Les dessous du limogeage d’Adama Bictogo

Déchets toxiques: Les dessous du limogeage d’Adama Bictogo

Notre Voie

Le ministre de l’Intégration africaine, Adama Bictogo, a été démis de ses fonctions, dans l’après-midi du mardi 22 mai dernier, par le chef de l’Etat, Alassane Dramane Ouattara. Dans le souci de faire appliquer la bonne gouvernance, selon le communiqué officiel du gouvernement. Mais, à en croire des sources bien introduites au sein de l’appareil de l’Etat, les dessous de ce limogeage résident dans l’agacement de Ouattara vis-à-vis de son poulain à la suite des récurrentes manifestations des victimes des déchets toxiques au Plateau. Ces victimes réclament l’arrestation d’Adama Bictogo, Koné Cheick Oumar, patron du cabinet juridique Konéco et président de l’Africa Sport, Claude Gohourou, président de la Coordination des victimes de déchets toxiques de Côte d’Ivoire (Cndvt-Ci), actuellement en exil au Ghana, et d’autres personnes accusées d’avoir détourné la somme de 4,658 milliards fcfa destinés à indemniser 6624 victimes des déchets toxiques. Ainsi, un rapport détaillé de la police économique a fait cas du détournement de la somme de 600 millions fcfa par Adama Bictogo par l’entremise de ses hommes de main : les avocats Kouamé Bi Iritié et Tella Osther Henri Vincent. Ceux-ci ont déclaré aux forces de l’ordre, lors de l’enquête diligentée par le parquet d’Abidjan-Plateau, que cette somme d’argent est destinée à la rémunération de la mission de facilitation d’Adama Bictogo entre la Cndvt-Ci et le cabinet d’avocats anglais Leight day and Co, représentant la société Trafigura, pollueuse des populations abidjanaises en 2006. Mais l’enquête policière a démontré qu’ Adama Bictogo a eu un trop perçu de 600 millions fcfa au lieu de 56 millions fcfa qu’il devrait recevoir sur les 22,5 milliards fcfa de dédommagement de toutes les victimes au terme du processus.

Ce cas manifeste de détournement de fonds a été évoqué en conseil des ministres, le jeudi 16 mai dernier. Et, selon nos sources, Alassane Dramane Ouattara n’a pas caché son indignation face à son ministre. La ministre déléguée à la Justice, Mattoh Cissé Loma, a été chargée de rencontrer les victimes qui manifestaient au bas de l’immeuble de la Tour B abritant les bureaux du ministre de l’Intégration africaine, en mission. Ce jour-là, à 17h, le représentant du gouvernement a indiqué à ses interlocuteurs que le pouvoir Ouattara disposait d’un milliard fcfa pour payer les premières victimes. Ce que ceux-ci ont accepté non sans avoir signifié qu’ils maintenaient leur manifestation du 6 juin prochain, l’opération « Kodjo rouge » devant la Présidence pour le paiement de toutes les sommes détournées. Entretemps, le rapport de la police économique, censé être confidentiel, se retrouve dans les rues d’Abidjan. Cela éclabousse le régime Ouattara au moment où une mission de l’Onu séjourne au bord de la lagune Ebrié. Le courroux du mentor du Rdr ne s’est pas fait attendre. Adama Bictogo est viré du gouvernement. Même si celui-ci, dans un baroud d’honneur, s’est récemment confié à la presse internationale, en soutenant qu’il était prêt à rembourser le trop perçu dans le scandale des déchets toxiques. Pour leur part, les membres du Réseau national pour la défense des droits des victimes des déchets toxiques de Côte d’Ivoire (Renavidet-Ci), principaux plaignants, estiment qu’Alassane Dramane Ouattara doit aller au-delà du limogeage de son poulain. Adama Bictogo doit être révoqué de ses fonctions de député d’Agboville et être mis aux arrêts. Mieux, ils veulent un audit des 22 milliards fcfa destinés à l’indemnisation, la reprise du processus de payement et l’interpellation de Koné Cheick Oumar, présumé co-auteur du détournement d’une partie de ladite somme (2,6 milliards fcfa). Quant au président du Renavidet-ci, Charles Koffi, qui soutient avoir été la cible d’une tentative de corruption de la part du clan d’Adama Bictogo, à hauteur de 500 millions fcfa, sa vie est désormais menacée par les faucons du Rdr depuis l’éclatement de ce scandale financier. Le pouvoir Ouattara a tenté en vain de le mettre aux arrêts, le 28 avril dernier, pour « troubles à l’ordre public ». Les arrestations de personnes impliquées dans l’affaire des déchets ont débuté depuis hier.

Didier Kéi

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