Côte d’Ivoire – de qui se moque Blé Goudé ?

blegoude

Il y a un temps pour la cavale, l’impunité, et un autre pour la Justice. Cette loi implacable s’applique aujourd’hui à l’ex-responsable des Jeunes patriotes ivoiriens, Charles Blé Goudé. Arrêté le 17 janvier dernier au Ghana, le « Général de la rue » fait maintenant face à la Justice de son pays où il a été extradé.

C’est dans ce cadre qu’il a passé, le 30 janvier dernier, sa journée dans le bureau de la doyenne des juges d’instruction au palais de Justice du Plateau, un quartier d’Abidjan. Il y a été conduit, pour la deuxième fois depuis son extradition, pour être auditionné par rapport aux accusations de crimes de guerre, d’assassinats, de vols en réunion, de dégradation de biens d’autrui, etc. portées contre lui. Malgré la durée de l’audition (entre 10h et 17h) et, sans doute, l’insistance du juge d’instruction, l’ex-leader de la galaxie patriotique a refusé d’aller au fond du dossier en ne répondant pas aux questions.

Raison invoquée pour « rester en surface » : il subirait une « torture morale » pour avoir été « appréhendé sans son avis » et extradé en Côte d’Ivoire contre son gré. Par la voix de ses avocats qui ont assisté, cette fois-ci, à l’audition, l’éphémère ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo a tenu à faire savoir qu’il n’y avait pas eu de deal entre lui et les autorités ivoiriennes concernant son extradition. Mais, deal ou pas, là n’est pas l’essentiel. Ce qui retient l’attention est la torture morale dont parle Blé Goudé même si on peut comprendre que celui qui était tout puissant hier, qui avait droit de vie et de mort sur les opposants de son mentor, n’est plus rien aujourd’hui et est réduit à être exhibé, menotté comme une bête de foire.

Toutefois, il doit remercier le bon Dieu d’avoir eu la vie sauve contrairement à d’autres qui ont perdu la vie. La torture morale dont parle Blé Goudé pour avoir été alpagué sans son avis, pour être détenu dans un lieu secret, n’est rien par rapport aux douleurs, aux blessures de milliers de personnes consécutives à la grave crise postélectorale. De qui se moque-t-il finalement avec ce genre de déclaration ? En refusant de collaborer avec la Justice, Charles Blé Goudé n’est pas conséquent avec lui-même. Car, avant qu’on ne lui mette le grappin dessus, il déclarait à qui voulait l’entendre depuis sa cachette, qu’il était prêt à collaborer avec la Justice, à aller répondre devant la Cour pénale internationale (CPI) des monstruosités qui lui étaient reprochées.

Mais voilà qu’à la première occasion de mettre en application ses déclarations, « le génie de Kpo », au lieu de se défendre, s’enferme dans un mutisme insultant. Plus grave, il ne demande même pas pardon au peuple ivoirien. Il ne le fait pas pour soulager, un tant soit peu, sa conscience et se permet de parler de « torture morale » dont il serait victime. On ne lui dénie pas le droit d’avoir ce genre de torture mais le bon sens aurait voulu qu’il évitât d’en faire une condition pour ne pas aller au fond du dossier.

Et cela par respect pour les nombreuses victimes de la guerre. Après s’en être lavé les mains, pendant sa cavale, des crimes dont il est accusé, la stratégie du « général » consiste maintenant à mettre en avant sa torture morale pour ne pas y répondre devant le juge. Pendant combien de temps cela va-t-il durer ? On attend sa prochaine audition pour savoir s’il va persister et dans sa logique.

Séni DABO

Le Pays

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