L’ancien Président sud-africain, Thabo Mbeki, est formel : l’usage de la force au lieu de résoudre la crise post-électorale en Côte d’Ivoire, ne fera que l’envenimer. Dans une interview accordée, le 4 janvier dernier, à la chaîne sud-africaine South African Broadcasting Corporation (Sabc), le premier émissaire de l’Union africaine (Ua) a mis en garde contre toute intervention militaire. «Je pense que cela est dangereux parce que pouvant conduire le pays, de mon point de vue, vers la guerre civile. Toute intervention de ce type entraînerait inévitablement la guerre civile», a-t-il confié.
Thabo Mbeki s’oppose ainsi à l’option militaire qu’envisage la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) pour installer au pouvoir Alassane Ouattara et à l’opération commando que sollicite le président du Rdr pour chasser Laurent Gbagbo du pouvoir. L’organisation sous-régionale et les autres institutions internationales (Union africaine, Union européenne, Onu) ne reconnaissent que les résultats… provisoires et hors délai de la Cei qui donnent Alassane Ouattara vainqueur du scrutin; elles refusent, par conséquent, ceux… définitifs pourtant du Conseil constitutionnel qui donnent la victoire à Laurent Gbagbo, le Président sortant.
Après un séjour de 48 heures en Côte d’Ivoire (les 5 et 6 décembre dernier) à la demande de Jean Ping, président de la Commission de l’Ua, Thabo Mbeki avait annoncé les couleurs de la résolution par voie politique ou diplomatique de la crise. «Je voudrais lancer un appel, au nom de l’Union africaine, à toutes la classe politique et l’inviter à la paix. Il faut faire en sorte de préserver la paix et de donner une marge de manœuvre aux millions d’Africains, d’organisations africaines qui sont disposées à venir aider la Côte d’Ivoire pour résoudre la crise. Il ne faut pas s’engager dans des conflits qui pourraient mettre en péril la paix», avait-il averti à son départ d’Abidjan à l’issue de ses rencontres avec tous les protagonistes de la crise (Cf. Fraternité Matin n°13.824 du 7 décembre 2010).
«C’est cela notre point de vue que la seule voie qui s’offre aux leaders ivoiriens, c’est de s’asseoir et trouver une solution politique. Quelle que soit la nature de cette solution, ils doivent la négocier», a-t-il renchéri sur la Sabc.
Thabo Mbeki est sur la même longueur d’ondes que les autorités de son pays. Le 28 décembre dernier, le gouvernement sud-africain invitait les parties ivoiriennes en conflit à mettre l’intérêt du peuple au-dessus de leurs différends et à immédiatement entamer le dialogue. Le successeur de Nelson Mandela est au fait de la crise politico-militaire ivoirienne et connaît bien l’environnement et le microcosme politique ivoiriens. En novembre 2004, alors qu’il était en mission en Côte d’Ivoire pour le compte de l’Ua, il a vécu en direct les affrontements entre les Jeunes patriotes et les soldats français de l’opération Licorne, assisté à la destruction au sol de tous les aéronefs militaires ivoiriens après le bombardement, dans des circonstances jamais élucidées, du cantonnement militaire français à Bouaké.
Cerise sur le gâteau, c’est sous son inspiration, en tant que médiateur de l’Union africaine que les rebelles avaient récusé, que le dialogue direct inter-ivoirien a été engagé avant d’aboutir à la signature de l’Accord politique de Ouagadougou (Apo), en mars 2007 dans la capitale burkinabé, entre Laurent Gbagbo, Chef de l’Etat, et Soro Kigbafori Guillaume, secrétaire général de la rébellion armée. Il revient cette année encore à la charge pour avertir que quiconque propose le dénouement de l’impasse politique par la force militaire serait en train de suggérer le massacre des populations civiles en Côte d’Ivoire. Il ne prêche pas dans le désert. Son message intervient au moment où, par sa proposition du comité d’évaluation, Laurent Gbagbo tend la main du dialogue à son adversaire Ouattara pour une résolution pacifique de la crise.
FERRO M. Bally (FratMat)
Source: Sabc news
Les commentaires sont fermés.