Océane Yacé, Politologue, Monte-Carlo, Monaco
Si pour l’instant les choses semblent traîner quelque peu dans la préparation des élections 2015, tout semble indiquer que le processus pourrait bientôt s’accélérer. Arrivé au pouvoir par les armes et dans le sang, Alassane Ouattara sait que cette année pourrait être la dernière qu’il passe au palais d’Abidjan. Dans quelques mois en effet, il devra soit renoncer à se présenter à un second mandat, se retirer et choisir un candidat parmi ses hommes pour défendre les couleurs du RDR, soit décider d’affronter le courroux du peuple en prenant le risque de toucher à la Constitution et d’être chassé du pouvoir comme le fut son complice Blaise Compaoré.
Ouattara aurait bien voulu que Francis Wodié prenne les devants pour le sortir de cet imbroglio. Il aura donc pour cela vainement tenté de faire plier le président de la Cour Constitutionnelle, de l’emmener à se renier et à renier le droit pour justifier un passage en force face à l’article 35 de la Loi fondamentale de la Côte D’Ivoire. Il est vrai que régulièrement le dictateur sanguinaire d’Abidjan a froissé tout ce qui le contrarie.
Cependant, depuis la sévère mise en garde de François Hollande au Sommet de la Francophonie à Dakar sur le tripatouillage des Constitutions pour se maintenir au pouvoir et vu les énormes risques d’explosion que comporte actuellement la situation socio-politique ivoirienne, Alassane Ouattara semble avoir pris conscience de la réalité de ce danger. Il fait des efforts surhumains chaque jour pour afficher une certaine sérénité, bien que se sachant désormais assis sur des braises ardentes avec son problème de papier et de nationalité qui reste toujours posé. Nous l’avions dit à plusieurs reprises, l’inéligibilité est désormais un gros boulot au pied d’Alassane Ouattara.
Votée à 83% le 23 juillet 2000, une nouvelle Constitution a remplacé celle du 03 novembre 1960 et est entrée en vigueur le 1er août de la même année, marquant ainsi l’avènement de la Deuxième République. On se rappelle que lors des élections présidentielles d’octobre 2000 et sur la base de cette Constitution, la candidature d’Alassane Ouattara avait été invalidée par la Cour suprême pour cause de “nationalité douteuse, faux et usage de faux sur la filiation”.
L’on se rappelle également que c’est sur insistance du Médiateur, le président sud-africain Thabo MBéki que le président Laurent Gbagbo, vainqueur du scrutin présidentiel de 2000, a signé l’Accord de Prétoria qui autorisait Alassane Ouattara à se présenter à titre exceptionnel à l’élection présidentielle initialement prévue en 2005 puis reportée en 2010 pour cause d’instabilité.
Dans le discours qu’il a prononcé le 28 avril 2005, pour expliquer sa décision d’activer l’article 48 de la Constitution afin d’autoriser de manière exceptionnelle la candidature d’Alassane Ouattara à l’élection présidentielle, le président Laurent Gbagbo avait dit ceci: « Uniquement pour l’élection présidentielle d’octobre 2005 conformément à la lettre du Médiateur sud-africain, les candidats présentés par les partis politiques signataires de l’Accord de Marcoussis sont éligibles. En conséquence, Monsieur Alassane Ouattara peut, s’il le désire, présenter sa candidature à l’élection présidentielle de 2005 ».
Comme on le constate, cette importante mesure exceptionnelle ne concernait donc exclusivement que le scrutin présidentiel de 2005, finalement organisé en 2010.Elle avait été prise par le président Laurent Gbagbo pour ramener la paix et la stabilité en Côte D’Ivoire. C’est le régime RDR qui l’a unilatéralement interprétée comme une reconnaissance définitive de la nationalité ivoirienne à Alassane Ouattara. Dans la précipitation qui le caractérise, celui-ci s’est alors proclamé déjà candidat pour le prochain scrutin alors qu’il est forclos au regard de la Constitution qui est toujours en vigueur.
Comme on le voit donc, malgré ses réalisations pharaoniques de pacotille qui prennent eau de toutes parts, ses nombreuses et vaines tentatives pour séduire le peuple ivoirien qu’il n’a jamais aimé, Alassane Ouattara continue de traîner au pied le gros boulet de l’article 35, un obstacle constitutionnel qui, dans l’état actuel des choses, ne lui permet toujours pas de se présenter à un scrutin présidentiel en Côte D’Ivoire. Le RDR tente pour l’instant de fuir ce débat pertinent alors que ce parti a appelé en 2000 à voter cette Constitution. Plus que jamais les États Généraux de la République (EGR), s’imposent donc aujourd’hui pour éviter le pire à notre pays.La France, les Usa et la Communauté internationale semblent désormais très favorables à la tenue de ce Forum que réclame le FPI. Alassane Ouattara et le RDR peuvent donc traîner les pieds et retarder les choses comme ils l’ont fait tout au long de l’année 2014, mais il reste absolument sûr et certain qu’en cette année électorale 2015, cette vaste forfaiture va connaître sa fin.
Océane Yacé, Politologue, Monte-Carlo, Monaco.
Les commentaires sont fermés.