Le procès de l’ex-Première dame ivoirienne Simone Gbagbo, accusée d' »atteinte à la sûreté de l’Etat », s’est ouvert vendredi à Abidjan, premier grand défi judiciaire de la Côte d’Ivoire post-crise qui refuse de la transférer à La Haye où la Cour pénale internationale la réclame.
Sous forte escorte policière, « la dame de fer » ivoirienne, vêtue d’un ensemble de couleur jaune et fleuri, cheveux tressés, qui n’avait pas fait d’apparition publique depuis trois ans, a fait son entrée dans la salle du tribunal sous les applaudissements du public, a constaté un journaliste de l’AFP.
Elle s’est installée au premier rang dans le box des accusés aux côtés de Pascal Affi N’Guessan, président du parti de son mari Laurent Gbagbo – dont le procès devant la justice internationale pour « crimes contre l’humanité » doit s’ouvrir en juillet à La Haye – et son dernier Premier ministre.
A l’instar de 82 dignitaires de l’ancien régime, Mme Gbagbo, 65 ans, est inculpée par la justice d’atteinte à la sûreté de l’Etat », une accusation liée à la crise postélectorale meurtrière de 2010-2011, qui avait fait fait plus de 3.000 morts.
Après une courte audience, le président du tribunal a annoncé la poursuite du procès lundi.
Tous les accusés « sont poursuivis d’atteinte à la défense nationale, constitution de bandes armées, participation à un mouvement insurrectionnel, troubles à l’ordre public, coalition de fonctionnaires de rébellion, tribalisme et-xénophobie », a énuméré l’avocat général M. Yabo Odi.
Ce procès est un défi pour « notre justice au regard même de la qualité des personnes mis en cause », a déclaré à l’AFP Pierre Adjoumani, président de la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme.
De son côté, un avocat de la défense a dénoncé un « procès précipité » pour « obtenir un premier décaissement de cinq millions d’euros promis par l’UE (Union européenne) dans un programme de réhabilitation de la justice ivoirienne ».
Un important déploiement de la brigade anti-émeute était positionné sur les points stratégiques autour du palais de justice d’Abidjan.
– Pilier du régime Gbagbo –
Simone Gbagbo était considérée comme un pilier inébranlable du régime de son mari Laurent sur lequel elle exerçait une forte influence.
Tout comme lui, elle est accusée par la Cour pénale internationale (CPI) de « crimes contre l’humanité ». Elle était placée en résidence surveillée depuis fin avril 2011 dans le nord de la Côte d’Ivoire, avant d’être conduite le 1er décembre à Abidjan, où elle est désormais détenue dans une école militaire.
Contrairement à l’ancien président ivoirien, incarcéré depuis trois ans à La Haye, Abidjan refuse le transfèrement de Mme Gbagbo à la Cour internationale.
Le cas de Simone Gbagbo fait l’objet d’intenses négociations entre les autorités ivoiriennes et la CPI. Abidjan refuse son transfèrement, arguant qu’il affecterait le processus de réconciliation nationale et que sa justice est désormais en mesure d’organiser un procès équitable.
Simone Gbagbo était autant respectée pour son militantisme que crainte en tant que « présidente » à poigne, accusée d’être liée aux « escadrons de la mort » contre les partisans de l’opposant Alassane Ouattara, désormais au pouvoir, qu’elle a toujours honni.
Le couple a été arrêté le 11 avril 2011, au terme de cinq mois de violences nées du refus de M. Gbagbo de reconnaître sa défaite à la présidentielle de décembre 2010 face à M. Ouattara, qui firent plus de 3.000 morts.
« Tout le pays attend qu’on puisse tourner la page et solder les comptes de la grave crise de 2011 (…) pour aller à la réconciliation. Si ce procès peut y contribuer tant mieux », a déclaré l’un des co-accusé Michel Gbagbo, fils de Laurent Gbagbo, en liberté provisoire, et qui, pendant l’audience, a joué à des jeux vidéo sur son smartphone.
AFP
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