Martial Joseph AHIPEAUD, PhD
Analyse comparative des deux grands leaders africains de ces 100 dernières années.
Houphouët-Boigny et Mandela ou le Pouvoir de la foi en l’Afrique en marche !
Au moment où Barack Obama, devant une centaine de personnalités venues du monde entier, rend un vibrant hommage au Président Nelson Mandela, dans un stade, un pays qui pleure un « Père » qui s’en va rejoindre ses ancêtres ou « Notre Père », il n’est pas superfétatoire de revenir sur les grandes leçons de sa vie mais surtout, de faire un parallèle avec le Président Félix Houphouët-Boigny, mort le 7 décembre 1993. Houphouët et Mandela sont certainement deux grandes figures de cette Afrique du 20ème siècle qui a aussi vu naitre et s’épanouir des leaders exceptionnels comme Jomo Kenyatta, Kwame Nkrumah, Ahmed Sékou Touré, Léopold Sédar Senghor, Patrice Emery Lumumba et j’en passe. De ces leaders de carrure que notre continent a engendrés, assurément, Houphouët et Mandela resteront les plus emblématiques, voire même des icônes de la lutte pour la libération de l’oppression étrangère et de la capacité à pouvoir construire une nation, en dépit des obstacles énormes dont ils ont eu à faire face. Comprendre aussi les raisons profondes qui ont fait que leurs contemporains leur ont rendu un hommage global reste aussi une des tâches qui nous revienne pour que, dans ces temps d’agitation et de désespoir en notre classe politique, nous sachions tirer les leçons pour continuer la lutte. A ce propos, il nous semble clairement que trois points forts ressortent de leurs vies et constituent la fondation de leur impact sur notre histoire contemporaine. Il y a d’une part le fait que tous deux ont mené une lutte implacable et sans concession contre l’oppression des peuples africains et l’ont remporté de haute main. Le deuxième point reste qu’ils ont eu une approche iconique des rapports avec la conflictualité. Enfin, leur combat atteste foncièrement qu’ils ont eu une foi inébranlable en l’Afrique en marche.
1- Une lutte implacable contre l’oppression des peuples Africains
A l’époque des wifi et autres merveilles de la technologie, combiens d’Ivoiriens ou d’Africains peuvent se mettre dans le contexte historique de l’Afrique du temps du colonialisme triomphant pour mieux apprécier l’héroïsme des grands combattants de la liberté que furent Houphouët-Boigny, Kwame Nkrumah, David Dacko, Patrice Emery Lumumba, Ahmed Sékou Touré, Modibo Kéïta, etc ? De cette Afrique, personne ne peut se faire une idée et chacun pense que les choses que nous avons aujourd’hui sont arrivées par hasard. Bien au contraire, il est important de se rendre compte que lorsque naissent ces personnages de notre histoire commune, une grande transition historique est en cours. La Conférence de Berlin a donné le cadre de la colonisation de notre continent et partout, du Nord au Sud, d’Est à l’Ouest, les puissances européennes envahissent le continent pour le soumettre. Les résistances des populations sont brisées à coup de canon et autres forces militaires et le 20ème Siècle commence avec les grandes déportations comme celle de l’Empereur Samory Touré, Le Roi Gbéhanzin du Dahomey, le Général des Armées Baoulé Akaffou Awouré, etc. Les défis sont nombreux et leurs successeurs vont faire face à un système qui les brime et les catégorise comme des sous-hommes. C’est dans un tel contexte que les deux guerres mondiales vont conduire les puissances coloniales à se remettre en cause en acceptant de mettre leurs sujets dans leurs armées pour aller combattre leurs frères devenus leurs ennemis entre temps.
A la suite de ces deux grandes guerres, le monde change et les puissances colonisatrices entendent faire avec ce changement en acceptant de donner une option aux peuples Africains. Houphouët-Boigny et les leaders du RDA, nourris à la sève de la contestation du système d’exploitation et d’oppression, ne peuvent que faire une opposition farouche au colonialisme. En Afrique du Sud, les Afrikaners engagent une lutte contre le colon anglais et déclarent leur indépendance mais uniquement pour imposer une oppression des plus abjectes aux peuples Africains et les autres minorités non blanches. Devant ces systèmes barbares, les Anciens optent pour une lutte politique contre le système et non contre les individus. Entre 1945 et 1952, le RDA exprime son anticolonialisme dévergondé avec des leaders charismatiques et déterminés. En Afrique du Sud, le Congrès National Africain, l’ANC, engage aussi une lutte politique contre le système raciste. La répression qui va frapper les Africains conduit ces derniers à des options qui détermineront le futur de leur continent. Là où Houphouët-Boigny laisse les radicaux comme Um Nyobé au Cameroun continuer dans l’anticolonialisme, il manœuvre pour trouver un terrain d’entente avec les colonialistes français pour une raison qu’il nous expliquera, au soir de sa vie, en Mars 1993.
A la différence des autres Africains, qui, dès 1957, commencent à accéder à la liberté politique avec les indépendances des colonies, Mandela et l’ANC doivent faire face à une oppression dans leur propre pays devenu désormais indépendant de la puissance coloniale. En 1960, l’année des indépendances de la plupart des pays Africains, les émeutes et la répression de Sharpeville, confirment l’option radicale du régime de l’Apartheid, de maintenir une ségrégation ethnique massive contre les noirs. Dès lors, la tâche des leaders de l’ANC est encore plus ardue puisqu’ils doivent se battre contre un régime oppresseur qui a pris le pays en otage tout en se proclamant indépendant. Cette particularité de l’Afrique du Sud fait que, dans le concert des nations, les militants de l’ANC sont doublement désavantagés puisqu’ils ne peuvent pas considérer leur pays comme sous tutelle coloniale alors qu’ils subissent une oppression digne des pires temps du colonialisme raciste. L’échec de leur option politique les conduit par conséquent à la prise des armes contre le régime dans un contexte de guerre froide extrême. La répression qui frappa le RDA ne sera pas différente de celle qui va frapper l’ANC même si le premier, par le biais de son Président, Houphouët-Boigny, va avoir une petite option de négociation directe avec l’oppresseur pour trouver une solution aux contradictions politiques et stratégiques. Mandela, emprisonné par le régime de son pays, sera amené à négocier dans un contexte différent mais cela n’enlève en rien au fait que les deux leaders ont dû faire appel à leur sens politique de la manœuvre tout en s’appuyant sur leur conviction politique et idéologique. Car dans un contexte de conflit général, passionnel, existentiel, l’art politique est très étroit et seul un leader d’envergure peut amener ses troupes à la victoire. Tel fut le cas de ces deux montagnes de la lutte pour les libertés des peuples africains.
2- Une approche iconique des rapports avec la conflictualité
Si les archives coloniales doivent encore nous restituer l’étendue de la répression contre le RDA, le monde actuel a été bien documenté de celle qui a laminé la direction de l’ANC, et surtout la deuxième génération de leaders de la lutte Sud-Africaine que les jeunes de Soweto ont emblématisés avec leur chef de file Steve Biko.
En effet, pendant des mois, la répression frappe le RDA. Houphouët-Boigny se sent obligé de négocier avec le pouvoir colonial pour éviter une dérive fatale à la destinée de la lutte pour les libertés et le progrès économique et social des peuples colonisés. La répression semble être une épreuve ultime qui semble séparer les deux destins mais en fait les prépare à la prochaine étape de leurs combats, la capacité à construire une nation dans un contexte de conflit accentué.
Ainsi, en Mars 1993, le Président Houphouët-Boigny, empressa urgemment Mme Mélèdje, épouse de l’ancien ambassadeur Ivoirien au Libéria, de nous faire venir à sa résidence puisqu’il savait que cette dernière et son fils, Richard, avaient réussi à avoir des liens avec la direction de la Fesci. Lorsque nous arrivons et que je me donne le malin plaisir de bien expliquer nos revendications au Père de la Nation, il prendra quatre heures de temps pour répondre point par point à ma thèse développée dans mon mémoire de maîtrise, soutenu en décembre 1992, quelques mois après notre sortie de prison.
En effet, après deux années puisque j’avais fini la rédaction du mémoire en 1990, j’avais enfin réussi à soutenir mon mémoire dans lequel j’argumentais que le RDA avait changé de ligne politique en raison de la répression colonialiste, justifiant ainsi la disparition du premier journal anticolonialiste ivoirien, Le Démocrate dont Bernard Belin Dadié et Coffi Gadeau assuraient la direction de rédaction. Pour le Président du RDA, la réaction coloniale n’était pas un enjeu qui expliquait son changement de position. Bien au contraire, il était bien conscient que leur lutte ferait face à cette option. Ce qui était le plus sa préoccupation, était le fait que cette lutte pouvait connaitre un sort différent si le leadership du RDA était remplacé par des fantoches que le pouvoir colonial imposerait. Cette perspective ne pouvait pas ne pas être prise en compte par la direction légitime du RDA. Si elle conduisait la lutte à cette défaite, les nouveaux leaders, n’ayant pas la même foi et visions, seraient d’autant plus fragiles et manipulables par le pouvoir colonial qu’ils n’avaient aucune légitimité. Dans ces conditions, quelles étaient les marges de manœuvre dont ils disposaient si ce n’était de négocier avec le pouvoir colonial pour trouver une solution tactique ponctuelle qui leur permettrait de développer leur vision tout en mettant toutes les chances de réussite de leur coté ? Devraient-ils mourir dans le feu de l’action tout en étant certain que cette perspective serait tout aussi catastrophique pour leurs peuples ? Ils avaient choisi l’option qui les arrangeait et surtout leur permettait de garder le cap sur la libération, l’indépendance.
Cette capacité à anticiper sur les perspectives permit à Houphouët-Boigny de gagner le pari de la libération, souvent, contre l’avis de ses lieutenants, comme les Ahmed Sékou Touré et autres anticolonialistes radicaux. Um Nyobé, le leader du RDA au Cameroun, avec son parti, l’UPC (L’Union des Populations du Cameroun, section du RDA), avait choisi délibérément de continuer dans la logique anticolonialiste radicale. L’histoire est un témoignage puisque nous voyons aujourd’hui que le parti historique fut remplacé par un fantoche dont le produit fini est encore au pouvoir, au grand dam des amis camerounais incapables, même aujourd’hui, à entrevoir une perspective politique réelle dans leur pays, même s’ils sont très bons à analyser et s’impliquer dans le cas ivoirien. La Guinée de Sékou Touré est aussi un rappel historique que le Président Houphouët-Boigny avait raison contre ses amis.
Mandela aussi, en sortant de prison en 1990, avait à faire face à la même dialectique de la conflictualité. Dans un monde changeant avec la décomposition de l’état central et l’émergence des tribalismes virulents, l’ANC avait à tenir compte des tactiques sorcières du pouvoir des Afrikaners. Il n’est pas inutile de rappeler la mise en orbite du sulfureux Buthelezi, parlant au nom des peuples Zulu, pour accentuer le conflit ethnique entre la direction de l’ANC proclamée majoritairement Xhosa et les Zulu, majoritairement du parti du Inkatha Freedom Party. Le leadership de l’ANC avait compris cette tactique qui tendait à justifier une dérive tribale dans la nation postapartheid pour pouvoir présenter, à coup sûr, ce régime passé, comme l’idéal puisqu’il aurait cependant réussit à tenir loin le spectre de la guerre tribale entre noirs. Prenant toute la mesure de la situation, Mandela fut obligé de sortir de ses gonds pour imposer une dynamique de pardon non pas par peur du pouvoir blanc mais surtout par peur d’échouer à construire une nation là où toute la planète des racistes et autres féticheurs de la théorie de la sous-humanité de l’homme noir caressaient le malin désir de voir ce pays sombré dans la guerre tribale. Son loyal camarade, Jacob Zuma, d’origine Zulu, assura pleinement son rôle dans ce contexte pour attester que la lutte n’était pas tribale mais restait bien au contraire, éminemment politique. Le sort réservé à son emblématique épouse Winnie, tout comme l’assassinat non encore élucidé aujourd’hui de Chris Hani, le tout puissant patron de l’armée de libération, rappellent le contexte explosif auquel Mandela fit face. Lorsqu’il fit sa première visite africaine, après sa libération, en Côte d’Ivoire pour venir remercier le Président Houphouët-Boigny, j’avais déjà milles questions que je me suis posait. Car comment, alors que les radicaux anticolonialistes africains ont traité Houphouët-Boigny de traitre lorsqu’il ouvrit son ambassade en Afrique du Sud, Mandela pouvait-il lui réserver sa première sortie diplomatique sur le continent pour venir lui dire merci ? Quelles raisons justifiaient un tel déplacement avec un sens aussi chargé ?
Certainement que Laurent Dona Fologo, premier ambassadeur ivoirien en Afrique du Sud en plein Apartheid triomphant, sera celui qui nous dira plus en longueur sur la réalité de la présence ivoirienne dans un pays que toute l’Afrique avait boycotté. Mais, comme me le dira un ancien ministre du Président Houphouët-Boigny, un noir qui travaille à l’ambassade peut sortir le soir de l’enceinte avec des aides que personnes en pourra vraiment soupçonner ! Certainement que Mandela ne pouvait pas ne pas rendre un hommage mérité à cet aîné clairvoyant et stratège en venant en personne au bord de la Lagune Ebrié publiquement démontré aux Africains qui l’ont longtemps critiqué qu’Houphouët-Boigny restait un homme engagé pour la libération des peuples Africains, en dépit de ce qu’il faisait officiellement pour attirer l’attention ailleurs quand il travaillait en fait sur des points plus onéreux, donc forcément secrets. Je mesure, avec toute la gravité, la profondeur de son enseignement tactique lorsqu’il nous disait que face à De Gaulle, il expliquait que les Africains étaient tellement décidé à rester avec la France qu’il ne voulait pas de l’indépendance alors que ce dernier ne voulait plus de ces encombrants sujets qui remettraient en cause, l’équilibre démographique de la métropole si le suffrage universelle venait à être appliqué effectivement. En refusant l’indépendance, Houphouët-Boigny contraignait ainsi De Gaulle à concéder les indépendances sans contrepartie sulfureuse comme ce fut le cas avec la Guinée de Sékou Touré. Cela s’appelle avoir du génie tactique tout simplement. Mandela en fit preuve aussi en acceptant de lutter contre l’oppression des noirs contre les minorités et en fondant une démocratie pluraliste, première étape d’un long processus politique de renaissance de la nation Sud-Africaine, et de l’Afrique en général, comme le dira plus tard, Thabo Mbeki, son successeur comme président de la nation la plus puissante en Afrique.
En somme, Houphouët-Boigny et Mandela, avec leur approche particulière à la conflictualité, ont fondé un art politique difficile à comprendre pour ceux considèrent que la lutte politique est menée par des moyens triviaux, lisibles, voire prédictibles. Mais le plus important, c’est que leur approche est aussi ancrée dans une vision que l’Afrique, en dépit des défis et autres difficultés passés, est en marche vers un devenir meilleur.
3- Une foi inébranlable en l’Afrique en marche ternie par leurs héritiers
Contrairement à nombre de ses critiques qui ne veulent pas l’admettre, Houphouët-Boigny a conceptualisé sa vision dans nombre de ses écrits avant l’indépendance. Dans un article publié juste avant la répression coloniale, il affirmait que la lutte pour les meilleures conditions de travail et de vie des populations n’était pas une aventure qui donnerait raison aux pires des colonialistes. Bien au contraire, il avait une vision claire d’un continent en plein essor économique et social. C’est pour cela que dès son élection comme député de la Côte d’Ivoire, il avait demandé au pouvoir colonial d’envoyer une importante masse de jeunes ivoiriens en France pour leur formation. L’éducation de ces jeunes devrait permettre ainsi au pays, en son temps, de pouvoir compter sur leur compétence pour maintenir sa marche vers l’avant.
Tout comme lui, les responsables de l’ANC avaient aussi anticipé sur l’importance de la formation de la relève en envoyant un nombre important de jeunes en formation en dehors de l’Afrique du Sud. Les Thabo Mbéki et autres militants, dont Dulcie September, assassinée en France en 1988 dans les escaliers ou l’ascenseur du siège parisien de l’ANC, ont ainsi eu la possibilité de se préparer à l’exercice du pouvoir tout en assurant les relations internationales du mouvement.
La grande question reste aujourd’hui si la marche vers le progrès des pays sera maintenue par cette génération formée pour pouvoir suppléer aux anciens ? Dans le cadre de la Côte d’Ivoire, certainement que le temps mis par le Président Houphouët-Boigny au pouvoir aura-t-il joué contre la génération qui était sensée l’aider à maintenir le progrès de notre pays ? Les questions sont bonnes à poser car pendant les vingt dernières années, comme l’affirma dans son homélie, l’évêque de la basilique de Yamoussoukro, le spectacle que nous a offert les héritiers est plus que cauchemardesque avec un coup d’état, un pays divisé et une haine entre les populations qui atteint son summum au fil de la gestion peu scrupuleuse de ces élites, devenues, comme Georges Ouegnin le dira, les nouveaux propriétaires du pays. La disparition de Mandela nous fait penser à la même crainte : les héritiers de Oliver Tambo, Walther Sissulu et Mandela, ne feront-ils pas dériver et chavirer le pays sous l’emprise de leur confrontation qui ternit en ce moment les perspectives du pays comme le démontra le fait que le Président en exercice de la république, Jacob Zuma, fut hué par les jeunes mobilisés par son opposition dans le cadre de la politique interne du pays, en pleine commémoration interplanétaire de la mémoire de Mandela. L’évêque Desmond Tutu entend-il conjurer le sort en demandant à la foule de proclamer sa foi en Dieu, en la discipline et en l’union pour suivre les conseils qui se dégagent de la vie de leurs Pères ?
Si nous pensons que les deux Pères ont atteints leurs objectifs, ce qui n’est pas certain, c’est bien celui qu’ils pensaient que leurs jeunes suivraient. En tout cas, en Côte d’Ivoire, l’héritage du Père est oblitéré par les héritiers qui ont passé le temps, depuis sa mort, à faire disparaitre son enseignement et son héritage pour ensuite instrumentaliser son image à leur profit sans pour autant, comme le dira Obama, revenir sur le fond de la pensée et la vision du Père. Même en Afrique du Sud, la problématique de la perpétuation de la vision de Mandela par la direction actuelle de l’ANC pose problème d’autant plus que Thabo Mbeki fut chassé du pouvoir par son parti parce qu’il voulait avoir un troisième mandat, contre les textes du parti et du pays. Alors qu’il fut celui qui mena cette bataille contre le changement intempestif des textes par des individus, Jacob Zuma lui-même s’est illustré de très mauvaise manière à la tête du pays avec des sorties controversées et des attitudes forcément anti-démocratiques dénoncées par une masse de plus en plus importante de Sud-Africains. Le comportement de ces jeunes le huant dans le Stade ce 10 Décembre n’est certainement pas excusable mais donne déjà une idée des perspectives qui ne semblent par forcément brillantes pour ce pays en proie à des difficultés économiques et des ressentiments des populations, vingt ans après l’élection du premier président de couleur. Alors que Mandela quitta le pouvoir bien qu’il fût en position de vouloir s’y maintenir comme le Président Houphouët-Boigny le fit, ses successeurs, comme la plupart des chefs d’états africains, entendent se perpétuer à la tête des pays, les fragilisant d’avantage. La grande popularité de Barack Obama en Afrique du Sud et partout en Afrique reste liée à son discours au parlement Ghanéen dans lequel il affirma que l’Afrique n’avait pas besoin d’hommes forts mais plutôt d’institutions fortes. C’est justement pour donner une chance à la jeune démocratie sud-africaine que Mandela a laissé les jeunes faire leur propre expérience en ne s’éternisant pas au pouvoir. A leur tour, ils veulent s’y maintenir en traficotant avec les lois, en lieu et place de faire leur travail dans le strict lap de temps que leur permet leur mandat pour éviter que l’histoire de cette lutte des peuples Africains vers le progrès ne devienne, une fois encore, un farce. Toute la question reste donc de savoir si l’on devrait désespérer de l’Afrique ou de sa classe politique comme ceux qui disent que Mandela a été empêché de se perpétuer au pouvoir en raison de son âge avancé ? Est-ce à dire que la sagesse n’existerait-elle pas avec la vieillesse ? Loin s’en faut. Tout comme ces devanciers qui ont trouvé leur mission et l’ont accompli avec abnégation et détermination, il reste à la génération présente, la nôtre et celle des Cyril Ramaphosa, ce bouillant syndicaliste qui a pris du temps pour comprendre le fonctionnement de l’économie avant de revenir à la politique pour certainement devenir le prochain président de la république Sud-Africaine, de reprendre le flambeau pour mener le combat de la prospérité de tous, de la consolidation des démocraties et des états post-oppression coloniale, sans populisme mais avec professionnalisme. En Côte d’Ivoire, Houphouët-Boigny aura fait son travail et ses successeurs-héritiers auront démontré leurs limites. Il nous reste de comprendre cela et de jeter les bases durables de la reconstruction nationale par la vraie réconciliation, celle fondée sur la vérité et la justice, en un mot, ce que mon ami Pasteur appelle tout simplement, la dictature de la Loi.
Commencé le 10 et achevé le 12 Décembre 2013
Martial Joseph AHIPEAUD, PhD
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