Opération « un citoyen, un ordinateur, une connexion » : la preuve par trois que le Président Ouattara n’a pas dit la vérité aux Ivoiriens
PRAO Yao Séraphin
« Les promesses faites à la hâte sont ordinairement suivies d’un prompt repentir. »
(William de Britaine)
Le président Ouattara a lancé son projet « un citoyen, un ordinateur et une connexion ». Selon lui, l’objectif est de vulgariser de façon massive et rapide les équipements TIC, et permettre ainsi l’usage des Technologies de l’Information et de la Communication par le plus grand nombre de nos concitoyens. Lors du lancement de cette opération, le Président Ouattara s’est contenté de remettre une dizaine d’ordinateurs et de kit de connexion. Mais en regardant de près les contours de ce projet, il ressort que cette promesse du Président est vide. Trois raisons suffisent pour le montrer.
Première raison : le taux d’alphabétisation peu élevé. En Côte d’Ivoire, le taux d’alphabétisation est estimé à 51% dont les 2/3 sont des femmes selon une étude faite par l’institut des statistiques de l’Unesco en 2002. En effet le nombre d’analphabètes en Côte d’Ivoire était estimé à près de 5,4 millions de personnes dont l’âge est compris entre 15 et 45 ans. Depuis 2002, le taux d’alphabétisation a très peu évolué car selon les statistiques du PNUD, en 2011, il se situe à 55,5. Si donc tous les Ivoiriens ne savent pas lire et écrire, alors, il sera difficile de promettre un ordinateur et une connexion à tous.
Deuxième raison : le faible de pénétration d’internet. La Côte d’Ivoire peut se réjouir de la bonne santé du secteur de la téléphonie. En effet, le nombre d’abonnés à la téléphonie mobile est passé de 16 millions en 2010 à 21 millions aujourd’hui, soit plus de 90% de notre population. Le secteur des TIC a réalisé en 2014 un chiffre d’affaires consolidé de près de 1.000 milliards de FCFA, ce qui représente 7 à 8% du Produit Intérieur Brut (PIB) du pays et il emploie environ 200.000 personnes. Mais le taux d’utilisation de l’internet reste faible dans notre pays. Aujourd’hui, c’est moins de 200.000 personnes qui sont concernés. Il est donc illusoire de dire que tous les Ivoiriens auront une connexion internet. Avant de promettre une connexion à tous les Ivoiriens, il faut d’abord investir massivement dans les infrastructures pour améliorer la connectivité à internet. L’Etat est d’ailleurs le premier bénéficiaire car selon diverses études réalisées par l’Union Internationale des Télécommunications et la Banque Mondiale, pour un pays comme la Côte d’Ivoire, une progression de 10% du nombre de personnes ayant accès à l’internet haut débit pourrait générer un accroissement du Produit Intérieur Brut (PIB) de 1 à 1,4 points par an.
Troisième raison : le taux de pauvreté. Dans notre pays, malgré les taux de croissance annoncés, la pauvreté reste présente. Selon Ousmane Diagana, le chef des opérations de la banque mondiale en Côte d’Ivoire, le pays est confronté à des taux de pauvreté inquiétants, surtout par rapport au potentiel énorme dont le pays dispose. Près d’un habitant sur deux est considéré comme « pauvre » en Côte d’Ivoire. Pour celui qui n’arrive pas à se nourrir convenablement, l’ordinateur reste pour lui, un luxe. Le secteur bancaire ne peut pas non plus accompagner ce projet au regard du faible taux de bancarisation. Ce taux est de 14% dans notre pays. Pour rappel, le taux de bancarisation dans l’espace de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) se situe entre 3 et 7%, alors qu’il avoisine 99% dans les pays occidentaux et se situe à 50 ou 60% dans les pays du Maghreb.
En définitive, le projet « un citoyen, un ordinateur, une connexion » est une promesse pompeuse. C’est donc simplement du vent que le Président Ouattara cherche à vendre aux Ivoiriens.
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