Côte-d’Ivoire – Après la crise les morgues font le commerce avec les corps des victimes

Par Louty (L.G.) | Connectionivoirienne.net

Scandaleux ! Escroquerie en masse des familles des victimes des événements postélectoraux dans les morgues d’Abidjan

La crise dite postélectorale a couté la vie à 3000 personnes selon les chiffres officiels, 5 à 10.000 selon d’autres sources non-officielles. Si les morts sont majoritairement les militaires, miliciens ou civils armés, des centaines de civiles furent malheureusement aussi des victimes « collatérales » de cette guerre. Tous les corps qui n’ont pas atterri dans des charniers ou dans des fausses communes se retrouvent dans les morgues d’Anyama et des Centres Universitaires Hospitaliers (CHU) de Yopougon, de Cocody et de Treichville. Selon des informations qui nous sont parvenues, de nombreux parents des victimes n’ont toujours pas retrouvé les corps de leurs proches, parce qu’aucune opération d’identification des corps n’a officiellement été lancée par les nouvelles autorités ivoiriennes.

Prise en charge de la Présidence

Cependant, selon les mêmes sources les autorités ont tout de même eu le mérite de prévoir une prise en charge des frais des obsèques des victimes par les services de la présidence. Ces frais concernent l’enlèvement du corps, le séjour à la morgue, le cercueil et le Corbillard. Des dépenses très souvent insurmontables pour les familles démunies de Côte-d’Ivoire. Des frais très élevés dans le cas présent, parce que beaucoup de familles n’ont pu retrouver les corps de leurs proches que des semaines, voir des mois après la fin des combats. La raison est que plusieurs familles ou parents des victimes ont dû trouver refuges soit à l’intérieur du pays, dans des villes plus sécurisées ou dans leurs villages ou se sont carrément exilées dans les pays limitrophes (Ghana, Liberia, Togo, Benin, Burkina).

A la morgue du CHU de Treichville, une famille dont le fils mort dans les événements est conservé, les frais de séjour sont à 8.500 Cfa par jour. Cette famille souhaitant demeurer anonyme, nous fait savoir que les consignes de prise en charge de la présidence ne sont pas respectées par le personnel de la morgue. En effet, certains responsables peu scrupuleux de ce service de la morgue du CHU de Treichville ont vu dans le malheur des familles l’occasion de se faire des sous. Bien que la prise en charge présidentielle soit en vigueur, certains agents réclament à cette famille une somme avoisinant 1 million (1.000.000) Cfa, pour disent- ils couvrir les frais de séjour à la morgue et les autres dépenses. Renseignement pris auprès du service central de Ivosep qui à la gestion des morgues de l’État, une employée prénommée Dina confirme à notre rédaction l’existence d’une prise en charge présidentielle et l’existence d’une procédure à suivre. Au CHU de Treichville, la famille que nous accompagnons n’est pourtant pas au bout de ses peines. Aucune oreille n’est sensible à sa douleur. Tout au plus elle s’entend dire par un employé subalterne qui l’accoste «qu’elle n’a pas parlé français !» (elle n’a pas soudoyé Ndlr.) Renseignements pris, des responsables de la morque, Bamba Syllani et Coulibaly seraient à l’origine de cette cabale, certainement en complicité avec d’autres agents du service.

Escroquerie

Leur stratégie est simple. Beaucoup de familles ignorent l’existence d’une prise en charge présidentielle. L’information leur est purement et simplement dissimulée et une facture leur est automatiquement dressée. Cette facture ne sera pas saisie dans la comptabilité du service. Pour les personnes décédées dans les événements autrement que par balles, il est demandé aux familles, de faire la preuve (impossible) qu’elles sont mortes durant les événements. Certaines familles qui connaissent bien les bourreaux de leurs proches (tués par autres moyens que par balles), n’osent pas les dénoncer de peur de représailles. Une autre difficulté concerne les certificats de décès. Par peur de représailles au plus fort des combats, très peu de médecins osaient indiquer les vraies raisons de la mort sur les certificats de décès et se contentaient d’écrire « mort naturelle », « Accident » ou autres raisons fantaisistes comme causes du décès pour éviter d’indexer les FRCI ou FDS. En effet, très souvent, les corps étaient conduits à la morgues par des éléments des FRCI ou FDS. Finalement, la mort par balle fait l’affaire des familles. «Je ne comprends pas certains de nos collègues qui compliquent les choses aux familles. Les morgues d’Abidjan et d’Anyama pullulent de cadavres que personne ne vient réclamer» s’indignent un agent de Ivosep. Épuisé et visiblement très en colère, le frère aîné d’une victime, rencontré à la morque du CHU de Treichville fulmine: «Dans un pays dit civilisé, c’est nous les parents des victimes civiles qui recevrions de l’argent comme dédommagement pour nos proches brusquement et injustement arrachés à notre affection. Et non le contraire ! Certains nous laissent déjà avec leurs progénitures et leurs épouses suffisamment de charges pour que nous dépensions encore des millions pour les enterrements ».

Par Louty | Connectionivoirienne.net

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