En Côte d’Ivoire la réconciliation est lancée

THE ASSOCIATED PRESS

YAMOUSSOUKRO, Côte d’Ivoire – Des responsables politiques ainsi que le plus célèbre footballeur ivoirien ont porté mercredi sur les fonds baptismaux une commission Vérité et Réconciliation, destinée à ramener le pays sur le chemin de la paix après des mois de violences meurtrières post-électorales.

Au moins 3000 personnes ont été tuées entre décembre 2010 et avril 2011, quand des frappes aériennes sous l’égide des Nations unies ont finalement contraint le chef d’État sortant Laurent Gbagbo à céder le pouvoir à Alassane Ouattara, vainqueur — reconnu par la communauté internationale — de la présidentielle de novembre.

La nouvelle commission de onze membres, inspirée de celle créée en Afrique du Sud pour faire la lumière sur les crimes commis pendant l’apartheid, devrait permettre aux familles des victimes des violences des deux camps de s’exprimer.

Dirigée par l’ancien premier ministre Charles Konan Banny, elle compte également en son sein le footballeur ivoirien Didier Drogba, qui évolue actuellement à Chelsea, ainsi que des responsables locaux et religieux de tout le pays.

Des organisations de défense des droits de l’Homme ont exhorté la commission à entendre l’ensemble des doléances, y compris au sujet des exactions attribuées aux combattants rebelles enrôlés dans le camp Ouattara.

On ignore quel sera le degré d’implication de la commission dans le processus judiciaire.

L’archevêque sud-africain et lauréat du prix Nobel de la paix Desmond Tutu, qui a dirigé la commission Vérité et Réconciliation dans son pays, a souligné mardi les liens étroits entre la réconciliation et la justice. Une «justice de vainqueur (…) saperait grandement le processus de réconciliation, a-t-il dit. Nous encourageons le président Ouattara à démontrer à son peuple et au monde que le processus judiciaire entamé (est) juste et complètement impartial».

Depuis l’arrestation de Laurent Gbagbo en avril, des dizaines de ses partisans ont été inculpés pour divers crimes. En revanche, aucun de ceux de Ouattara n’a été poursuivi, alors que les deux camps sont accusés d’avoir commis des violations des droits de l’Homme.

«Nous avons l’impression à ce stade que c’est la justice des vainqueurs» qui est à l’oeuvre, déplore Frank Kouassi, étudiant en droit de 26 ans, qui précise ne pas être allé voter lors des dernières élections. «C’était une guerre. Ce n’était pas juste un seul camp qui appuyait sur la gâchette».

Le jeune homme ne pense pas que la commission ait pour rôle de dire qui doit être poursuivi. «Il y a une fracture dans la société» et l’instance pourrait permettre d’y remédier si elle «parle avec les gens», et leur apprend à faire preuve de tolérance, ajoute-t-il.

Pour Venance Kouassi Kouassi, habitant de la capitale Yamoussoukro, «les gens des deux camps devraient être jugés». Sinon, avertit-il, l’«impunité que nous avons toujours eue et avons trop souvent en Afrique» perdurera.

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