Côte-d’Ivoire le précurseur du « bôrô d’enjaillement » la Mouche meurt à 33 ans (vidéo)

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Précurseur de la bêtise humaine « le bôrô d’enjaillement », Bah Tia Sylvain dit ‘’la mouche’’ est mort hier à Dabou à l’âge de 33 ans des suites d’une maladie. « Le bôrô d’enjaillement » consistait à monter sur les bus, en mouvement parfois avec les yeux bandés. Un concept qui a fait de nombreux morts dans le milieu scolaire en Côte d’Ivoire.

L’Intelligent d’Abidjan

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A Abidjan, les obsèques de “La mouche“ font renaitre les souvenirs du “bôrô d’enjaillement“

(MAGAZINE)

Par Jacob DJOSSOU source: alerte-info.net

Samedi, de 22H00 GMT au petit matin, ils étaient plus d’une centaine d’amis et parents à Wassakara, un quartier de la commune abidjanaise de Yopougon (ouest), à danser à la veillée funèbre de Bah-Thia Sylvain alias “La mouche“, l’un des précurseurs du “bôrô d’enjaillement“, des figures acrobatiques sur des autobus en mouvement.

“On danse parce qu’on est content qu’il soit dans les cieux “, commentait le lead-vocal d’un groupe zouglou de Miami, sous-quartier de Wassakara, chargé de l’animation de la soirée.

Vêtus de t-shirts noirs et blancs à l’effigie de “La mouche“, des jeunes de la commune de Yopougon étaient venus rendre “hommage“ à celui qu’ils considèrent comme “un exemple“, un “koro“ (grand frère en Malinké, ethnie principalement parlée dans le nord).

Au dos de ces t-shirts vendus à 1.500-2.000 F, on pouvait lire “Adieu La mouche“. “C’est une façon de lui rendre hommage, de le célébrer car il le mérite“, déclare Koné, l’un des “vieux pères“ de “Vonvon“, une association de jeunes bénévoles dont faisait partie le défunt. Un mouvement créé en 1998 à Wassakara (quartier populaire de Yopougon) pour “assurer la sécurité des populations“.

Sur un espace qui faisait office de podium entre les bâches, jeunes et enfants se déhanchaient et esquissaient parfois des pas de danses traditionnelles au rythme des chants zouglou, un rythme en vogue en Côte d’Ivoire.

Considéré comme l’un des meilleurs “bôrô man“ d’Abidjan, “La mouche“ est décédé jeudi à 33 ans, à Dabou (à 47 km d’Abidjan) des suites d’une maladie. “Il était paralysé des deux jambes pendant quatre mois“, révèle Koné.

C’est un “mal mystique“, estime-t-il. “La mouche“ avait été conduit au centre hospitalier de Cocody, commune située à l’est d’Abidjan, avant d’être envoyé chez un guérisseur traditionnel à Dabou.

Fils aîné d’une famille de quatre enfants, “La mouche“ ou encore “Moucho“ s’est forgé, à 18 ans (1998-1999), une réputation, en créant avec ses amis un jeu dangereux baptisé “bôrô d’enjaillement“.

Le “bôro d’enjaillement“, une “folie de jeunesse“

Formé du mot Malinké “bôrô“ qui veut dire “sac“ et de la francisation du terme anglais “enjoyment“, le “bôrô d’enjaillement“ a pris une dimension nationale en 1998 avec “Moucho“.

Un jeu qui consistait pour “La mouche“ et des élèves dans la capitale économique ivoirienne, à grimper sur le toit d’un bus en mouvement et faire des acrobaties et pirouettes en pleine circulation.

Ce “divertissement“ est né, selon Bah Thia Ghislain alias “Bâtiment 1er“, frère cadet du défunt, d’un manque de places dans les bus de la Société de Transport Abidjanais (SOTRA), leader du transport urbain.

Les autobus pleins de passagers, n’arrivaient plus à assurer convenablement leur travail. La masse d’apprenants aux arrêts et dans les gares étaient les grands perdants. Elèves et étudiants étaient donc obligés de jouer les acrobates, à travers les vitres, pour se faire une place à l’intérieur des bus et rallier les classes.

“Le matin, tu te lèves tôt à 06H00 ou 7H00 GMT pour te rendre à l’école, mais tous les bus sont déjà bourrés. La mouche a donc commencé à s’accrocher aux bus“, pour ne pas être en retard à l’école, explique “Batiment 1er“.

Son surnom “La mouche“ vient du fait qu’il “s’envolait sur les bus comme une mouche“. Il “prenait de gros risques“ en exécutant des pirouettes “dangereuses“.

“Quand il attrapait une vitre, personne ne pouvait le décrocher“, se souvient son frère cadet, ce qui a valu un autre surnom “vitro“.

S’il est devenu célèbre en raison de la “puissance de ses acrobaties“, “La mouche“ a aussi acquis une autre réputation, “parce qu’il n’a jamais été pris“ par les forces de l’ordre.

Son frère et presque tous ses amis, également des “bôrô men“ à l’époque, avaient été appréhendés par des responsables de la SOTRA et agents de sécurité, qui avaient lancé une campagne de sensibilisation et une vaste opération pour réprimer le mouvement.

Ce jeu était devenu en l’espace d’un an un festival pour des jeunes élèves et étudiants, qui organisaient des compétitions entre des lycées d’Abidjan. Le terminus 40 de Yopougon, les gares d’Abidjan s’étaient transformés en scènes de spectacles où ces apprenants exécutaient des pirouettes sur des bus de 17H à 21H GMT, sous les clameurs et les regards admiratifs de leurs amis.

La vague d’accidents et de décès, dues aux acrobaties, a freiné ce “divertissement“, qui a disparu plus tard au début des années 2000.

“Le bôrô d’enjaillement, c’était une folie de jeunesse. Il l’a fait pendant un an et quand il a pris conscience, il a préféré laisser pour être un exemple“, raconte son frère cadet.

Le “Madiba de Wassakara“

“C’est un rassembleur, c’est le Madiba de Wassakara. C’est quelqu’un qui essayait toujours d’amuser la foule quel que soit le moment. C’est un garçon qui apportait la joie et la gaieté dans le cœur de tous les jeunes en toutes circonstances“, s’enthousiasme “Bâtiment 1er“.

Après le “bôrô d’enjaillement“ en 1999, le jeune homme de 33 ans avait décidé d’orienter sa vie. Avec ses amis, ils créent une association, “Vonvon“ (nom créole désignant un insecte ailé, le gros bourdon).

Chargé d’assurer la “sécurité des habitants de Wassakara“, ce groupe de jeunes bénévoles, “dynamique et très mobile“ s’est rapidement imposé, devenant une “référence“ à Yopougon.

Les membres de cette association et des jeunes de Yopougon décrivent tous “La mouche“ comme un “garçon fort, un garçon qui savait ce qu’il voulait“, solidaire, bagarreur et doté d’un bon sens de l’humour.

Célibataire, “Moucho“ venait d’“obtenir un job au port d’Abidjan“ mais rêvait depuis sa tendre enfance d’être “un corps habillé“ comme son frère cadet.

“La mouche“, “moucho“, “vitro“, “spider-man“, tels étaient les surnoms de celui qui a inspiré bon nombre de jeunes d’Abidjan, en bien ou en mal.

JAD

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