu que ce n’est pas avec une telle mobilisation que l’opposition fera peur au Président Ouattara. C’est peut-être les têtes d’affiche de cette coalition qui ne captivent pas beaucoup les foules…

Essy Amara, qui avait, lui aussi, annoncé sa candidature à la présidentielle, n’était pas présent à ce meeting du samedi. D’ailleurs, on ne l’entend plus guère. Il a dû comprendre que cette histoire risquait de finir en eau de boudin. Je le soupçonne d’être en train de rétropédaler, en ce moment, et je ne serai pas surpris de le revoir parmi les soutiens au Président Ouattara. Charles Konan Banny, qui croyait jusque-là que les fameux 44% de voix de Laurent Gbagbo lui étaient automatiquement acquis, simplement parce qu’il s’appelle Banny et avait rendu visite à Gbagbo dans sa prison, doit être en train de réaliser que les choses ne sont pas aussi simples. Les partisans de Gbagbo ne sont pas aussi dupes que cela. Ils savent très bien de quel parti vient Banny et pourquoi il en est parti. Ce n’est certainement pas pour les beaux yeux des militants du Front populaire ivoirien (Fpi), tendance « Gbagbo ou rien ».

S’il tient vraiment à avoir leurs voix, il devrait commencer par démissionner de son parti et prendre la carte du Fpi. Banny a dit aussi, lors du meeting du samedi, qu’il faudrait tout faire pour libérer Gbagbo. On pourrait se demander pourquoi il n’a pas eu de phrase aussi forte lors du transfèrement de Laurent Gbagbo à La Haye, surtout qu’il était alors le président de la Commission dialogue, vérité et réconciliation (Cdvr), et aussi ce qu’il compte faire concrètement pour le libérer. Qu’est-ce qui peut faire libérer Gbagbo avant qu’il n’ait été jugé et éventuellement acquitté ? Rien. Banny le sait, les militants du Fpi aussi.

S’ils ne se sont pas déplacés en masse pour aller l’écouter, samedi dernier, c’est sans doute parce qu’ils ne veulent pas qu’on les prenne pour des idiots. Banny devrait aussi savoir que parmi ceux qui avaient voté pour Gbagbo en 2010, beaucoup disent qu’il n’y a pas de mal à reconnaître que le lièvre court vite.

Cela dit, l’un des points sur lesquels l’on accuse le Président Ouattara d’avoir échoué est celui de la réconciliation. Chaque fois que je rencontre un confrère étranger, il me parle toujours des succès du Président Ouattara sur le plan économique et de la construction du pays, mais aussi de son échec sur le plan de la réconciliation. Et c’est ce point que nos opposants brandissent, de leur côté, pour fustiger le pouvoir. J’avoue que ce débat me laisse toujours perplexe, parce que je n’ai pas encore compris le critère ou l’élément à partir duquel l’on pourra dire que la réconciliation est une réussite. Banny et Essy disent qu’ils sont candidats pour réconcilier les Ivoiriens.

Je leur dis bravo et leur adresse tous mes encouragements. Mais quand saurons-nous que nous sommes réconciliés ? Quel élément me permettra-t-il de dire que mon pays est réconcilié ? Les partisans de Gbagbo dont Banny traque les voix clament partout qu’il n’y aura pas de réconciliation dans ce pays tant que leur mentor sera en prison. Est-ce de cela qu’il s’agit ? Faut-il donc libérer Gbagbo et tous ceux qui ont provoqué la crise post-électorale de 2010 pour qu’il y ait réconciliation ? La réconciliation viendra-t-elle automatiquement aussitôt qu’ils auront été libérés ? Est-ce vraiment de cela qu’il s’agit, messieurs Banny et Essy ? Dites-le nous pour que nous soyons fixés.

Venance Konan

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