Message au clan Gbagbo: “L’aliénation est indispensable à tout développement, à tout progrès”

CONTRIBUTION –  Par Diarra CHEICKH Oumar

 DU PANAFRICANISME COMME PARAVENT D’UNE AVERSION VISCERALE POUR L’ETRANGER

Le panafricanisme, de façon définitionnelle, s’appréhende comme une doctrine qui tend à développer l’unité et la solidarité des peuples africains. Comme mouvement politique, il vise à rendre solidaires économiquement, politiquement et culturellement les Etats africains. De façon donc quintessentielle, cette mouvance a comme socle abyssal l’idée, à l’analyse difficilement deconstructible que l’Afrique ne saurait gravir la pente du développement et du progrès dans le cadre réductionniste et inhibant de micro-Etats embarqués dans le vertige de rapports appauvrissant de répulsion mutuelle. Très tôt pénétré et édifié par cette réalité, KWAME NKRUMAH, père de l’indépendance de la République du Ghana qu’il dirigea de 1960 à 1966, s’érigea en panégyriste du panafricanisme militant et envisagea l’unité africaine comme une véritable fusion permettant à l’Afrique de devenir l’une des plus grandes forces du monde. C’est d’ailleurs dans cette optique que l’adoption à Addis-Abeba de la charte de l’organisation de l’unité africaine (OUA) en 1963 est jusque-là perçue comme l’un de ses grands triomphes, même si celle-ci se détournera très vite des visions radicales de l’un de ses pères-fondateurs. Le Professeur Joseph KI-ZERBO, un des pères de l’histoire africaine de l’Afrique note à cet effet : « Fondamentalement, je suis contre le culturalisme identitaire qui ne mène nulle part sur le plan économique. Je suis convaincu qu’on ne peut réaliser le développement dans le cadre de petits pays : le développement endogène sera interafricain ou ne sera pas » (Cf. KI-ZERBO, « culture et développement ». Conférence prononcée à l’occasion du séminaire sur les aspects sociaux du développement à Genève, le 2 novembre 1976, sous l’égide de l’Institut International d’Etudes sociales, P. 20). Et au Professeur Musa soro David de renchérir : « la chance des cultures africaines n’est pas dans le repli identitaire, c’est-à-dire dans le renfermement sur elles-mêmes » (Cf. Pr. SORO, G. A. David Musa « De la mondialisation des cultures comme une opportunité pour les cultures africaines » in Revue négro-africaine de littérature et de philosophie Ethiopiques, n°74, 2005, P. 177). L’intégration sous-régionale est donc la panacée à même de mettre fin aux maux qui rongent pernicieusement nos Etats et partant, susceptible de leur permettre de sortir de la dépression du sous-développement et de négocier avec efficience la pente ascendante du progrès. Mais précisons que s’il est impérieux pour les Etats africains de s’intégrer culturellement, politiquement et économiquement, de fédérer les énergies au nom du bien-être général, cela ne peut être porteur de réels espoirs, ontiquement bénéfique que lorsque les détenteurs de l’exécutif qui s’en font les laudateurs, les fervents théoriciens sont sincères dans leurs choix politiques et sont convaincus de l’idéal que représente ce concept, l’applique pour ce faire dans sa substantifique moelle, dans leurs faits et gestes sans roublardise, sans calcul politicien, sans papelardise. Or loin s’en faut.

Lorsqu’on est en butte à des difficultés et que l’essentiel se trouve menacé, pour amener ses compères et les pauvres populations à adhérer à sa cause, on se découvre subitement des fibres de militant indépendantiste en diffusant à satiété par le truchement des mass-médias qu’on contrôle d’ailleurs des discours fleuve et des slogans creux truffés de contrevérités et inutilement acrimonieux à l’endroit des populations allogènes abusivement incriminées comme étant ceux qui ont ouvert la boîte de pandore occasionnant pour ainsi dire tous les maux et malheurs qui minent la Côte d’Ivoire. Et pis, sans la moindre preuve vraiment digne de crédit, les éternels nervis, chiens de guerre et stipendiés sont actionnés à coup de billets de banque et déversés dans toutes les aires géographiques du pays en vue de débusquer et exterminer littéralement à l’aide de machettes, de gourdins, d’armes à feu l’ennemi venu d’ailleurs dans l’unique but de déstabiliser et d’installer la chienlit dans le pays.

Nous aimerions ici faire remarquer au Christ de Mama, ex-Président, puisque c’est de lui qu’il s’agit, concepteur de l’étrange et cabalistique idéologie de la refondation des tropiques aux relents fétides et cataclysmiques, qu’il relève du fantasme que de vouloir emboucher concomitamment les flûtes du panafricanisme et d’un ultranationalisme délirant. Cette supercherie politique à laquelle vous vous êtes livré durant votre règne et que vous avez fini par ériger en norme existentielle était trop grotesque et flagrante pour ne pas être perçue, même par le dernier des imbéciles. Obnubilé par la quête effrénée et obsessionnelle de dividendes politiques et de soutiens extérieurs en cas d’aria, vous n’hésitiez pas à vous lancer de façon diurne sur la pente apologétique en exaltant le bien-fondé d’une intégration sous-régionale, en magnifiant les vertus fortifiantes et fédératrices du panafricanisme comme seule arme susceptible de permettre à l’Afrique de s’arracher de la mamelle de l’occident et de s’assumer pleinement. A la tombée du crépuscule, le masque de militant panafricaniste était mis sous le boisseau pour s’affubler cette fois de celui de la flagornerie et du ‘’leche-bottisme’’ en sollicitant par le biais de manœuvres obséquieuses, avec le profil très bas l’aide internationale et surtout celle de la France en lui concédant en contrepartie tous les pans et fleurons de l’économie de notre Pays à coups de signatures et de décrets.

Qui l’eut cru ! Il y a seulement quelques années de cela, vous et vos affidés traitiez, à travers le martyre et les humiliations qui lui étaient quotidiennement infligés, le burkinabé comme un être inférieur, un animal, une chose ne méritant donc aucune considération ni la moindre attention. Après avoir certainement réalisé l’invincibilité de la rébellion parce qu’ayant fait feu de tout bois de façon vaine et à la faveur de l’accord de Ouagadougou, comme par un tour de magie, le burkinabé, naguère illégalement dépossédé de ses terres, de ses plantations, pourchassé à travers le pays et quelquefois même froidement abattu était devenu si fréquentable et si adulé au point même qu’un quidam en mal de gloire dénommé Kima Emile, à qui d’importants moyens avaient été donnés, sillonnait le Pays pour vilipender Monsieur Alassane Dramane OUATTARA et le présenter comme le pourfendeur, celui qui est à l’origine de la misère de la communauté burkinabé et de toute la CEDEAO dans ce Pays, en créant la carte de séjour. Si le ridicule tuait ! Comme si le peuple ivoirien n’avait pas de mémoire ! Pendant les heures chaudes, Monsieur Alassane Dramane OUATTARA reste et demeure celui-là qui s’est toujours battu pour les intérêts et la sécurité des étrangers, sans exclusive. Jugez-en vous-mêmes : entre se confectionner une carte de séjour à moindre coût et circuler librement et ne détenir qu’une carte consulaire et débourser des sommes faramineuses indûment empochées par des hommes en treillis véreux à chaque coin de rue, nous pensons qu’il n’y a pas de comparaison possible.

C’est justement pour mettre fin à ces genres de dérives graves et inqualifiables que la carte de séjour a été pensée et actualisée par Monsieur Alassane Dramane OUATTARA démontrant une fois de plus ses prévenances vis-à-vis des populations allogènes et ses qualités de dirigeant, de gestionnaire émérite. Qui plus est, cela est une exigence pour tous les Etats qui se veulent modernes : contrôler le flux migratoire pour une meilleure prise en compte sociale des populations nationales comme immigrées, chose qu’ont ignoré nos socialistes des tropiques qui naviguaient à vue et qui n’avaient d’yeux que pour la prévarication, la prédation folle et ignominieuse des deniers publics, bref l’enrichissement illicite au grand dam des populations astreintes à un dénuement inhumain. Diantre ! Quel est donc ce régime politique pour qui il n’y a aucune place pour l’éthique dans la gestion des hommes, qui marchande tout, pour qui rien n’est désintéressé ? Nous parions fort que derrière la décoration des cadets ghanéens ayant remporté la coupe du monde de football dans leur catégorie présentée comme s’inscrivant dans la droite ligne de l’intégration sous-régionale se cachaient des visées politiques inavouées. Mais cette énième escroquerie intellectuelle et morale a visiblement échoué parce que le panafricanisme ne signifie pas dimorphisme politique, xénophobie, ultranationalisme, exclusionnisme, exécutions sommaires et extrajudiciaires de populations étrangères pour des délits souventes fois non constitués. Bien au contraire, vous auriez gagné à cultiver un panafricanisme vrai affranchi de calculs sous-jacents qui ne consiste pas dans un renfermement orgueilleux et suffisant sur soi-même mais dans la rencontre de l’altérité comme condition pour grandir, pour devenir une Nation forte et concurrentielle à tout point de vue. Rien ne sert de bomber le torse, de diffuser à flots des discours hostiles à tout ce qui vient de l’extérieur, de ruer dans les brancards contre les puissances occidentales par le truchement de piètres journalistes aux ordres et étalant une méconnaissance criante des canons de leur métier le jour et la nuit, rentrer dans ses petits souliers parce que mû en ce moment par des raisons stomacales et pécuniaires.

Cher ex-Président, opérez très vite votre adaptation au progrès car votre vision de ce monde en mouvement, très dynamique est anachronique. Il y a belle lurette que nous avons fini avec ces vieilles rengaines anti-colonialistes, ces ritournelles indépendantistes. Aujourd’hui, ce qui s’impose à nous comme défis, sont ceux inhérents au développement, au progrès avec des retombées matérielles bénéfiques pour les populations. Ce slogan ‘’indépendance totale’’ que vous, vos disciples et pseudo-intellectuels avez diffusé à longueur de journée sur nos antennes nationales est vide de sens quand on a une bonne compréhension du fonctionnement du monde, des relations internationales. Ce monde est ordonnancé de telle sorte qu’on n’est jamais totalement auto-suffisant, autonome si bien qu’on se trouve arrimé d’une manière ou d’une autre à un autre, plus petit ou plus grand que soi. C’est la loi du monde et il ne pouvait en être autrement sinon le monde ne serait pas. D’ailleurs, qui qu’on soit, n’est-on pas plus ou moins influencé, conditionné dans sa façon de penser, d’agir, de concevoir le monde, de manger, de faire l’amour etc. par des modèles dans la vie ? L’aliénation n’est-elle que péjorative, négative ? La vérité est que pour grandir, cher ex-Président, il est quelquefois nécessaire de s’aliéner. C’est ce qu’a bien montré le philosophe allemand Georg Wilhelm Friedrich HEGEL. En effet, HEGEL a fait de l’aliénation la condition pour grandir, pour évoluer. Ce qui revient à dire que pour devenir, il faut nécessairement passer par le stade du devenir-autre. L’aliénation est donc indispensable à tout développement, à tout progrès. Il y a donc aliénation quand il y a évolution qui coïncide avec une perte d’identité. Vivement, cher ex-président, faites votre aggiornamento, débarrassez-vous des vieux clichés, des réflexes éculés pour fondre harmonieusement avec les exigences de la modernité !

DIARRA CHEICKH OUMAR
Professeur certifié de philosophie
Etudiant en instance de thèse
Sciences politiques
Cel : 05 87 44 48 / 03 61 80 88
Email : sekdiasek@gmail.com

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