Tribune/Crises à répétition : Qu’est-ce qu’il faut réellement à la Côte d’Ivoire ? (2e Partie)

Allons en profondeur des problèmes – Les Conséquences de l’application du Système Politique Postcolonial

Le système politique actuel est simplement une sorte de re-colonisation, une colonisation qui a changé d’aspect, de forme, de visage et de méthodes pour satisfaire les mécontents ivoiriens. C’est de la colonisation déguisée. C’était un arrangement politique et le Président Houphouët disait ceci “Ce que nous signons aujourd’hui n’est pas bon et nous le savons. Nous comptons sur les générations futures pour améliorer ces accords “. C’était un transfert partiel des pouvoirs bien limités. Il fallait accepter cette indépendance à la française quoique fallacieuse que d’affronter les colons militairement. 

On s’étonne que le Président Ouattara aille consulter au palais de l’Elysée avant toutes décisions majeures. Non on ne devrait pas lui en vouloir il est un bon élève dans l’application de ces accords  Le Président ADO ne fait qu’appliquer les accords d’indépendance, n’en déplaise à l’ex-président Gbagbo. Tout parti qui arrive au pouvoir ne fait et ne fera que les mêmes interprétations de la constitution actuelle avec les pleins pouvoirs au Président de la République pendant que l’ancien colonisateur lui détient toujours les avantages des accords conclus. L’un protège l’autre et vice-versa. Tout régime qui vient est obligé de se référer à ces accords ou disparaît.

Aujourd’hui les temps ont évolué et l’adaptation de ces accords s’impose à nous tous. L’initiative de la révision de ces accords doit venir exclusivement de nous, Africains et ivoiriens notamment car c’est nous qui sommes défavorisés dans ces accords. C’est nous que ces accords dérangent et donc c’est à nous d’inviter l’autre partie à la table de discussion pour une réévaluation après plus de 65 ans de cohabitation malsaine.

La corruption a gagné tout le pays, toutes les couches socio-économiques du pays. Les abus des autorités, le gaspillage des deniers publics, le manque de contrôle rigoureux dans la gestion des fonds publics, la caporalisation des médias d’Etat dans lesquels le parti au pouvoir règne en maître sans partage. Les étrangers se frottent les mains dans des enrichissements illicites tandis que les Ivoiriens ne comprennent rien. La mainmise sur le système judiciaire où tout est corrompu tout comme l’armée, l’épine dorsale du système. Le pays est géré sans un contre pouvoir.

Le Président de la République est tout puissant, règne sans partage sur le pays donc tous ses proches bénéficient de son parapluie et commettent des exactions incontrôlables et impunies. Le rattrapage ethnique dans l’armée, dans toute l’administration, et dans tous les secteurs d’activités, la corruption, les vols, l’injustice, partis politiques claniques comme déjà dénoncés et dont le dosage varie d’un leader politique à un autre mais qui demeurent claniques tout de même d’un régime à un autre. Ce système et ses partis politiques qui parviennent au pouvoir réduisent l’opposition au silence.

Toutes les sociétés africaines sont caractérisées par l’insoumission, le manque de courtoisie, l’absence du service à la clientèle, l’impolitesse, l’arrogance de leurs populations. Le président et ses proches en sont les porte-flambeaux tandis que les autres couches de la société demeurent les victimes du système.

Il faut du courage pour dénoncer ces tares, cette indépendance corrompue dans notre société. Faisons en sorte que la France ait affaire au peuple de Côte d’Ivoire et non à un individu appelé président. Il faut que les pouvoirs du peuple qu’il détient soient rétribués entre les autres institutions du pays.

Il ne doit plus manipuler qui que ce soit et la France non plus ne pourra plus s’appuyer sur lui pour la protection de ses intérêts. Il y a des abus de tout genre par les membres du gouvernement et des institutions, des parents et amis parce qu’ils ont tous des attaches à la présidence qui demeure leur parapluie. Ce qui est dénoncé ici ce n’est ni Houphouët, ni Bedie, Guei, Gbagbo, ni même Ouattara. Ce sont des individus qui passent. Nous dénonçons le système politique post colonial qui nous gouverne. Tous ces messieurs que nous venons de citer ne font que profiter du système car ils n’ont tous rien compris que c’est contre le développement de notre pays.

Il nous faut revisiter ces accords en Afrique. Ceci étant, la France sera invitée à la table de négociation pour la révision des accords d’indépendance. C’est ainsi qu’on aura deux bénéfices : des pays démocratiques débarrassés du système présidentiel tout puissant. Le deuxième bénéfice est qu’on aura des pays beaucoup plus souverains dans leurs prises de décisions de développement. Le système politique post colonial n’est rien d’autre que l’esclavage ou le colonialisme déguisé et modernisé.

Il est l’incarnation de la corruption qui sévit dans nos Etats. C’est un deal de corruption. Il faut dénoncer ces accords d’indépendance et procéder à leurs ajustements pour partir sur de nouvelles bases. Mais il y a un préalable à cela. Il faut une constitution impersonnelle et équilibrée qui réduit considérablement les pouvoirs du Président de la République. Il nous faut une constitution transparente parce que le problème est beaucoup plus interne qu’externe qu’on ne le pense. Le président en exercice s’oppose à la révision de ces accords car souvenez-vous, c’est lui qui les protège selon leur deal.

Les récents développements au Mali, Burkina Faso, Niger, Tchad, et Sénégal s’inscrivent dans une dynamique régionale où l’Afrique cherche à redéfinir ses relations avec l’ancienne puissance coloniale. La jeunesse, en particulier, incarne cette aspiration à une indépendance véritable, une Afrique maîtresse de son destin. Nous estimons que nos constitutions depuis 1960 sont nos réels problèmes parce qu’elles sont fondées sur l’esprit des accords d’indépendance avec le culte de la personnalité ce qui rend les autres institutions très faibles. Les constitutions ivoiriennes cherchent à faire plaisir aux leaders du moment alors que la constitution doit être écrite sans complaisance et dans l’intérêt du pays tout entier.

Ainsi, jusqu’en 1990, le PDCI gérait seul le pays depuis 1960. C’est en cette année 1990 que les opposants venus de l’Université de Cocody ont profité du vent de l’Est avec la tombée du mur de Berlin et la Conférence de la Baule en France pour exiger non pas la démocratie mais le multipartisme. Le multipartisme a donc été obtenu. Mais et après?

Ne vivons-nous toujours pas comme au temps du parti unique ? Celui qui est au pouvoir contrôle tout sans contre-pouvoir (l’armée, le trésor, la communication, la justice, le parlement, le sénat, etc.) ? Celui qui est au pouvoir (PR) n’a pas de salaire fixe, s’octroie un fonds de souveraineté. Des partis politiques d’opposition existent certes mais qui sont l’ombre d’eux-mêmes. Le Président de la République s’octroie donc un fonds de souveraineté dont le montant varie et est décidé à sa guise. Il nomme qui il veut sans avis de qui que ce soit, nomme une partie des sénateurs, contrôle tout sans rendre compte à qui que ce soit, est obligé de se rendre constamment en France pour rendre compte selon l’esprit des accords d’indépendance. En troisième partie nous parlerons de nos institutions notamment la constitution, l’exécution, la commission électorale, le système judiciaire.

Dr. Charles Koudou, Administrateur de la Santé

Consultant en Santé et Développement

koudoucharles@gmail.com

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