« L’appel de Anne Ouloto demandant aux cadres Wê de rentrer est un acte de sorcellerie »

Yro Djiezion

« L’appel de Anne Ouloto demandant aux Ministres Hubert Oulaye, Alphonse Voho Sahi et aux autres cadres Wê de rentrer n’est purement et simplement qu’un acte de sorcellerie».

En prélude à la visite du Chef de l’État, Mr Dramane Ouattara dans l’ouest de la Côte d’Ivoire notamment en pays Wê, les communautés Wê de partout au monde sont en pleine ébullition. Si certaines voient cela d’un bon œil, d’autres par contre sont outrées et sur le choc. L’ancien Directeur de campagne du Président Laurent Gbagbo au Canada et actuel Représentant du FPI au Canada, Mr Yro Djiezion originaire de Fengolo nous donne ses impressions.

Mr Djiezion, tout l’Ouest de la Côte d’Ivoire s’apprête à recevoir le Chef de l’État. Quelle sont vos impressions?

Nous ne sommes pas surpris de cette visite de dernière heure de monsieur Dramane Ouattara à l’Ouest. Tout le sang de nos proches versé a servi à son installation au pouvoir. Y avait-il urgence en la demeure? Non! C’est toujours une bonne chose qu’un homme politique visite une partie du pays où les assassinats, la faim et l’arbitraire font partie du quotidien des populations dépossédées de tout bien. C’est aussi politiquement correct d’aller affronter la misère des Ivoiriens depuis son installation au pouvoir; mais à quelle fin sera utilisée cette visite et qui seront les hôtes?

Que voulez-vous dire par à quelle fin sera utilisée cette visite et qui seront les hôtes?

Le régime Ouattara est enquête de publicité et voudra faire croire à la communauté internationale que tout va bien à l’Ouest. En prélude à ce voyage, les paysans autochtones sont menacés, chassés des abris de fortune et sommés de retourner chez eux alors qu’ils n’ont ni toit ni terre agricole dans leurs villages. Nous savons tous que seuls les étrangers qui occupent illégalement nos villes et villages seront majoritaires à accueillir le chef de l’état. Par conséquent les interlocuteurs du chef de l’état ne seront ni assez crédibles ni assez représentatifs. En somme, ce sont les non autochtones qui feront le spectacle de l’accueil.

Mme Anne Ouloto à lancé un appel à ses frères Wê leaders politiques en exil au Ghana leur demandant de revenir au pays. Que pensez-vous de cette demande?

Nous ne faisons pas la même lecture de la situation politique que Dame Ouloto. Il nous est difficile d’évaluer les rapports qu’elle entretien avec les exilés du Ghana ou ailleurs. Peut-elle garantir la sécurité de ces hommes politiques importants? Que pèse-t-elle dans le régime d’Ouattara Alassane pour pousser ces cadres WÊ à l’erreur? Les exemples ne manquent pas pour beaucoup d’Ivoiriens qui ont osé revenir au pays. Certains sont emprisonnés d’autres, moins chanceux, sont assassinés. Nous sommes portés à nous demander les buts inavoués de cette démarche de madame Ouloto. A-t-elle pris le temps de visiter au Ghana une seule fois ses frères et sœurs à qui elle sollicite le retour? Madame Ouloto ne peut rien garantir alors nous croyons que demander le retour des cadres WÊ exilés n’est purement et simplement qu’un acte de sorcellerie.

Vous êtes originaire de Fengolo et de Guitrozon, dans le département de Duékoué, 7 ans après le massacre de Guitrozon et 1 an après celui de Duékoué carrefour, les coupables courent encore. Comment vivez-vous tout cela?

Nous nous trouvons dans une situation d’une justice des vainqueurs. Les coupables sont promus et des innocents croupissent en prison. Nous prenons cela très mal et le condamnons avec véhémence. Jusqu’aujourd’hui, des milliers de personnes sont portées disparues. Est-ce possible de vivre normalement lorsque l’on s’imagine qu’une sœur, qu’une cousine ou qu’une mère est prisonnière sexuelle des Dozos-FRCI quelque part si elle à la chance encore d’être en vie? C’est difficile pour nous tous et ce drame nous cause un grand stress inutile.

De plus en plus de Wê de la diaspora sont pour la réconciliation au pays. Qu’en dite-vous?

La réconciliation est un processus qui, en soi, ne semble pas une mauvaise initiative. Seulement il faut qu’un certain nombre de conditions soient réunies pour que la réconciliation aboutisse. Pour notre part, tant qu’il n’y a pas eu de coupables désignés ni repentis, parler de réconciliation est un leurre. C’est une manière gravissime de mépriser la mémoire de tous les Ivoiriens disparus. De plus, les Wê étant les plus éprouvés, pourquoi n’a-t-il pas fallu qu’au moins un Wê soit membre de cette Commission Réconciliation? Enfin, nous nous demandons si les autorités ivoiriennes actuelles font réellement de la réconciliation une priorité? Sinon pourquoi persister dans les injustices, l’arbitraire et à agir comme si la crise n’a pas pris fin le 11 avril 2011?

En votre qualité de Représentant du FPI, quelles sont vos recommandations pour la prochaine convention du 29 avril?

Notre pays traverse des moments difficiles et notre dignité prend grand un coup. Une convention dans un tel contexte vient à point nommé. Cette convention permettra au FPI de se questionner et de renforcer l’état de l’union afin de parer à un certain nombre de difficultés à savoir : le niveau et la qualité de la communication, le danger de dispersion et l’attitude à tenir face à un régime totalitaire. C’est sûr que nous ferons des suggestions; mais permettez-nous, avant tout, de les faire connaitre avant tout au secrétariat du parti d’abord.

Comment appréhendez-vous la prochaine comparution du Président Laurent Gbagbo le 18 juin prochain à la Haye?

Je voudrais saisir cette opportunité pour féliciter tous les combattants de la dignité africaine et les encourager à continuer et persévérer dans la lutte. Le 18 juin sera une autre occasion pour le président de dire ce qui s’est passé et de remettre en cause toute la procédure judiciaire qui l’a contraint à être un résident de la Haye. Cependant, notre grande inquiétude vient de la propension des nôtres à être trop sereins. Nous avons en face des gens qui n’ont pas le sens de la mesure quand vient le temps faire du mal. Un ami, mien, ne disait-il pas que notre grande sérénité ne nous prédispose ni à la prudence ni à la vigilance, corollaires de l’anticipation. Nous avons affaire à un gangstérisme international bien équipé. Alors notre conseil serait pour tous les combattants de faire preuve de prudence.

Interview réalisée par N. Aurelie

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