Conclave des Forces nouvelles demain à Bouaké: Soro va dissoudre son armée (Le Patriote)

Source: Le Patriote

Un conclave d’envergure pour des décisions tout aussi d’envergure. La rencontre que les Forces nouvelles, l’ex-rébellion ivoirienne convoque demain samedi, dans son ex-QG à Bouaké est attendue. Ce ne sera pas un conclave comme il y en a déjà eu. Il s’agira, pour le mouvement de Guillaume Soro, de faire sa mue. Au sens propre comme au figuré. La situation politique actuelle en effet, recommande des changements à tous les niveaux. Les arbitres du processus de sortie de crise, sont bien placés pour le comprendre. C’est pourquoi, les dirigeants des Forces nouvelles ont annoncé ce conclave. Mais la question que les observateurs de la scène politique se posent, est celle-ci: de quoi sera-t-il question lors de ces 48h de rencontre? Le Patriote est en mesure de lever un coin de voile sur les futures décisions qui seront prises à l’issue de ce grand-rendez-vous. Selon des indiscrétions, le premier responsable des FN, le secrétaire général Guillaume Soro qui sera à l’ouverture et à la clôture des travaux, prendra une décision historique. En conformité avec les réalités du moment. Il s’agit de la dissolution de la branche militaire des Forces nouvelles. Quoi de plus normal. Les patrons de la branche militaire ont été tous incorporés dans la nouvelle armée ivoirienne. A l’issue de ce conclave, l’on n’entendra plus parler des Forces armées des Forces nouvelles, ni de commandants de zones. Pas plus qu’on n’entendra parler de la centrale, cette espèce de caisse qui finançait le mouvement de Guillaume Soro.

Des décisions historiques

Voilà pour le volet militaire et économique. Reste le politique. Quel avenir politique pour ce mouvement qui a porté à bout de bras, la démocratisation de la Côte d’Ivoire nouvelle? Deux choix sautent évidemment aux yeux. Soit les Forces nouvelles se transforment en parti politique, soit elles s’érigent en une société civile forte, une espèce de groupe de lobbying pour booster le processus de sortie de crise. Exactement comme un arbitre qui reste à équidistance des chapelles politiques et qui observe le déroulement du ‘’match’’. Sur le premier point, c’est non ! Les Forces nouvelles ne se transformeront pas en parti politique comme l’ont annoncé à plusieurs reprises, les rumeurs abidjanaises. Mais, si l’appellation disparaît, ce n’est pas le cas pour les nombreux cadres et compétences dont les actions ont permis au mouvement d’acquérir ses lettres de noblesse. Ceux-ci doivent pouvoir exister dans une structure formalisée pour jouer leur partition pour le pays. C’est d’ailleurs pour cette raison que de nombreux cadres des futures ex-Forces nouvelles sont dans l’administration. Et c’est aussi pour cette raison que le RDR leur avait lancé de façon solennelle, un appel à venir poursuivre le combat avec eux. Il va donc sans dire que cet appel à eux lancé va être sérieusement discuté lors des débats. Mais attention! Cela ne veut pas dire que la branche politique ou les cadres de ce mouvement vont se fondre dans le parti des Républicains. C’est dire que l’adhésion devra se faire de manière progressive et non brutale. Dernière alternative selon les mêmes indiscrétions, beaucoup de personnes suggèrent un changement de nom étant entendu bien sûr que l’appellation ‘’Forces nouvelles’’ est en passe de devenir désuète et rappelle la rébellion. Or, la rébellion est désormais derrière nous. En tout état de cause, il appartient au conclave de décider. Comme il l’a toujours fait lorsque les Forces nouvelles ont décidé d’amorcer un tournant décisif de leur histoire. L’on se rappelle en effet qu’en 2009, juste deux années après la Primature de Guillaume Soro, une grave crise politique avait opposé Laurent Gbagbo à son nouveau chef du gouvernement. Le FPI avait ouvertement accusé Soro de saboter le processus. Toute chose qui avait provoqué le courroux des délégués des Forces nouvelles qui, dans un langage direct et clair, ont demandé au Premier ministre de quitter son poste.

A situation exceptionnelle…

Un conclave avait été convoqué le 20 avril, à Bouaké en présence du “directoire politique et des grands commandements”, afin de prendre des “décisions courageuses et historiques’’. A l’issue de la rencontre, bien que «l’appel des délégués a été bien noté», depuis son lancement le 14 avril, Soro a clairement choisi de poursuivre la mission qui lui a été confiée à la tête du gouvernement ivoirien et d’appliquer intégralement l’Accord politique de Ouagadougou jusqu’à la tenue des élections annoncées pour cette année. Pour sauver la République. Le lundi 8 mars 2010, un autre conclave s’est penché sur des questions brûlantes de l’heure. «Dans le cadre de la relance du processus de sortie de crise, le Premier ministre Soro Kigbafory Guillaume rencontrera les responsables politiques et militaires des Forces nouvelles. Cette importante séance de travail sera consacrée à la situation politique nationale et aux questions liées à la consolidation de la liste électorale et au désarmement conformément au 4ème accord complémentaire à l’accord politique de Ouagadougou», mentionnait un communiqué du secrétariat général des Forces nouvelles. Cette rencontre était liée à l’  »affaire des 429.000 enrôlés de la CEI » qui avait en son temps, conduit à la crise ouverte entre le camp présidentiel et le Rhdp. Enfin, il y a eu cet autre conclave, celui du 31 janvier 2010 pour analyser la situation politique et sociale en Côte d’Ivoire. A ce moment précis, le FPI et ses satellites, dénonçaient les militants du RHDP, les traitant d’étrangers en pleine identification: «Les Forces Nouvelles condamnent les arrestations arbitraires, les dénonciations calomnieuses et les tentatives de tous ordres, qui visent à radier de la liste électorale définitive, à leur insu, de nombreux Ivoiriens accusés, sans la moindre preuve, de fraude à la nationalité ivoirienne. Les Forces Nouvelles, affirmant leur attachement au respect du contentieux électoral, demandent au Gouvernement d’expliquer aux populations et aux partis politiques, les procédures légales de radiation sur la liste électorale, et d’encourager les juridictions compétentes à l’application stricte de la Loi,» avait tranché le conclave qui a réaffirmé la volonté des FN de veiller au «respect du chronogramme adopté par la réunion du Cadre permanent de concertation du 3 décembre 2009», et ont appelé «à la poursuite du processus électoral et à la préservation des acquis de l’Accord politique de Ouagadougou». Comme on le constate, les différents conclaves des FN ont toujours permis de sauver des situations que les Ivoiriens pensaient quelquefois désespérées. Et comme il n’y a jamais deux sans trois, il va sans dire que le conclave de demain, sauvera la situation dans un pays désormais réunifié.

Yves-M. ABIET

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Primature – Assemblée nationale : Guillaume Soro dans l’embarras
Par L’Inter
Difficile d’être en ce moment dans la posture du Premier ministre, chef du gouvernement ivoirien, Guillaume Kigbafory Soro. Selon des confidences qui nous ont été faites par des proches, Soro serait en effet dans l’embarras, en ce qui concerne l’orientation à donner à sa carrière politique. Va-t-il ou non céder le poste de Premier ministre qui devrait échoir au Pdci-Rda, conformément à la promesse de campagne faite par Alassane Ouattara à son  » aîné  » Bédié ? Ou va-t-il se lancer dans la bataille pour la présidence de l’Assemblée nationale, à l’issue des élections législatives prochaines ? Le dilemme est total. Dans son entourage, notamment du côté des Forces nouvelles, le mouvement qu’il dirige, certains estiment que le Premier ministre Soro doit poursuivre l’oeuvre qu’il a commencée à la Primature, jusqu’à la fin du premier quinquenat d’Alassane Ouattara. « Soro a demontré qu’il a la capacité de diriger le pays, et le président de la République lui fait entièrement confiance. Nous , les Forces nouvelles, nous ne l’abandonnerons jamais », a lâché ce proche du chef de l’ex-rébellion, sous le couvert de l’anonymat. D’ailleurs, le Premier ministre Soro ne verrait aucun inconvenient à son maintien à la maison blanche du Plateau, à quelques pas seulement de la présidence de la République qu’il lorgne. Après avoir passé plus de quatre ans à la Primature, où il a appris à gérer les affaires de l’Etat, Soro flaire désormais l’odeur du fauteuil de président. Il croit fortement que l’époque des aînés, notamment Konan Bédié, Laurent Gbagbo, Alassane Ouattara est révolue, et que l’heure de la génération à laquelle il appartient a sonné. Il se prépare dans cette perspective, en visant l’horizon 2015 où vont s’ouvrir de véritables batailles électorales. Sa présence à la Primature pourrait constituer à cet effet une posture hautement stratégique pour préparer sa candidature à la magistrature suprême.

Chose promise, chose due

Le hic cependant, c’est que Soro est confronté à cette promesse de campagne électorale faite par Alassane Ouattara, de céder la Primature au parti d’Henri Konan Bédié. Ce qui n’est pas encore le cas. « Avec le président Bédié, nous considérons que Guillaume Soro fait du bon travail, que la situation est encore fragile, que nous avons besoin de lui. Nous souhaitons qu’il continue et il a accepté de continuer. C’est lui qui formera le prochain gouvernement. Je tiendrai mes engagements envers le PDCI, le moment venu, mais ce n’est pas le moment », avait expliqué, sur une chaîne étrangère, M. Ouattara au sujet du maintien de Guillaume Soro à la Primature. Ce premier rendez-vous manqué avec le Pdci avait suscité quelques grincements de dents au sein de la famille politique d’Henri Konan Bédié. Ce qui a failli porter un coup à la coalition politique du Rhdp qui a porté Alassane Ouattara au pouvoir. Avec cette expérience, Ouattara peut-il encore se permettre de doubler son aîné Bédié ? Pas sûr! Soro le sait et se prépare en conséquence. Il viserait pour cela le poste de président de l’Assemblée nationale, à tout le moins, un groupe parlementaire fort. Dans la configuration politique actuelle en Côte d’Ivoire, le chef de l’ex-rébellion devient de plus en plus fragile. D’autant plus que ses troupes militaires des Forces armées des Forces nouvelles (Fafn) sont désormais absorbées par l’armée ivoirienne. Ces forces cessent de lui appartenir pour être sous le contrôle de l’Etat de Côte d’Ivoire. De plus, et Soro le sait également, nombreux sont les chefs de guerre qui n’ont d’yeux et d’oreilles que pour Alassane Ouattara, pour qui ils ont  »mouillé le maillot » jusqu’à son accession au pouvoir. Il ne reste donc à Soro que l’aile politique du mouvement, qu’il s’emploie à étoffer pour les batailles futures. En clair, Soro ne veut pas disparaître de la scène politique. Après avoir règné pendant 10 ans sur les zones Centre, Nord et Ouest, il veut transformer l’essai et bâtir un empire politique en s’appuyant sur ces zones. En cela, les législatives annoncées pour le mois de décembre sont une aubaine pour le secrétaire général des Forces nouvelles et ses hommes pour se positionner et compter sur la scène politique. Au secrétariat général de l’ex-rébellion à Bouaké, on se prépare à affronter le prochain scrutin qui va doter la Côte d’Ivoire d’un parlement. Mieux, l’ex-mouvement rebelle entend décrocher des postes de député à l’issue de ces élections. Le conclave annoncé pour samedi et dimanche prochains a pour objectif de reflechir aux stratégies à mettre en place pour être parmi les élus du peuple. A la clé, Soro serait heureux de constituer un groupe parlementaire au sein de l’hémicycle pouvant lui permettre d’avoir droit au chapitre dans le débat politique ivoirien. Le chef de l’ex-rébellion mettrait en ce moment les bouchées doubles pour atteindre son objectif. Il fait le ménage autour de lui pour extraire les brebis galeuses, ceux qui n’épouseraient pas sa cause, mais aussi il a commencé à démarcher des cadres, notamment dans le Pdci et le Rdr. C’est voyant ce danger venir que les responsables de ces deux partis ont décidé de combattre les candidatures indépendantes en leur sein. Ces candidats indépendants étant perçus comme de potentiels députés de l’écurie Soro. Dans tous les cas, le patron des Forces nouvelles se prépare à avoir une assise forte à l’Assemblée nationale au cas où il devra céder la Primature. Après quoi il envisagerait de créer un parti politique pour se lancer dans la course au pouvoir.

Hamadou ZIAO

Photo: Guillaume Soro

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