Par Pierre COCHEZ | à Abidjan la-croix.com
Au lendemain du second tour de l’élection présidentielle ivoirienne, chacun faisait ses comptes lundi 28 novembre. En fin d’après midi, la Commission électorale indépendante (CEI) indiquait que le taux de participation se situait autour de 70%, en baisse par rapport au premier tour le 31 octobre (83%).
Au centre départemental de la CEI d’Abobo, dans le nord d’Abidjan, on calculait les voix des deux candidats, à partir des procès-verbaux, arrivés dimanche soir depuis les bureaux de vote. « Nous en avons jusqu’à mardi après-midi. Le couvre-feu décrété par la présidence nous a retardés » estimait un membre de la CEI.
Plus loin, plusieurs centaines de personnes attendaient d’être payées. « J’ai présidé un bureau de vote. Je suis ici depuis la nuit de dimanche pour toucher les 15 000 francs CFA (23€) que l’on m’a promis » protestait Léon. Dans les hôtels du quartier du plateau, les observateurs internationaux comptabilisaient les incidents dont ils avaient été témoins.
«Le vote s’est globalement déroulé dans un climat démocratique»
Pendant ce temps, à la télévision, le ministère de l’intérieur égrainait les violences qui avaient touché les représentants de la majorité présidentielle (LMP) soutenant Laurent Gabgbo. Au siège de l’Onuci, le représentant de l’ONU dans le pays, Young-Jin Choi, confirmait la mort de trois personnes dimanche dans l’ouest du pays.
« Le vote s’est globalement déroulé dans un climat démocratique », a-t-il estimé. Plus précis, en aparté, un militaire de la force onusienne résumait la situation : « le Nord du pays est monocolore, tout le monde vote Ouattara. Alors forcément, c’est plus calme qu’à l’Ouest où les votes se partagent un peu plus entre les deux candidats. »
À Abidjan, on pouvait faire dimanche une constatation approchante. Chacun des deux candidats avait ses fiefs bien marqués, où il recueillait au moins 70% des voix. Côté Gbagbo, les « jeunes patriotes », tee-shirt noir et serviette de bains blanches, veillaient au dehors des bureaux de vote qui leur étaient acquis.
«De toute façon, « ils » sont minoritaires !»
À l’intérieur, le décompte se faisait sous le regard des représentants des deux partis. Côté Ouattara, les imams n’étaient pas loin et des jeunes exigeaient d’ouvrir les coffres des voitures, pour vérifier qu’ils ne contenaient pas des urnes remplies.
Alors que les procédures de vote et de dépouillements semblaient s’être passées correctement, avec la présence de membres du parti adverse dans chaque bureau, le transport des résultats était en revanche l’objet de toutes les suspicions.
Pour calmer les esprits, les forces de l’Onuci assuraient le transport des procès-verbaux jusqu’à la CEI, depuis les bureaux de vote pour les régions d’Abidjan et de Bouaké ; depuis les sous-préfectures pour le reste du pays.
Dans la nuit de dimanche, avant le couvre-feu fixé à 22 heures, ils étaient nombreux du parti d’Alassane Ouattara à s’être donné rendez-vous devant la CEI départementale. Une femme en abaya (voile) noire, connaissait les vainqueurs : « C’est nous, car de toute façon, « ils » sont minoritaires ! », le « ils » regroupant les partisans du président sortant.
La CEI s’est engagée à diffuser les résultats au fil de l’eau
Lundi, Abidjan vivait au ralenti. On était sur un faux rythme, sur une sorte de faux plat dont on ne connaissait pas la longueur. Dans la villa colossale d’un ancien directeur des douanes, la CEI travaillait, sous le regard de quelques-uns des 400 observateurs étrangers.
La loi électorale donne trois jours à la commission pour rendre ses résultats, soit une date limite de demain 17 heures. Elle donne le même délai pour les éventuelles réclamations, qui se préparaient. Afin d’éviter les rumeurs qui avaient envahi la Côte d’Ivoire pendant ce « tunnel », la CEI s’est engagée à diffuser, pour ce second tour plus tendu, les résultats au fil de l’eau.
« Elle peut travailler rapidement, si elle utilise les scanners pour transmettre les résultats depuis les bureaux départementaux de la CEI. Mais, elle ne semble pas vouloir les utiliser » explique une observatrice du Carter Center, l’ONG de l’ancien président américain Jimmy Carter, qui s’est notamment spécialisé dans la supervision des élections dans le monde.
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