Le Professeur Francis Akindes sur la complexité et les subtilités des commissions vérité-réconciliation

M. Francis AKINDES, professeur de Sociologie à l’Université de Bouaké la-Neuve, a prononcé au CSRS (Centre Suisse de Recherches Scientifiques en Côte d’Ivoire) sis à Adiopodoumé au km 17, route de Dabou, une conférence fort éclairante sur le thème suivant : « Les enjeux de la réconciliation dans le processus de reconstruction post-conflit en Côte d`Ivoire« . Dans un style scientifique mais fort gai qui lui est propre, le professeur a tenté d’expliquer comment la société ivoirienne a pu en arriver à des conflits armés d’une telle violence. Il a également insisté sur l’importance de la réconciliation pour sortir du cycle de violence et enfin sur les leçons qu’on peut utilement tirer des trente-deux expériences de justice transitionnelle, leurs forces et leurs faiblesses pour définir ce que doit en Côte d’Ivoire être « un dosage intelligent entre le recours à la justice et la guérison » disait-il. Ce cours demeure d’actualité un an après sa présentation.

« Des strates de rancœurs et de frustrations sur fond de continuum de violence »

D’entrée de jeu, le professeur Francis AKINDES a planté le décor : « L’éclatement de conflits, quelque part, est un signe qu’il existait là de graves dysfonctionnements sociaux qui finissent par affaiblir les liens sociaux » dira-t-il. Selon lui, la crise ivoirienne plonge ses racines dans les strates de frustrations et de rancœurs de nature diverse et variée. Certaines de ces frustrations et rancœurs à épaisseur communautaire sont historiques. Ce sont par exemple celles qui sont parties des luttes de positionnement et du style de leadership politique de Félix Houphouet-Boigny durant la période précoloniale et qui se sont prolongés après l’indépendance. Au sein de certaines communautés, subsistent des ressentiments laissés par la théorie de la race prédestinée à l’exercice du pouvoir qui nourrissent les sentiments d’un complexe de mal-aimés. Les noms le plus souvent évoqués pour justifier ces ressentiments sont les figures victimaires telles que Biaka Boda, Digna Bailly, Dr Victor Capri Djédjé, Ernest, Adam Camille, Yaya d’Alépé, Benzène qui seraient les figures de la victimité de ce mépris. Au sein de ces communautés, un travail de transmission de mémoire, selon le professeur Francis AKINDES font que ces ressentiments intériorisés sont transmis de génération en génération. Sur ce fond historique, viennent se greffer d’autres strates de frustrations telles que, « celles nées du tournant de l’ivoirité basé sur le principe de la citoyenneté en fromage sécable au quart, au tiers ou au deux tiers dans un pays de fort métissage génétique et donc culturel ». Rajoutera-t-il « l’appareil de justice particulièrement injustice, son inféodation structurelle au pouvoir exécutif, la corruption qui la mine de l’intérieur et sa tendance à opérer une distribution très inégalitaire et très censitaire des droits» ont favorisé une culture de l’impunité et généré un manque de confiance du citoyen ordinaire en elle ». Les preuves en sont les multiples commissions d’enquêtes qui n’aboutissent presque jamais. On en mesure les conséquences politiques à travers l’impunité dont avaient bénéficié, notamment les auteurs du charnier de Yopougon en 2002, laquelle impunité a alimenté les rancœurs et justifié d’autres massacres restés jusque-là tout aussi impunis. Une autre strate de frustration et non des moindre, vient de ce que le professeur AKINDES appelle la rupture du contrat social intergénérationnelle entrainant une raréfaction des opportunités de mobilité sociale pour les jeunes. Phénomène bien décrit, selon lui par le chanteur ivoirien Billy Billy. Le résultat de cette absence de projet de société intégrateur des aînés pour les cadets est, selon toujours le professeur AKINDES, la débrouille derrière une table et sous un parasol appelé « cabine téléphonique » et la généralisation du chômage qui prolonge le temps d’enfance de ces jeunes et retarde leur entrée dans le monde adulte. Rajoute-t-il, pour leur avenir, il ne reste en tout et pour tout qu’à vendre leurs musculatures aux officines politiques ». Au-delà de toute considération politique, il analyse les pillages pendant la crise postélectorale comme étant la revanche de ces cadets méprisés sur les aînés. Le petit cireur du quartier prend sa revanche sur le tonton, qui, hier méprisant, est diminué par la peur ». Ce phénomène, essentiellement urbain, a ses prolongations en milieu rural, mais sur fond de ce que le professeur AKINDES appelle « Les solidarités interrégionales politiquement mal gérées » dont les conflits fonciers souvent meurtriers dans l’Ouest-ivoirien sont particulièrement instructifs. La dernière strate citée fut l’ « échec du Forum de réconciliation nationale en 2001 ». Celui-ci aurait pu servir d’instrument de catharsis pour redéfinir un nouveau départ pour la société ivoirienne. Mais, finalement, selon le conférencier, il a laissé le sentiment d’un exercice forcé et très peu sincère pour certains et une politique spectacle sans suite politique, pour d’autres. Ce fut donc une occasion ratée pour la société ivoirienne ». C’est sur cet empilement de frustration que la démocratie ivoirienne se construit dans le paradoxe d’une escalade de violence.

Le continuum de la violence

En ne se donnant pas les moyens de faire de la politique par le débat, la Côte d’Ivoire se construit dans l’échange de la violence avec chaque année qui passe toujours un peu plus de mort. Il en a donné les preuves magistrales et fort émouvantes : en 1991, les tirs à balles réelles sur les étudiants manifestants et la mort d’un élève à Adzopé ; le viol des étudiantes par des militaires au cours d’une expédition punitive sur la cité universitaire de Yopougon, l’assassinat de Thierry Zébié, abattu à coups de gourdins et de machettes par d’autres étudiants ; la fièvre de violence au cours des événements du 18 février 1992. A partir de ce moment, le nombre de mort va crescendo et la société ivoirienne s’habitue à toujours un plus de sang et de morts, dira-t-il : en 1999, 5 morts au cours d’un conflit foncier dans le sud-ouest et de nombreuses exactions ; 2000 : les innombrables morts du fameux « complot du cheval blanc » ; Le coût humain très lourd des affrontements suite aux élections du 22 Octobre 2000. Des milliers de blessés, environ 120 morts, mais surtout un charnier de 57 cadavres découvert à Yopougon. Précise-t-il : « Le volume de perte en vie humaine et la manière dont la mort a été donnée à voir furent une grande première dans la mémoire collective ivoirienne depuis 1990. Inévitablement, l’impunité des responsables de ce charnier, jamais identifiés, servira de justification à d’autres exactions ». Justement, celles qui suivront deux ans après. 2002 : l’insurrection armée a produit également ses victimes sur lesquelles les organisations de défense des Droits de l’Homme telles que Human Right Watch et Amnesty International ont régulièrement attiré l’attention. Le nombre de mort donné par jour a atteint le sommet le 25 mars 2004 : 250 à 300.

Le professeur Francis AKINDES a attiré l’attention de l’auditoire sur le fait que, sur fond d’une culture de « fausse paix », les périodes d’alternance (1990, 1995, 2000, 2010) offre des opportunités politiques d’affrontement des « peurs contre peurs » : peur de perdre le contrôle des attributs du pouvoir contre peur d’en être plus durablement exclu. « Le résultat de ces empilements de frustrations et de rancœurs sur fond de compétition politique, c’est ce que le professeur AKINDES appelle: « La société où tout le monde est contre tout le monde, puisque les auteurs de crime d`hier peuvent devenir des victimes aujourd’hui et vis-versa ».

Le sens de la violence postélectorale. Comment sortir de là ?

Suivant la logique du développement de la thèse du professeur AKINDES, l’on est pas surpris par son interprétation du sens de la violence postélectorale. Pour lui, l’histoire ne fait que suivre son court normal en Côte d’Ivoire tant qu’une volonté collective ne vient pas en inverser la tendance. Selon lui, ce qu’il appelle « le processus d’invention de soi dans la violence » est en marche si rien ne vient l’arrêter. Les 3000 morts signent la montée de l’insignifiance de la vie et la banalisation du sang versé. « Cette escalade de violence et son intensité jamais égalée, le mépris pour la vie à travers les méthodes nouvelles de torture et de don de la mort parfois massive : méthode 125 (100 FCFA de pétrole et 25 FCFA pour la boîte d’allumette), le recours massif aux services de professionnels de la mort, l’utilisation d’armes de guerre prohibées, sont les signes de la continuité d’une nation qui se fabrique dans la banalisation de la violence. Mais une banalisation de la violence sur fond de manque collectif de prise sur cette histoire en construction. Tout le monde se voile la face en se noyant dans la rhétorique irresponsable du « pays béni de Dieu » ; en fait une exclamation qui permet d’esquiver la réflexion sur soi ainsi que le débat sur la nécessité de réinventer un nouvel ordre social, culturel, politique et économique ».

Pour sortir de là, le professeur Francis AKINDES pense que la Côte d’Ivoire ne peut faire l’économie d’une justice transitionnelle adaptée au contexte politique, social et culturel et en fonction de la nature des dimensions de la crise qui la mine. Et c’est, selon lui, semble-t-il, la direction que semble emprunter le nouveau régime avec l’initiative d’une Commission dite « Dialogue, Vérité, Réconciliation ». Ceci ne peut être que salué. Mais, il se dépêche de rajouter : « il est cependant plus facile de proposer une commission que de l’établir, et il est plus facile de l’établir que d’en assurer le fonctionnement effectif ». Et là, le professeur Francis AKINDES, en sociologue politiste a fait montre d’une vaste culture des conflits et des justices transitionnelles. En puisant dans les expériences de 34 expériences (dont 18 expériences en Afrique) dans le monde notamment en Afrique (Afrique du Sud, Algérie, Maroc, Rwanda, Ghana etc Serra Leone, Maroc, République Démocratique du Congo, etc …), en Amérique Latine (Colombie, Argentine, Chili, Guatemala, Salvador), et même en Asie (Indonésie), à Haïti et en Bosnie-Herzegovine, il a entrepris de montrer à l’assistance qui le suivait avec passion, la complexité et les subtilités des Commissions vérité-réconciliation, mais aussi la délicatesse des liens entre par exemple, l’appareil judiciaire et la Commission Vérité Réconciliation lorsqu’il en existe dans une période de transition. Cette partie de l’exposé fut fort riche en détails et l’auditoire découvre en effet la tache fort complexe qui attend M. Charles Konan Banny dans la mission de présidence de la Commission « Dialogue, Vérité, Réconciliation » qui lui a été confiée.

Le professeur AKINDES a rappelé de prime abord qu’une justice transitionnelle peut se réaliser à travers cinq axes majeurs interconnectés : la poursuite en justice des auteurs des crimes ; des initiatives en faveur de la recherche de la vérité en vue d’appréhender les violations commises dans un passé plus ou moins proche ou lointain ; la recherche de la réconciliation, l’octroi de réparations aux victimes des violations des droits de l’homme et enfin, les réformes des institutions judiciaires et politiques lorsque des services publics tels que la police, l’armée et des services spécifiques sont considérés comme étant responsables des abus. L’objectif de toute justice transitionnelle après des crises comme celles que la Côte d’Ivoire a connues, par exemple, étant de « dire le droit, mais aussi et surtout de chercher la vérité » précise-t-il. Il a noté également que cette vérité à rechercher comporte deux dimensions : la vérité judiciaire qui est du domaine de la justice ordinaire et la vérité historique qui donne toute sa force à une Commission Vérité-réconciliation. Mais, le professeur Francis AKINDES, rajoute : «Dans ce processus, il est particulièrement dangereux, sous couvert de la recherche de paix, de vouloir habilement transformer l’amnistie en moyen de réconciliation, ce qui ne serait qu’une technique suicidaire de perpétuation de l’impunité. Puisqu’une telle logique a pour conséquence d’effacer l’histoire et de nuire gravement à la vérité censée libérer collectivement. Prendre le risque d’une telle approche biaisée finit toujours par en rajouter aux stress qui ont conduit les sociétés dans les crises dont elles sont censées guérir ».

L’intérêt d’une commission vérité-réconciliation est « de savoir ce qui s’est passé pour en guérir, de savoir ce qui s’est passé pour pardonner, de savoir ce qui s’est passé pour récrire une histoire commune qui récrée la confiance dans le corps social. C’est pour un peuple un droit de connaître l’histoire de la violence qu’elle s’est faite pour espérer dompter ce qui est désormais un patrimoine négatif ». Une autre raison pour laquelle la mise en place d’une telle commission lui paraît d’un intérêt évident en Côte d’Ivoire est que « l’on ne peut utiliser le tribunal et le procès pénal pour espérer sortir de la profonde crise dans laquelle nous sommes plongés ».

Le plus éclairant pour l’assistance aura été la partie de l’exposé du professeur Francis AKINDES sur les raisons des succès et des échecs des justices transitionnelles avec ou sans Commission « Vérité, Réconciliation » qu’il a tenté de résumer en six points :

Le contexte politique. La nature de la transition politique dans un pays donné et le positionnement des auteurs de crimes dans le nouveau régime sont un facteur de succès ou d’échec des CVR. Le pouvoir encore fort, faible ou moyen des auteurs de crime selon la mainmise qu’ils exercent encore sur les organes centraux et les appareils sensibles tels que l’armée et la police peuvent plus ou moins limiter l’efficacité d’une Commission et de ses collaborateurs et orienter la logique des formes d’amnistie choisie. Toujours par rapport aux déterminants du contexte sociopolitique, le professeur Francis AKINDES a insisté sur le fait qu’un travail préliminaire d’évaluation de la perception de la justice et de la guérison socialement espérée, de leur mise en œuvre ainsi que de l’équilibre à observer entre les deux dans le processus est essentiel pour déterminer l’approche de justice transitionnelle à envisager. Car l’expérience, selon lui, a montré que les sensibilités nationales varient d’un pays à un autre. A titre d’illustration, il a pris cinq pays dans lesquels le taux de succès paraissait au-dessus de la moyenne. Afrique du sud : forte priorité au processus de guérison par le pardon ; Argentine : Priorité à la Justice ; Chili : Priorité égale à la justice et au processus de guérison ; Guatemala : Amorce de priorité au processus de guérison ; Salvador : Priorité nationale limitée soit à la justice, soit au processus de guérison.
Toute cette précaution permet de garantir à la Commission le soutien populaire dont sa création et son fonctionnement ont besoin. On l’aura vu ailleurs, plus le soutien est large, plus l’action de la commission vérité sera étendue. Plus le soutien est limité, plus la commission aura du mal à s’assurer la coopération de la société civile.

L’origine de l’initiative détermine la légitimité de la commission ainsi que le degré de confiance que la société accorde à une commission. Il est arrivé parfois que l’initiative de leur naissance parte des parlementaires et du gouvernement comme ce fut le cas en Afrique du Sud, des Nations Unis et/ou des parties signataires des accords de paix (Guatemala/Salvador). Mais dans la plupart du temps, ce sont les présidents qui les prennent. Et lorsque c’est le cas, le peuple doute de son indépendance. En clair, les commissions créées par décret présidentiel sont généralement perçues comme étant motivées par la volonté de faire diversion. A cet effet, le conférencier a insisté sur le fait que pour être crédible, une commission veille toujours à son autonomie bien que les ressources lui viennent du gouvernement. L’égide sous laquelle une commission est créée influence considérablement jusqu’où il est permis de remonter dans la recherche de la vérité et le degré d’ouverture de la commission à la collaboration avec la société civile.

Le mandat de la commission a été un point sur lequel le conférencier a particulièrement insisté, car c’est là que le but, les pouvoirs et les limites de la commission, notamment, les types de violation des droits de l’homme, les phases du ou des conflits qui feront l’objet d’investigations, l’étendue géographique des enquêtes, les pouvoirs juridiques de la commission et le niveau de flexibilité qui lui est accordé, sont clairement fixés. A-t-il précisé : « La clarté du mandat est le meilleur garant de la traçabilité de la méthodologie d’une commission. Plus son mandat est clair, concis et précis, plus ses résultats s’en ressentiront ». Le professeur AKINDES a beaucoup insisté sur le fait que partout ailleurs, tous les mandats sont réalisés presque dans une tension dynamique entre le texte du mandat initial et les interprétations que les commissaires en font par la suite. « Quand la commission sera mise en place ici en Côte d’Ivoire, vous verrez les tensions au fur et à mesure entre ce que dit le texte et à l`exercice les interprétations que les commissaires en font«  a-t-il prévenu. Souvent, les tendances à l’exclusion de certains types de crime de la compétence de la commission vérité réconciliation comme en Algérie, au Maroc et au Tchad sont à l’origine de ces tensions.

La question est ressources stables compte pour une bonne part dans le succès ou l’échec d’une commission. Les ressources doivent être à la mesure de l’étendue du mandat de la Commission. En Afrique du Sud, par exemple, la Commission a duré deux ans et demi avec plusieurs prolongations, a utilisé environ 400 personnes et a coûté 9 millions de dollars US entièrement pris en charge par le gouvernement sud-africain. Au Salvador, il a duré huit mois, y compris le délai supplémentaire, a coûté 2,5 millions de dollars US et a été entièrement pris en charge par les Nations Unies. En la matière, les fortunes sont donc diverses.

La composition de la commission, aux dires du professeur AKINDES, se révèle également être d’un enjeu stratégique. Le nombre de commissaire varie généralement d’un pays à un autre. Mais un point reste capital selon lui : la réputation des commissaires qui garantit le sérieux des enquêtes aux yeux du public. La diversité et la représentativité est un autre enjeu politique de taille qu’il faudra manipuler avec beaucoup de minutie. Elle peut être un facteur positif de perception d’impartialité et de qualité de la commission comme elle peut se révéler être un facteur de blocage des travaux. Le conférencier en donne un exemple. « En République Démocratique du Congo, par exemple, une commission a été créée. Mais trois ans après, l’on réalisait déjà qu’elle n’avait donné aucun résultat. Elle avait pourtant satisfait à la fausse exigence de la représentation de toutes les tendances politiques. L’on se rend compte que le regroupement de toutes les tendances politiques au sein d’une commission n’en garantit ni l’impartialité, ni l’efficacité. Au contraire, du fait que chacune des parties en conflit y était représentées, nombre de ces représentants avaient été critiqués comme étant aussi des complices de violations des droits de l’homme par les autres factions. Ce qui finit par entamer la crédibilité de la commission. »
La question de l’amnistie. Le conférencier a particulièrement insisté sur le fait que la question de l’amnistie est un point de controverse politique dans les processus de transition. En même temps que l’on ne voit pas d’issue pour une transition sans une forme ou une autre d’amnistie pour certains crimes et certaines formes de violation des droits de l’homme perpétrés. Mais le choix du moment (avant ou après la création de la commission). Avant, il laisse le sentiment que la recherche de la vérité judiciaire risque d’être noyée. Après, elle n’induit pas vraiment le changement espéré. « La définition du niveau de responsabilité dans la gestion de l’amnistie est tout aussi importante », dira le professeur Francis AKINDES. Déléguer une partie à la commission d’amnistier comme en Afrique du sud fut une option controversée. Par contre, au Nigeria où rien n’a été dit sur le pouvoir d’amnistier, les auteurs d’exactions craignaient que la vérité allait les condamner plutôt et ne se livre donc pas. Il faut donc trouver le bon dosage en fonction des attentes préalablement bien identifié de l’équilibre entre justice et guérison.

Il conclut son exposé en insistant, pour le cas de la Commission en formation en Côte d’Ivoire, sur l’importance de la clarté du mandat de la commission, la nécessité d’assurer la crédibilité de la commission aux yeux de la société civile par une enquête rapide de perception sur l’orientation de justice transitionnelle (équilibre à observer entre justice et guérison par le pardon) que souhaiteraient les Ivoiriens, l’indépendance de la Commission par rapport au gouvernement, la stabilité des ressources de la commission et la réputation des commissaires. Car pour lui, rater la transition, rater encore cette occasion de réconcilier la société ivoirienne avec elle-même, serait rajouter une couche de frustration à celles qui ont généré l’intensité de la crise que nous avons connue.

A la fin de cet exposé fort riche, le Directeur du Centre Suisse de Recherches Scientifiques, le Professeur Bassirou Bonfoh a pris la parole pour féliciter le conférencier et attirer l’attention des décideurs sur le caractère concret, à travers de cet exposé, de ce que la recherche peut apporter à la prise de décision à un tournant décisif de ce pays. Le président de l`Université d`Abobo-Adjamé, le professeur Germain GOURENE a exprimé sa satisfaction de voir s’exprimer sous cette forme vivante et élaborée des résultats chercheurs Ivoiriens qui ne sont pas souvent malheureusement exploités par les dirigeants. M. Jean MBAHIA, conseiller te représentant du président de la « Commission Dialogue Vérité et Réconciliation » a invité les ivoiriens à prendre la mesure de la complexité de l’exercice à venir à l’aune de cet exposé et à s`approprier le processus de réconciliation nationale en évitant de ne le voir que sous un aspect folklorique. A cette rencontre à caractère scientifique, l’on notait également la présence du Vice-président de l`Université de Bouaké-la-Neuve, professeur Michel KODO, du professeur OUATTARA Azoumana, Doyen de l`UFR, Communication, Milieu et Société, des enseignants chercheurs des trois Universités ainsi que la participation de Mme Madeleine Boguifo du PNRRC (Programme National Réinsertion et de Réhabilitation Communautaire).

SERCOM UNIVERSITE DE BOUAKE

Commentaires Facebook

Les commentaires sont fermés.