C’est maintenant devenu presqu’un rituel auquel les téléspectateurs ivoiriens sont désormais habitués. Après chaque Conseil des ministres, le porte-parole du gouvernement fait la lecture du communiqué dudit Conseil de façon très appliquée et méthodique.
La date et l’heure sont données pour situer l’évènement dans le temps. Le lieu, le Palais de la présidence de la République, à Abidjan est précisé à chaque fois pour affirmer l’autorité de l’État. Et bien sûr, sous la présidence de SEM. Le président de la République Chef d’État, afin de confirmer et renforcer le pouvoir de l’autorité suprême de l’État. Ensuite, l’ordre du jour est toujours présenté. A titre d’exemple, comme ceci : A/- Ordonnances et décrets, ou mesures générales / projets de lois.
B/- Mesure individuelles, ou mesures générales / projets de décrets. C/- Présentation de communications, ou mesures individuelles. D/- Divers, ou communications. A la fin de chacun de ces communiqués, il est à nouveau indiqué le lieu, Abidjan, où a été lu le communiqué, la date, ainsi que la qualité de celui qui vient de le lire, à savoir, le porte-parole du gouvernement. Après avoir planté le décor de manière solennelle, en véritable maître de cérémonie et expert de ce rituel très bien rodé et codifié, le porte-parole du gouvernement s’exprime toujours de manière posée, audible, mais avec la plus haute gravité qu’impose le lieu et tout le cérémonial qui affirme la puissance publique. Les esprits sont alors conditionnés à prêter la plus grande attention à ces communiqués. De manière générale, on y apprend beaucoup de choses. Par exemple les grandes décisions, orientations politiques, économiques et sociales de l’État. Beaucoup de chiffres sont également annoncés pour divers projets de développement, création d’emplois, réduction de dettes, etc. Ces communiqués permettent surtout d’informer les populations de manière générale sur les actions de l’Etat. Tout ce cérémonial s’inscrit dans une logique de transparence démocratique et de communication avec le peuple, unique détenteur de la souveraineté nationale.
Cependant, la forme actuelle de ce type de communication entre l’exécutif et le peuple présente des limites qui deviennent de véritables faiblesses dans la communication du gouvernement. Semaine après semaine, les communications télévisées du porte-parole du gouvernement se ressemblent toutes et finissent par créer de la répulsion chez les téléspectateurs. Parmi ceux qui ont voté et soutiennent ce pouvoir, certains finissent par changer de chaîne ou éteindre leur télévision. Au bout de quelques minutes d’attention, la technicité des propos, des termes qui ne sont pas toujours expliqués, des chiffres tellement colossaux et la longueur des communiqués font que l’esprit décroche, en dépit d’une réelle volonté de se tenir informer. Cette forme de communication favorise, de fait, des réactions de rejet inconscient chez les téléspectateurs qui ont le sentiment de subir ces communiqués qui ne leur sont pas destinés, mais à une poignée d’initiés. Ainsi, de bouche à oreille, ces personnes vont communiquer négativement sur ce choix de communication. Avec le temps, ce sont elles qui vont reprocher au pouvoir de n’avoir rien fait pour elles et pour le pays. Alors qu’en réalité, la communication n’était pas adaptée à chaque public. Il y a un type de public pour ce genre de communications et d’autres formes de communication pour d’autres types de publics. Dans les grandes démocraties occidentales, ce type de communication ne se fait plus depuis très longtemps. Elle est indigeste et rébarbative. Nous pouvons, par exemple, selon les points importants du Conseil des ministres, inviter les ministres concernés à la télévision afin d’expliquer aux populations les avantages pour elles et pour la nation de tel ou tel projet, investissement ou action du gouvernement dans leur vie quotidienne. Ensuite, les différents acteurs déconcentrés de l’État peuvent relayer ces informations dans leurs différentes localités.
Chaque action d’envergure doit être sans cesse accompagnée de plusieurs communications ciblées et adaptées aux principaux bénéficiaires. Ce sont eux qui feront ensuite le véritable travail de communication sur le terrain avec leur mode de communication plus adapté à leurs réalités quotidiennes. Les techniques de communication adaptées à chaque type de population peuvent être des facteurs déterminants dans le processus de réconciliation nationale, si nous nous donnons la peine d’y prêter attention.
Marcaire Dagry
macairedagry@yahoo.fr
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