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scène se passe à Man, dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. En 2002, la ville se trouvait dans la zone contrôlée par le mouvement rebelle.
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“Si je gagne ces élections, je les gagnerai pour vous”, lance-t-il.
L’ancien professeur d’histoire est à la tête de l’Etat ivoirien depuis 2000. Son quinquennat a duré dix ans, dix années au cours desquelles la Côte d’Ivoire a connu une brève guerre civile puis la division entre le Sud, tenu par le président, et le Nord, contrôlé par les rebelles du Mouvement populaire de Côte d’Ivoire (MPCI).
L’incapacité des ex-belligérants à s’entendre sur la constitution des listes électorales et les difficultés logistiques ont différé à de multiples reprises l’élection présidentielle dont le second tour, avec cinq ans de retard sur le calendrier institutionnel, aura finalement lieu dimanche.
Pendant cette décennie, l’économie ivoirienne a stagné, les infrastructures se sont dégradées, la pauvreté a gagné du terrain. Mais l’aura et la confiance en lui-même de Laurent Gbagbo semblent intactes.
“Il est le seul qui comprenne la population ordinaire”, dit Amara Sanogo, jeune chauffeur de taxi croisé au meeting de Man.
SONDAGES FAVORABLES
A 65 ans, Laurent Gbagbo est défié dans les urnes par l’ex-Premier ministre et ancien directeur général adjoint du FMI Alassane Ouattara.
Les enjeux sont de taille: une élection paisible pourrait ramener les investissements en Côte d’Ivoire, moderniser la filière du cacao et permettre à l’ancienne colonie française de renouer avec son statut de “poumon économique” de la région.
De nombreux observateurs estiment que si Laurent Gbagbo, après avoir traîné des pieds pendant des années, a validé par décret les listes électorales, rendant possible la tenue du scrutin, c’est parce qu’il est convaincu de pouvoir l’emporter.
“Il n’est pas du genre à organiser des élections dans des circonstances qui pousseraient à sa défaite. Il détient la plupart des cartes”, avance Mark Schroeder, analyste chez Stratfor, soulignant la loyauté de l’armée à son égard dans le sud du pays, où se trouve la capitale économique du pays, Abidjan.
“OPPOSANT HISTORIQUE”
Né en mai 1945 et issu de l’ethnie Bété, dans le centre-ouest du pays, Laurent Gbagbo s’est fait connaître par son statut d’”opposant historique” au règne de Félix Houphouët-Boigny, le père de l’indépendance qui a dirigé le pays de 1960 jusqu’à sa mort, en 1993.
Détenu dans un camp militaire de mars 1971 à janvier 1973, ce radical marxiste a ensuite connu l’exil en France de 1982 à 1988. A son retour, il milite pour le multipartisme et, grâce à la pression qu’exercent ses partisans dans la rue, obtient en 1990 la première élection présidentielle pluraliste.
Malgré la défaite, ses partisans notent qu’il ressort “auréolé du prestige d’avoir été le seul à affronter le président Félix Houphouët-Boigny”.
Dix ans plus tard, il est de nouveau candidat à l’élection présidentielle qui doit rétablir un régime civil en Côte d’Ivoire, qui vit depuis fin 1999 à l’heure d’une junte militaire. Ses partisans descendent par milliers dans les rues pour contester l’annulation du scrutin par le général putschiste Robert Gueï.
Dans la confusion qui s’ensuit, Laurent Gbagbo prend la présidence et tient sa promesse: “Nous devons arrêter le pouvoir militaire”, avait-il annoncé pendant la campagne.
LA CARTE DU PATRIOTISME
Mais le répit est de courte durée.
En septembre 2002, des soldats tentent de le renverser. Bien que le coup d’Etat soit mis en échec, le pays se déchire. La brève guerre civile fait place à un lent processus de paix et une crise politique qui couve pendant des années.
Parallèlement, Laurent Gbagbo joue la carte du patriotisme en s’en prenant à la France, ancienne puissance coloniale.
Il accuse Jacques Chirac et son ministre des Affaires étrangères de l’époque, Dominique de Villepin, de l’avoir contraint à accepter un accord de partage du pouvoir avec les rebelles du MPCI. Plus tard, après l’élection de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, il assurera que Jacques Chirac voulait le renverser.
La tension monte entre Abidjan et Paris, qui a déployé plusieurs milliers de soldats dans le cadre d’une mission de “sécurisation” des accords de janvier 2003.
En novembre 2004, neuf soldats français de l’opération Licorne sont tués dans un raid de l’aviation gouvernementale contre la ville rebelle de Bouaké. Paris riposte en neutralisant l’aviation ivoirienne.
La suite met en lumière une des bases du pouvoir de Laurent Gbagbo: la rue. En quelques jours, des dizaines de milliers de “Jeunes patriotes” s’en prennent aux intérêts de la communauté française. Paris évacue 8.000 expatriés.
En campagne pour sa réélection, Laurent Gbagbo reste fidèle à la carte du patriotisme et du nationalisme, continue d’accuser la France d’avoir soutenu la rébellion en 2002-2003 et assure que ses adversaires sont à la botte de l’ancienne puissance coloniale.
“Il y a deux genres de candidats en Côte d’Ivoire, un pour la Côte d’Ivoire, l’autre pour l’extérieur”, dit-il.
Henri-Pierre André pour le service français, édité par Gilles Trequesser
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