Un peu d’humilité, Monsieur le Président !

Jeudi 02 mai 2013, Man. Le Président Ouattara préside une séance du conseil des ministres, en marge de la visite d’Etat dans le Tonkpi.
Jeudi 02 mai 2013, Man. Le Président Ouattara préside une séance du conseil des ministres, en marge de la visite d’Etat dans le Tonkpi.

Libre opinion par Diarra Cheickh Oumar 2 mai 2013

Le 01 Mai est mondialement et selon la tradition une journée solennelle pour le travailleur. C’est le jour consacré où les désidératas et revendications du travailleur sont officiellement portés à la connaissance du détenteur de l’exécutif afin que des solutions idoines soient trouvées. C’est une règle institutionnelle universellement partagée qui ne saurait admettre des exceptions.

Mais depuis son élection à la magistrature suprême, ontiquement à partir d’Avril 2011, notre cher Président a toujours usé de subterfuges pour fuir cette occasion d’échange fraternel avec ses concitoyens qu’il a pourtant courtisés et subjugués pour beaucoup, à grand renfort de propagandes et de promesses mirobolantes pendant les campagnes présidentielles. Est-ce à dire que l’interminable kyrielle de rendez-vous et de rencontres internationaux quelquefois sans grande importance et auxquels on pourrait envoyer des missi dominici que Monsieur le Président s’échine à honorer à travers le monde, sont plus importants que le travailleur, l’ouvrier ivoiriens ? Est-ce un aveu d’incapacité à solutionner de façon efficiente les maux qui minent le quotidien des ivoiriens ? Notre cher Président serait-il devenu un des disciples de Machiavel estimant qu’il n’est point nécessaire de s’acquitter de ses engagements lorsque les convulsions et menaces qui ont conduit à les prendre n’existent plus ? Ou tout simplement, Monsieur Ouattara considèrerait-il comme dévalorisant, déshonorant pour lui de discuter avec des prolétaires bons pour n’être reçus que par des valets de ministres ou de directeurs généraux ? Personnellement, je ne comprends plus rien aux attitudes de mon cher Président ; je ne le reconnais plus. Est-ce l’effet déformant et enivrant du pouvoir qui le conditionne à de telles erreurs aussi grossières ou alors les flatteries grisantes de pseudo-conseillers ou de courtisans plus soucieux de l’assouvissement de leurs désirs matériels et de leurs préoccupations stomacales ? Toutefois, un détour dans la réflexion critique et dans la psychanalyse permet de comprendre que cette fuite continue de notre cher Président répond plus de l’arrogance, de l’orgueil que toute autre chose ou cause. Toute la nation a été témoin de l’impéritie criante d’un certain nombre de ministres à aplanir les difficultés auxquelles sont quotidiennement confrontés les travailleurs de ce pays ; ce qui a conséquemment engendré un embrasement du front social. Ces secteurs clés de la vie d’une nation que sont les secteurs éducation-formation ; de la santé et même du transport ont sérieusement été minés par des grèves à répétition ayant conduit à l’impasse et qui ont permis de mettre au grand jour l’inaptitude et les carences charriés par ces collaborateurs du chef de l’État dans la gestion des portefeuilles ministériels qui leur ont été offerts en guise de gratitude. Mais lorsque les valets peinent à trouver des solutions, ont l’entendement dépassé face à l’acuité des difficultés, il appartient au roi de monter au créneau, de prendre le relais, de voler à leur secours de sorte à pacifier les cœurs à travers des options solutionnelles viables et dignes de crédit et non de s’enfermer dans une tour d’ivoire en s’affublant du manteau du mépris et du défi combinés. Non, Monsieur le Président ! En politique, l’attitude méprisante et orgueilleuse vis-à-vis de l’autre, fut-il le dernier des citoyens, un larbin ou un gueux, constitue une bourde incommensurable qui se paie cash. Dans un passé récent, l’homme ivoirien, politiquement immature, s’accommodait de certaines situations sans pour autant éructer le moindre mot. Cependant l’âpreté de la crise vécue durant plus d’une décennie, a forgé les esprits, a permis aux uns et aux autres d’émerger des ténèbres politiciens aveuglants vers la lumière fondatrice de savoir, de culture de tous genres.

On peut le dire, aujourd’hui, personne n’est dupe ! Vous en avez suffisamment eu les preuves lors des dernières consultations électorales, les municipales et les régionales. Se rendre à une cérémonie comme la fête du travail magnifiant le travailleur et le travail comme entité qui fonde notre existence, ne devrait pas être sujet à des dérobades d’inspiration machiavélienne. Nous savons tous, Monsieur le Président, que votre statut de chef de l’État ne vous pourvoit pas ipso facto d’une baguette magique qui, d’un tour de bras, vous permettrait de solutionner toutes les difficultés matérielles qui gangrènent l’existence de votre peuple. On ne saurait le nier, il y a certes des exigences qui y sont exprimées, mais il s’agit plus essentiellement de rehausser par votre présence physique à cette célébration solennelle, un symbole : l’image du travailleur ivoirien et le respect profond que vous devez lui vouer. Car, c’est en majeure partie, par sa volonté que vous êtes Président de la République. Il y a certes eu le coup de pousse de la communauté internationale, mais cette aide a eu comme substrat la voix du peuple qui a été sans ambages lors des votes. En toute chose, il est important de savoir d’où on vient.

Nous sommes en Afrique et vous n’êtes pas sans savoir qu’un salaire à la fonction publique ou dans le secteur privé sert quelquefois, sans attiger, à nourrir toute une flopée de monde, à entretenir tout un village. Donc magnifier le travailleur qui n’est qu’un paravent, c’est en quelque sorte célébrer tout ce monde et prêter une oreille attentive aux jérémiades du travailleur, c’est également redonner de l’espoir à tous ces gens minés sourdement par la disette. Je veux bien comprendre que, mû par votre volonté d’assurer un mieux-être à votre peuple, vous soyez obnubilé par le FMI, la banque mondiale, les institutions de bretton woods, pourvoyeurs de fonds dont les injonctions sont reçues par vous comme des commandements divins. Toutefois, n’oubliez pas que c’est vers ces travailleurs et ce peuple que vous retournerez lorsque les campagnes pour la conservation du pouvoir s’ouvriront en 2015. J’ai encore la réminiscence de ces images comme si c’était hier où je vous revois, lors des campagnes pour la présidentielle de 2010, à Yopougon Wassakara, en compagnie de votre ministre de l’intérieur, Monsieur Ahmed Bakayoko et le chanteur de Rapp Billy Billy, en train de déguster un des mets concoctés par une des restauratrices du quartier, bravant pestilence, fange et leurs corollaires de microbes, de bactéries. C’est cette image que je souhaiterais voir perpétuée ; il faut entretenir cette flamme avec la base, avec le peuple et non se barricader derrière une muraille infranchissable, insurmontable, une fois qu’on a atteint ses objectifs. Mais, jusque-là, rien dans ce sens ! Impossible d’avoir accès au guide suprême que nous avons élu. Les populations semblent avoir été abandonnées, livrées à leurs sorts. Cela a été plus que frappant lors de la grève des enseignants. Ce sont les parents d’élèves, eux-mêmes, les chefs coutumiers, la société civile qui étaient au four et au moulin pour qu’un modus vivendi soit trouvé et que les élèves puissent reprendre le chemin de l’école suite au cinglant échec de cette diplomatie belliqueuse et guerrière menée par les premiers responsables du secteur éducation-formation et Monsieur le premier Ministre.

Alors, Monsieur le Président, un peu d’humilité ! Soyez un peu plus proche de vos populations ! Ainsi, vous faciliterez la tâche à vos différents directeurs de campagne lorsqu’il s’agira de briguer à nouveau la magistrature suprême. Car, de plus en plus, ce peuple qui a placé sa confiance en vous, est gagné par le découragement, la lassitude. Je le répète une fois de plus, en politique, l’outrecuidance, le mépris de l’autre sont de très laids défauts. Oui, aux injonctions de la métropole, des institutions financières internationales, mais attelez-vous à rester en congruence avec le peuple qui vous a mandaté. Je ne vais pas vous mentir, Monsieur le Président, puisque depuis le début de votre mandat, je ne cesse de tirer sur la sonnette d’alarme, ma déception est, jusqu’à ce jour, entière. J’ose encore croire que d’extraordinaires mutations s’opèreront dans les jours à venir. Que Dieu nous garde !

Diarra Cheickh Oumar
E-mail : diarraskououmar@yahoo.fr

[Facebook_Comments_Widget title= » » appId= »144902495576630″ href= » » numPosts= »5″ width= »470″ color= »light » code= »html5″]

Commentaires Facebook