Non reconnaissance de la double nationalité en Côte d’Ivoire, il est temps de sortir de l’hypocrisie

En Côte-d’Ivoire, l’article 48 du Code de la nationalité stipule qu’un Ivoirien qui acquiert volontairement une autre nationalité perd automatiquement la sienne. Cette disposition, méconnue du grand public, est pourtant un couperet silencieux pour des milliers d’Ivoiriens de la diaspora. Elle est aussi, à bien des égards, une hypocrisie d’État.

Nombreux sont les Ivoiriens qui, pour des raisons professionnelles, familiales ou administratives, ont acquis une autre nationalité. Ont-ils cessé d’être Ivoiriens pour autant ? Certainement pas. Pourtant, la loi les considère comme tels. Résultat, ces citoyens de cœur et d’attachement se retrouvent exclus de droits fondamentaux, notamment celui d’hériter du foncier rural, réservé aux seuls nationaux. Une injustice criante, d’autant plus absurde que ces mêmes personnes continuent souvent d’investir, de construire, de contribuer au développement du pays.

Le plus frappant, c’est que cette exclusion est appliquée à géométrie variable. Prenons l’exemple de notre équipe nationale de football, une majorité de ses membres possède une double nationalité. Si l’on appliquait strictement l’article 18, ils ne seraient plus Ivoiriens. Et pourtant, ils défendent nos couleurs avec fierté, parfois plus que ceux qui n’ont jamais quitté le territoire. L’un des plus emblématiques d’entre eux est notoirement Français. Mais qui oserait lui contester son  » ivoirienneté » ? Cette contradiction illustre l’ampleur du décalage entre la loi et la réalité.

La double nationalité ne doit pas être perçue comme une trahison, mais comme une opportunité. Elle permet de mobiliser des talents, des ressources, des réseaux. Elle est un pont entre la Côte d’Ivoire et le monde. Elle est une force, pas une menace. Être Ivoirien et citoyen d’un autre pays ne devrait pas être une malédiction juridique, mais un levier d’enrichissement culturel, social et économique.

Il est temps que la Côte d’Ivoire sorte de cette incohérence. Il est temps que la loi reconnaisse ce que la société vit déjà, la double nationalité est une réalité. Elle doit être consacrée, non comme une exception, mais comme un droit. Un droit pour tous les Ivoiriens, où qu’ils soient, de rester pleinement Ivoiriens.

La réforme du Code de la nationalité n’est pas une faveur. C’est une exigence de justice, de cohérence et de modernité.

Jean Paul Oro

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