Par Dr Dieth Alexis Vienne Autriche
La décision finale de l’Union Africaine n’est pas seulement de bon de sens. Elle s’accorde avec la rationalité juridique et morale. Elle fait du respect du verdict des urnes, c’est-à-dire du principe de la majorité absolue du suffrage, le critère absolu de la vie politique africaine. La solution ultime et unique de la crise politique ivoirienne ne pouvait donc être que la reconnaissance de la légitimité du président élu assortie de la proposition de la formation d’un gouvernement d’ouverture placé sous sa régence souveraine. Contrairement à la thèse soutenue par Mme Dutheuil qui proposait le 09 Mars dernier, dans les pages de ce journal, « un partage du pouvoir », à partir de l’argument selon lequel « la moitié de la population n’est pas prête à accepter Alassane », la solution du problème ne se trouve pas dans un partage du pouvoir. S’agit-il en effet d’une « moitié de la population » ivoirienne ou d’une minorité qui « n’est pas prête à accepter Alassane Ouattara » ? Par ailleurs, l’argument de Mme Dutheuil, qui réduit le problème électoral ivoirien à la personne d’Alassane Ouattara, ne fait-elle pas ressortir le problème de la fétichisation qui pollue la clarté de la question électorale ivoirienne en particulier et africaine en générale ? Le fétichisme consiste à adorer un objet, un végétal, un animal ou une personne, dans sa simple matérialité, au détriment d’un principe spirituel. Le principe spirituel est, soit réduit à l’entité matérielle qui l’incarne, soit ignoré tout simplement. Or, Alassane Ouattara en tant que Président élu est-il simplement un individu concret qu’on doit accepter ou rejeter parce qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas ? Ou incarne-t-il en ce moment, dans la vie politique de la Côte d’Ivoire le principe juridique spirituel du respect de la majorité absolue du suffrage et l’alternance démocratique ? Toute la question du problème politique ivoirien et africain se concentre dans cette double problématique : la problématique du fétichisme politique et celle de l’acception du principe juridique et spirituel de la majorité absolue du suffrage et de l’alternance démocratique. C’est pour cela que la décision finale de l’Union Africaine est la solution unique au problème politique ivoirien qui constitue un cas salutaire de jurisprudence continentale. Nous allons démontrer argumentativement notre hypothèse.
Mais commençons d’abord par montrer que, loin d’être une opposition de « la moitié de la population » ivoirienne à une élection irrégulière, le climat de chaos et de guerre civile tactiquement et stratégiquement entretenu par la partie ivoirienne perdante, qui ne veut pas se résoudre à abandonner le pouvoir suprême pour jouer son rôle citoyen dans l’opposition, relève d’une instrumentalisation de la minorité et de la série des manipulations de divers ordres dont il est coutumier. Ces manipulations ont un but unique, d’un égoïsme monstrueux : orienter le cours de l’histoire dans la direction qui satisfait ses vues personnelles fussent-elles au détriment du peuple ivoirien et de la terre entière. Les exactions qu’il continue de perpétrer en dépit du bon sens en espérant contraindre le monde entier à se soumettre à ses désidératas, à travers la pratique de la terreur et du chaos, s’ajoutent à la liste déjà longue des charges qui alimenteront le dossier de l’accusation quand il devra répondre de ses crimes devant la cour pénale internationale.
Les analyses de Mme Dutheuil, parues mercredi 9 Mars dans les pages de ce journal, établissant le diagnostic du mal ivoirien sont exactes. Mais le remède qu’elle prescrit pour soigner le mal risque de tuer le malade. La solution du partage du pouvoir à égalité qu’elle propose, sous l’impulsion de la stratégie du chaos et selon le chronogramme de la partie perdante des élections est fausse, contre productive, et calamiteuse.
En accusant les politiciens « indifférents au chaos » « figés dans leurs orgueils quasi psychiatriques » qui « attendent que la mission de médiation de l’Union africaine leur dicte une solution qui a toutes les chances d’être rejetée et contestée lorsqu’elle sera rendue publique », elle ne prononce pas un jugement juste. On peut situer l’orgueil du côté du camp perdant qui ne parvient pas à subordonner sa particularité et ses intérêts à l’intérêt général de la Nation, à se ranger humblement sous la règle de l’universalité républicaine qui est le respect du principe de la majorité absolue du suffrage universel. L’orgueil ne se trouve certainement pas dans le camp du gagnant des élections présidentielles qui incarne en ce moment un principe universel éternel et transcendant qui dépasse les intérêts mesquins des particuliers et des mortels que nous sommes tous en tant qu’hommes. On remarquera ici que les agitations et les bruits de refus de la médiation de l’UA sont en ce moment mis en œuvre par le perdant orgueilleux qui ne veut accepter d’autre solution que celle qui consiste à lui attribuer le pouvoir ou lui en faire régenter la solution du partage !
Mme Dutheuil écrit que « que la moitié de la population n’est pas prête à accepter Alassane ». Or cet argument ne traduit pas la réalité car il n’est pas ressorti des urnes une égalité du suffrage. Les élections présidentielles ivoiriennes n’ont pas donné 50 pour cent des voix aux deux candidats. Ils s’établissent comme suit : 54,10 pour cent à Alassane et 45,9 pour cent pour Gbagbo. Le problème est donc celui du respect de la majorité absolue du suffrage. Ce n’est donc pas la moitié de la population qui n’est pas prête à accepter Alassane mais la minorité de la population qui n’est pas prête à accepter la règle de la majorité du suffrage. Il est capital d’insister sur cette différence entre « moitié de la population » et « minorité électorale » pour éviter une confusion préjudiciable à la clarté du débat.
Décomposons toutefois notre dernière phrase qui contient deux idées pour distinguer d’une part, l’acceptation d’ Alassane en tant que personne particulière et d’autre part, l’acceptation de la règle que cette personne incarne. Que la minorité de la population ne soit pas prête à accepter Alassane ne relève pas d’un problème sociologique essentiel qui est lié à la texture particulière de la société ivoirienne, mais d’un problème politique artificiel provoqué par des manipulations et des stratégies politiques destinées à assurer la conservation ou la prise du pouvoir politique. Si la minorité de la population n’est pas prête à accepter Alassane en tant que personne, la raison en est que des politiciens intéressés ont systématiquement manipulé l’opinion pour lui faire croire qu’il était étranger afin d’assouvir leurs ambitions politiques personnelles. Ils ont systématiquement cultivé la xénophobie dans le corps social. Satisfaire cette manipulation et cette xénophobie, politiquement téléguidées, en adoptant la solution du partage du pouvoir qui viole le principe constitutionnel du critère de la majorité absolue du suffrage serait un acte gravissime. Ce serait consacrer la xénophobie, rejeter le principe constitutionnel de la majorité absolue du suffrage, et faire du partage du pouvoir à égalité entre le gagnant et le perdant, la règle de la vie politique et de la démocratie africaine tropicalisée. La solution ultime et unique consiste donc en ce que les 45,9 pour cent de la population ivoirienne se soumettent à la règle de la majorité absolue du suffrage et qu’ils l’acceptent par un travail de déconstruction des manipulations et de la désinformation systématique auxquelles elles ont été soumises. L’essentiel est que la majorité respect la minorité et l’intérêt général dans la gestion du pouvoir politique.
Mais outre le problème posé par la manipulation de l’opinion on peut aussi faire intervenir un problème culturel et psychologique de compréhension du principe de la majorité du suffrage pour expliquer la résistance de la minorité. On peut supposer que les 45,9 pour cent qui représentent la minorité ne sont pas prêts à accepter Alassane parce qu’ils ne sont pas habitué à la démocratie, au principe de l’alternance, et pensent que celui qui obtient le pouvoir va le conserver ad-vitam aeternam, en s’appropriant toutes les richesses et tous les pouvoirs à leur détriment. On peut adopter une telle position en soutenant que les Ivoiriens n’envisagent pas une alternance démocratique parce qu’ils ne croient pas vivre dans une démocratie. Or la solution à ce problème culturel et psychologique ne repose pas, lui aussi, sur un partage du pouvoir. Sa solution réside dans le respect du principe de la majorité absolue du suffrage. Il est ici question d’une révolution mentale et d’une réforme des mœurs politiques africaines. Il faut que le principe du respect du verdict des urnes et le principe de l’alternance du pouvoir s’inscrivent dans les consciences et dans les mœurs. D’après ce principe, Ouattara a gagné les élections parce qu’il est majoritaire. Et il cèdera le pouvoir aux élections suivantes s’il est minoritaire. Il le sera si, durant sa magistrature, il ne respecte pas l’intérêt général qui comprend les intérêts de la minorité. Ce principe sera donc compris par le fait qu’il sera vécu et expérimenté par les populations au quotidien et lors des diverses élections qui suivent l’élection présidentielle. Mais il faut bien commencer la vie démocratique pour qu’il en soit ainsi. C’est en acceptant les résultats du suffrage universel que la démocratie peut se mettre en place et que les Ivoiriens peuvent croire à une alternance. Cela existe en Afrique dans la sous région par exemple au Ghana, en Sierra Léone, au Benin et au Nigéria. C’est ce qu’on appelle la bonne gouvernance.
En imposant le partage du pouvoir, on viole le principe de la majorité absolue du suffrage pour construire une démocratie tropicale adaptée à l’esprit présupposé limité d’un peuple dont on pense qu’il ne pourra jamais comprendre le principe de la majorité du suffrage ! Ce serait un contre exemple contre productif que dément éloquemment l’exemple du Ghana, du Benin, de la Sierra Léone et du Nigeria. La Côte d’Ivoire introduirait un contre exemple calamiteux qui entrainerait la régression politique dans la région et même sur le continent. La démocratie du partage du pouvoir pourrait être imitée au Togo, au Gabon et au Cameroun pour ne citer qu’eux.
En réalité, penser que 45,9 pour cent des Ivoiriens ne peuvent pas accepter Ouattara, est penser qu’ils ne sont pas capables de comprendre ce qu’est la démocratie, ce qu’est le principe de la majorité absolue du suffrage. Penser cela est une insulte au peuple ivoirien qui est suffisamment mature pour vivre en démocratie et se réapproprier sa maturité et sa dignité politique niées sous la colonisation et sous l’autoritarisme politique des régimes qui lui ont succédé. Laurent Gbagbo ne peut pas comprendre et ne veut pas comprendre ce qu’est le principe de la majorité du suffrage parce qu’il tient à garder ses privilèges. Il ne représente pas la voix du peuple ivoirien. Il a perdu les élections. Il ne se préoccupe ni de l’intérêt général ni de la démocratie. La finalité de sa mainmise sur la télévision publique et de la répression exercée sur les médias d’information indépendants est de manipuler l’opinion publique ivoirienne, et même mondiale, pour l’entraîner dans cette préoccupation égoïste personnelle qu’est la conservation du pouvoir suprême dans l’Etat ivoirien. Invoquer le motif de la division sociale pour imposer le partage du pouvoir est alors consacrer une solution qui satisfait le but visé par la stratégie de la manipulation de l’opinion, de la terreur et du chaos qui l’accompagne structurellement.
Il faut alors dévoiler la supercherie qui vise à rejeter sur la communauté internationale et sur une partie de la population ivoirienne la responsabilité du chaos et de la guerre civile qui menace en Côte d’Ivoire. La responsabilité de la situation actuelle de la Côte d’Ivoire n’incombe ni à la communauté internationale, ni à une frange de la population ivoirienne hostile qui refuserait la présidence d’Alassane Ouattara, ni à la rébellion qui fut plutôt une réaction légitime à l’exclusion. Il ne s’agit ni d’une révolte d’une partie de la population ivoirienne contre une autre, ni d’un complot international ni d’une agression du néo-colonialisme. La responsabilité de la situation actuelle de guerre civile en Côte d’Ivoire en incombe entièrement et exclusivement à Laurent Gbagbo et à la coterie qui l’entoure. Elle en incombe exclusivement à leur refus de se soumettre au verdict des urnes et au principe de la majorité absolue du suffrage à l’issue d’une élection présidentielle transparente et régulière, accréditée objectivement par un processus de contrôle et de certification rigoureux et adopté consensuellement .
Imposer le partage du pouvoir comme solution sous le prétexte que 45,9 pour cent des Ivoiriens ne sont pas prêts à accepter Alassane, c’est en fait satisfaire les ambitions personnelles et les intérêts particuliers de Laurent Gbagbo ; c’est imposer les intérêts particuliers de Gbagbo au peuple ivoirien ; c’est personnaliser le problème politique ivoirien qui est un problème de principe, un problème de mode de gouvernance. Imposer le partage du pouvoir, c’est faire triompher le mauvais principe sur le bon principe ; c’est imposer la solution du pire au problème politique ivoirien qui est le problème de la lutte du principe de la majorité absolue du suffrage et de l’intérêt général contre le principe de la manipulation des suffrages et de l’intérêt particulier ; c’est imposer la solution de la spoliation politique au problème politique ivoirien qui est le problème de la lutte entre la démocratie et la dictature en Afrique.
En restaurant la suprématie de la volonté de la majorité du peuple ivoirien sur les désirs de la personne particulière qu’est Laurent Gbagbo, la décision finale de L’Union africaine rend justice aux individus qui constituent le peuple des électeurs. Cette justice initiale établit la souveraineté de l’individu prélude à une vie démocratique qui nécessitera un travail d’éducation en profondeur destiné à établir son autonomie, sa responsabilité morale et juridique, sa souveraineté face à la totalité sociale et à l’Etat. On respecte sa voix. Il décide de l’élection du Président de la République. Il est, en tant qu’individu souverain, l’acteur central de la vie politique. Sa voix compte. Il choisira les magistrats de l’Etat qu’il contrôle et qui devront lui rendre régulièrement des comptes. Il ne verra plus alors cet Etat comme une force étrangère violente et oppressive mais comme un produit de sa décision électorale. L’Etat sera sa propre création et non plus une création étrangère imposée de l’extérieur par des puissances sur lesquelles il n’a aucune prise. L’Etat ne lui apparaitra plus comme une force oppressive, spoliatrice qui peut ensuite devenir meurtrière au besoin, à l’occasion de la moindre contestation et des rébellions populaires contre l’injustice. De ce point de vue l’un des actes gravissimes du président sortant, ce crime irrémissible est d’avoir transformé l’Etat ivoirien en un instrument d’assassinat, d’incommensurable prédation et de meurtre massif des populations. Avec Gbagbo les populations ont connu vécu l’Etat ivoirien comme une puissance d’agression, de répression et de meurtre. Au pire moment de la colonisation française l’Etat colonial n’avaient pas déployé contre les populations une telle agressivité meurtrière.
Il s’agit donc de restaurer l’emprise des populations sur l’Etat au moyen de la reconnaissance du vote. Il s’agit donc d’abord de les amener à se réapproprier la politique avant de se réapproprier l’économie. La réappropriation de l’économie par les individus formant le peuple ne saurait précéder la réappropriation de la politique. Cette dernière représente, dans le cas de la Côte d’Ivoire un véritable acte de fondation de la nation ivoirienne qui doit être construite. Par cette réappropriation de la politique les individus qui constituent le peuple choisissent ceux par lesquels ils veulent être dirigés. Tel est l’acte constitutif inaugural de la souveraineté. C’est pour cela que la reconnaissance du verdict des urnes à la valeur d’un principe de fondation. Elle introduit dans le jeu politique le principe de la reconnaissance des individus comme acteurs politique à part entière. Elle consacre leur droit à la parole politique. Elle consacre la reconnaissance de leur voix comme source de la légitimité politique. C’est ainsi qu’ils pourront en tant qu’individus reconnus dans leur souveraineté « s’engager librement à construire une nation avec des droits égaux et des responsabilités égales pour tous ».
La spoliation coloniale qui a précédé les Indépendances africaines et celle des dictatures et des autoritarismes qui ont suivi les Indépendances se sont constituées en niant l’identité politique des individus soumis et dominés. Elles se sont établies sur la minorisation politique des peuples et sur la manipulation de la subordination de l’individu à la totalité sociale dans la culture traditionnelle africaine. Elles se sont édifiées sur le rejet de leur voix bâillonnée. Les dictatures ethno-coloniales qui ont succédé à l’Etat colonial ont reconduit la logique de la domination en la transformant délibérément en domination endogène dissimulée toutefois sous le camouflage efficace de l’argument de la pression et de la domination étrangères. En écrivant qu’ « en Afrique l’Etat décide et les populations se soumettent. Si l’Etat décide mal, il place les responsabilités à l’extérieur en occultant les fragilités internes. Ce n’est pas de sa faute puisqu’il est soumis à des pressions étrangères. Il suscite alors de la compassion de la part de ses populations, qui ainsi acceptent mieux leur propre soumission », Madame Dutheuil semble disculper l’Etat africain en mettant évidence ces pressions étrangère. Dans cette phrase il y a certes une reconnaissance de la dictature de l’Etat oppressif hérité de l’ordre colonial, de l’Etat comme entité étrangère et extérieure aux peuples, de l’Etat comme corps étranger que les peuples n’ont pas choisi et qui s’impose à eux contre leur gré, qui exige leur soumission à la logique de prédation qui le structure. Mais si l’Etat est soumis aux pressions étrangères qu’il relaie avec tant de facilité c’est parce qu’existe en son sein, une complicité structurelle qui le pousse à répondre avec empressement aux pressions étrangères avec lesquelles il est lié en affaire. Cette disponibilité aux pressions étrangères relève de la faute de l’Etat lui-même parce qu’il est en fait un Etat affairiste. A la logique de prédation extérieure s’ajoute une logique de prédation intérieure dont les auteurs sont le prince et les magistrats. Or contrairement à ce qu’écrit Mme Dutheuil cette soumission de l’Etat aux pressions étrangères ne suscite pas de la compassion de la part des populations. Elle suscite de la colère et de la révolte parce qu’ils se sentent trahis et abandonnés par des magistrats indifférents à l’intérêt général qui se goinfrent en complicité avec les milieux affairistes étrangers et les Etats étrangers en compétition sur le continent africain pour la conquête des marchés et concessions commerciales et qui proposent pour atteindre leurs fins des pots de vin et des gratifications diverses acceptés avec empressement par les décideurs et les attributaires des marchés publics.
Pour lutter contre cette logique de la prédation extérieure et intérieure et pour la vaincre il faut restituer aux individus constituant le peuple la souveraineté politique qui leur conférera un droit de regard décisif sur la gestion et la conduite des affaires de la cité. Contrairement au schéma classique qui fonde la politique sur l’économie, il faut donc établir l’économie sur la politique en Afrique en raison de l’histoire. Le progrès économique naîtra de la révolution politique. La libéralisation de la vie économique devra donc se fonder sur la libéralisation préalable de la vie politique.
La solution du partage du pouvoir qui viole la souveraineté des individus et le principe de la majorité absolue du suffrage, reconduit la continuité de la spoliation politique coloniale et dictatoriale. Elle s’avère contre- productive d’un point de vue économique. La dictature politique conduit à la monopolisation de l’économie par la classe politique dominante. Elle constitue un frein à l’initiative privée. Le préalable de la reconnaissance du verdict des urnes et du respect de la majorité absolue du suffrage universel s’avère donc incontournable d’un point de vue strictement économique. Elle s’avère aussi incontournable d’un point de vue social. L’individualisation nécessaire à l’émergence de l’initiative privée dont parle Mme Dutheuil n’est pas une donnée coutumière et culturelle dans le holisme africain qui valorise la totalité sociale et néglige ou subordonne l’individu. L’émergence d’une culture de la responsabilité individuelle ne peut pas se réaliser dans une société où la voix de la majorité des électeurs peut être arbitrairement rejetée. Elle ne peut que se réaliser dans le cadre d’une existence démocratique fondée sur le respect du verdict des urnes et sur l’acceptation du principe de la majorité absolue du suffrage. C’est dans le contexte de cette existence démocratique que l’individu peut s’extraire de l’emprise de la totalité sociale pour devenir un sujet juridiquement et moralement responsable capable de s’intégrer pleinement dans la modernité. Une culture politique fondée sur la dictature et sur le principe de la légitimité ethniciste et tribale n’est pas à même de favoriser l’émergence d’une individualité autonome capable d’initiative privée. Une mentalité structurée par le principe tribal de la responsabilité collective n’est pas apte à participer à la gestion d’un Etat moderne régi par le principe de la responsabilité individuelle. Le partage du pouvoir n’est donc pas la solution du problème politique ivoirien qui n’est pas un problème de personne mais un problème de principe politique, de règle de la gouvernance de l’Etat, de l’économie et de la société. Le respect du verdict des urnes et l’adoption du principe de la majorité absolue du suffrage universel s’avèrent donc incontournables dans tous les cas de figures et constituent la solution ultime du problème politique ivoirien en particulier et africain en général.
Dr Dieth Alexis
Vienne Autriche
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