Téléphonie mobile – Rififi à GreeN Côte d’Ivoire Abdulghani Ramadan, un émissaire du CNT libyen, nommé nouveau DG ; les travailleurs sur le pied de guerre
Après la victoire militaire et diplomatique, cap sur les campagnes économiques et commerciales. Le Conseil national de transition (CNT), la rébellion libyenne qui a chassé le Colonel Mouammar Kadhafi du pouvoir avec le soutien plus que actif de la France et de l’Otan (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord), est en train de prendre possession des grosses entreprises libyennes implantées sur le continent. Le mercredi 31 août dernier, le Libyen Abdulghani Ramadan, arrivé 48 heures plus tôt à Abidjan, a pris fonction à la tête de la société de téléphonie mobile GreeN Côte d’Ivoire. Cet émissaire du CNT libyen, venu tout droit de Benghazi via Tripoli, remplace l’ivoirien Sylla Yaya, directeur général de GreeNetwork, filiale du groupe international LAP (Libyan Africa Portfolio).
Abdulghani Ramadan a été chaudement recommandé par Moustapha Abdeljalil, chef de la rébellion libyenne du CNT et actuel homme fort de Tripoli, à son homologue ivoirien Alassane Dramane Ouattara. Mais les travailleurs de GreeN, informés seulement la veille du débarquement d’un nouveau DG, ont voulu s’opposer à cette décision. Mal leur en a pris. Car c’est manu militari qu’un commando de « bérets verts » puissamment armés de la « compagnie Anaconda » du Commandant Issiaka Ouattara dit Wattao, s’est rendu à l’immeuble Green au Deux-Plateaux, siège de la compagnie, pour « déloger » l’ex-DG Sylla Yaya et installer de force le mandataire du CNT libyen agréé par le pouvoir ivoirien. Depuis cette date, au moins une trentaine d’éléments Frci gardent les locaux et surtout le palier occupé par la direction générale.
L’affaire fait grand bruit en ce moment dans la compagnie de téléphonie « verte ». D’autant plus que les 200 travailleurs de la société ont peur pour leur avenir, eux qui accusent trois mois d’arriérés de salaires. De plus depuis quatre mois, toutes leurs prestations sociales ont été coupées : plus d’assurance-maladie, et les cotisations ne sont plus reversées à la Caisse nationale de la prévoyance sociale (CNPS). Une grève générale du personnel, prévue le vendredi 2 septembre dernier, a été interdite par le nouveau DG, qui a menacé contre tout débrayage éventuel. Revendiquant le soutien des autorités ivoiriennes, Abdulghani Ramadan a convoqué une réunion d’urgence dès sa prise de fonction. Selon des participants, le nouveau DG aurait tenu des propos très désagréables à l’égard des travailleurs, dont nous vous livrons la teneur : « Faites ce que vous voulez. Allez au-delà de la grève si voulez, cela ne changera rien. Car j’ai le soutien des autorités. Le ministre Ahoussou Jeannot et le commandant Wattao sont de mon côté. C’est grâce à eux que j’ai pu rejoindre mon poste ce matin (mercredi 31 août, ndlr), donc vous ne pouvez rien. Si vendredi ou même un autre jour, je découvre que quelqu’un n’est pas à son poste, je le vire ». Pris de court, les agents ont reporté leur grève du vendredi dernier, le temps de mieux s’organiser. Un des soldats Frci rencontré mardi au siège de la société et répondant au nom de « Petit Soro », s’est voulu on ne peu plus précis sur leur mission à GreeN. « Le commandant Wattao nous a envoyés ici pour venir mâter les rebelles de la société ». Il n’y a pas message plus clair. Aux dernières nouvelles, les employés auraient reçu 25% de leur salaire mensuel.
Pour la petite histoire, GreeN Network s’est installée en Côte d’Ivoire en 2008 sous le président Laurent Gbagbo, dont Kadhafi était l’un des soutiens affichés. Oil Libya, une autre société libyenne du groupe LAP implantée en Côte d’Ivoire et qui opère dans le domaine des hydrocarbures, est aussi dans le viseur du CNT.
Sylvie Kouamé
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