Haby Niakaté, envoyée spéciale Jeune-Afrique
Le président libanais Michel Sleiman effectue une visite d’État de trois jours en Côte d’Ivoire. L’occasion pour son homologue ivoirien Alassane Ouattara de dérouler le tapis rouge… et de parler affaires.
Les abidjanais sont unanimes : rarement un tel accueil aura été réservé à un chef d’État étranger dans leurs pays. Arrivé le 14 mars, peu après 13h, en terre ivoirienne, le président libanais Michel Sleiman – et sa forte délégation de 90 personnes – a été chaleureusement salué par des dizaines de milliers d’Ivoiriens et de Libanais massés tout au long du chemin qui mène de l’aéroport international Félix-Houphouët-Boigny au quartier d’affaires du Plateau.
Aux abords de l’aéroport, les vigiles et membres du protocole, débordés, ont dû jouer des coudes et repousser une foule pressée de passer le portail de sécurité. Il faut dire que les autorités ivoiriennes et la communauté libanaise du pays, qui a mis la main à la poche, avaient tout prévu : distribution de drapeaux libanais, affiches géantes des présidents ivoirien et libanais accrochées un peu partout dans les rues du Plateau, sur les ponts, ou encore sur les façades d’immeubles…
Les enfants des écoles et collèges des environs ont même été réquisitionnés dès midi pour venir célébrer, sous un soleil de plomb, cette arrivée. Beaucoup, ont aussi arrêté de travailler quelques minutes, sont sortis des bureaux ou boutiques, pour voir passer l’interminable cortège de voitures et de cars. « Akwaaba ! »
Le pape éclipsé
Ce séjour de trois jours en Côte d’Ivoire de Michel Sleiman est le premier du genre pour un président libanais. « Historique », ont d’ailleurs titré plusieurs journaux locaux, qui en ont fait leur une, en éclipsant presque l’élection, la veille, du nouveau pape François.
Le président libanais s’est ensuite vu remettre les clés de la ville d’Abidjan par le gouverneur du district, Robert Beugré Mambé. Une cérémonie retransmise en directe sur la chaîne nationale de la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI).
Une visite qui s’est poursuivie jeudi avec une rencontre avec des hommes d’affaires ivoiriens et libanais du pays, puis un dîner-gala organisé à l’Hôtel Ivoire. Au cours de ce dernier, le président libanais a été élevé à la Dignité Grand Croix de l’Ordre National de Côte d’Ivoire et a remis au président ivoirien la décoration de l’Ordre National du Mérite libanais.
« Cette visite qui fera date dans l’histoire diplomatique de nos deux pays est l’expression de l’amitié du peuple frère du Liban et de son gouvernement, à l’égard du peuple et du gouvernement ivoiriens », a déclaré le président Alassane Dramane Ouattara (ADO). Avant de rappeler l’ancienneté et l’importance, de la communauté libanaise en terre d’Éburnie, notamment au niveau économique.
Les principales communautés libanaises en Afrique, en 2009 :
Quatrième pays d’accueil
La Côte d’Ivoire est en effet le quatrième pays d’accueil de la communauté libanaise, après le Brésil, le Canada et la Colombie. Estimée à au moins 60 000 personnes (des sources officielles vont jusqu’à 100 000), celle-ci est la plus importante d’Afrique. « La contribution de la communauté libanaise à l’économie ivoirienne connaît une évolution remarquable », a déclaré le président ivoirien. Avec « 3 000 entreprises », présentes dans tous les secteurs d’activités et « 300 000 emplois créés », l’apport fiscal de cette forte communauté est estimé à « 350 milliards de FCFA », soit « 15% des recettes fiscales» de la Côte d’Ivoire.
La lune de miel ne sera finalement perturbée que le lendemain, en conférence de presse, où la proportion des intérêts de la communauté libanaise dans l’économie ivoirienne (30%), notamment par rapport à celles des autres communautés, a été soulignée par des journalistes. Après avoir rappelé que 15% des membres cette communauté étaient de nationalité ivoirienne, le président ADO a expliqué : « 30% de l’économie ivoirienne, pour moi, ce n’est pas choquant… Je pense que les Ivoiriens, toutes origines confondues, contribuent de plus en plus à l’économie ivoirienne. »
L’aspect économique de la visite a d’ailleurs été renforcé par la rédaction de projets d’accords de coopération dans de nombreux domaines comme l’information, l’éducation ou encore l’agriculture. Les deux présidents ont enfin affirmé leur souhait de rouvrir, avant la fin de l’année 2013, l’ambassade de Côte d’Ivoire au Liban. Celle-ci, fermée en 1988 pour cause de guerre civile, n’a jamais été rouverte depuis. ADO devrait, quant à lui, se rendre au Liban en début d’année prochaine, au plus tard.
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Par Haby Niakaté, envoyée spéciale
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