CEDEAO: une organisation vieillie qui signe sa mort au Dahomey

La CEDEAO, déjà fragilisée par des années d’errance stratégique, vient d’offrir au continent un nouvel épisode révélateur de son déclin. Incapable de réagir en Guinée-Bissau lors du renversement du président Umaro Sissoco Embaló, l’organisation régionale trouve soudainement les moyens — et la volonté — de déployer des troupes au Bénin.

Dimanche soir, dans un communiqué solennel, la CEDEAO a annoncé l’« ordre de déploiement immédiat » d’éléments de sa Force en attente. Ces contingents, issus du Nigeria, de la Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire et du Ghana, sont mandatés pour soutenir « le gouvernement et l’armée républicaine du Bénin » et « préserver l’ordre constitutionnel ».

Une décision qui provoque perplexité et indignation, tant l’organisation semble désormais incapable d’une ligne géopolitique cohérente.

Interventions sélectives, crédibilité en lambeaux

La Force en attente est censée garantir la paix et la stabilité dans la région. Elle s’était illustrée en 2017 en Gambie pour contraindre Yahya Jammeh à céder le pouvoir. Mais depuis, la machine s’est grippée.

En 2023, face au putsch au Niger, la CEDEAO avait reculé après des menaces d’intervention restées sans suite. En Guinée-Bissau, elle s’est montrée totalement absente, laissant un pays membre s’enfoncer dans le chaos institutionnel.
Mais au Bénin — ex-Dahomey — elle retrouve soudain une vigueur, une hardiesse et une rapidité d’action qui interrogent.

Cette logique à géométrie variable alimente l’idée que la CEDEAO n’agit plus comme une institution communautaire, mais comme le bras armé d’intérêts extérieurs, notamment ceux de Paris, d’Abidjan et d’Abuja.

Un divorce consommé entre peuples et dirigeants régionaux

L’Union africaine a, elle aussi, condamné « fermement et sans équivoque » la tentative de coup d’État au Bénin. Mais la simple condamnation ne suffit plus. Les peuples ouest-africains, de plus en plus sceptiques, voient en la CEDEAO un organisme dépassé, aligné, coupé de ses populations et incapable d’incarner une souveraineté régionale véritable.

Au moment où plusieurs États — Mali, Burkina Faso, Niger — ont claqué la porte pour créer l’AES, la décision d’intervenir au Bénin apparaît pour beaucoup comme l’acte de trop.

Un aveu de faiblesse, déguisé en démonstration de force.

Jadis moteur de l’intégration ouest-africaine, la CEDEAO semble aujourd’hui errer sans boussole, embourbée dans ses contradictions et ses calculs politiques.

Au Dahomey, elle signe peut-être le début de sa fin.

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