Mali: les anciens putschistes avertissent la France
27 JUILLET 2013 | PAR JEAN-CHRISTOPHE RIGUIDEL
« Le Mali veut rester indépendant, si les Français l’oublient, ils le paieront très cher » : dans les casernes, le capitaine Sanogo, l’auteur du putsch de mars 2012, reste influent et populaire. Un vent de fronde souffle toujours sur l’armée, d’autant que la France donne le sentiment de tout contrôler dans son ex-colonie alors que l’élection présidentielle se tient dimanche.
Bagnolet (© 2013 AFP) – « Mascarade », « magouille »: les Maliens de la région parisienne criaient leur colère dimanche au consulat général à Bagnolet, frustrés de ne pouvoir voter à défaut de carte d’électeur ou parce que leur bureau de vote a été fermé sans préavis.
« C’est catastrophique, très très mal organisé », se plaint un jeune homme qui attend depuis plusieurs heures, carte d’électeur en main, courant d’un bureau à l’autre, cherchant sa photo sur les listes d’inscrits dont la lecture est compliquée par le fait qu’ils ne sont pas classés par ordre alphabétique.
Plusieurs des bureaux de vote pour la présidentielle malienne, prévus en région parisienne, à Créteil, L’Hay-les-Roses ou dans le nord-est de Paris, n’ont finalement pas ouvert dimanche matin.
A Montreuil, centre névralgique de la communauté qui compte 200.000 personnes en France, dont 80% en région parisienne, deux bureaux de vote pour quelque 500 électeurs devaient être installés.
Hamale Keïta, président de l’un de ces bureaux, a appris dans la matinée qu’il ne pourrait pas ouvrir. Transfert à Bagnolet, il faut poser l’urne et installer l’isoloir en carton, trouver tables et chaises mais surtout de nouveaux assesseurs pour ce bureau sommaire improvisé en plein couloir.
Le scrutin, censé débuter à 08H00, a pris plus de deux heures de retard. « L’organisation a un peu traîné ce matin. Maintenant ça commence à venir, les gens viennent en famille », dit-il, optimiste.
Ils arrivent au compte-gouttes. Accompagné de deux petits enfants, Mamadou Fofana a failli abandonner après plus de trois heures d’attente et de recherches. Il a finalement pu voter, pour la première fois de sa vie. « Notre pays est en convalescence, ce vote doit nous sortir du pétrin », dit-il.
« Au nom de la démocratie retrouvée ! », lance Bakary Traoré en déposant son bulletin.
Tension
Mais dans les couloirs, la colère de centaines d’électeurs, pas sûrs de pouvoir voter, gronde.
« Ils se fichent des Maliens de France, ils se fichent de nous ! », s’énerve une dame, qui a trouvé porte close à L’Hay-les-Roses. « Quand on y est allés ce matin, on nous a dit que c’était fermé et qu’il fallait venir ici. Et là on nous dit que le bureau n’est pas installé ! », s’exclame aussi Aminata. « C’est de la triche ! ».
Pris à parti, un agent consulaire assure qu’une nouvelle « urne va être installée au premier étage pour les gens de Seine-Saint-Denis ou du Val-de-Marne, on ne sait pas encore ». « Mais il faut d’abord que je cherche des agents, OK? », ajoute-t-il en filant dans la cohue.
D’un coup, la tension monte. Mamadou Camara découvre la photo de sa tante sur une liste d’inscrits. « Comment ça se fait, elle vit au Mali! Et moi qui suis ici je ne peux pas voter », fulmine-t-il. Un agent intervient, les accusations de « mensonge » et « magouille » fusent.
« Si à la fin de la journée, un millier de personnes ont voté, ça sera déjà bien », soupire Bara Traoré, qui se « sent frustré ». Comme des milliers d’autres, ce militant politique qui a toujours voté aux élections maliennes depuis qu’il vit en France, n’a cette fois pas reçu sa carte d’électeur, dont 29.000 exemplaires ont pourtant été édités pour les Maliens de France.
« Pour la première fois de ma vie, je ne voterai pas ».
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