Côte-d’Ivoire : Gbagbo va-t-il appeler les Ivoiriens à mettre fin à « l’imposture » ? Habiba Touré appelle à une nouvelle journée de mobilisation

À dix jours du premier tour de la présidentielle, la Côte d’Ivoire vit sous haute tension. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux ce mardi 14 octobre, Habiba Touré, porte-parole de Laurent Gbagbo, adopte un ton incisif, voire « agressif », en appelant à une nouvelle journée de mobilisation populaire du Front commun, coalition inédite PDCI–PPA-CI.

Habiba Touré défie le pouvoir

En contestant la légitimité du Conseil national de sécurité à interdire les manifestations politiques, Maître Habiba Touré retire au gouvernement son principal argument légal. « Nulle part dans les prérogatives de cet organe n’existe le droit d’interdire des rassemblements politiques », affirme-t-elle, invitant militants du PPA-CI et « tous les démocrates » à descendre pacifiquement dans la rue pour dénoncer ce qu’elle qualifie de « confiscation du processus électoral ».

Son message, largement relayé sur les réseaux sociaux, fait écho à celui du Front commun, qui annonce une nouvelle grande marche nationale dans les prochains jours.

Une opposition galvanisée par la rue

Depuis le lancement de la campagne présidentielle le 10 octobre, plusieurs manifestations spontanées ont éclaté dans les bastions de l’opposition à Abengourou, Yopougon, Gagnoa ou Daoukro. À chaque fois, les forces de l’ordre sont intervenues, utilisant gaz lacrymogènes et dispersant les rassemblements.

Loin de décourager les militants, cette répression semble renforcer leur détermination. « La rue redevient le seul espace d’expression », note un politologue ivoirien. « Le Front commun capitalise sur le sentiment d’exclusion né du rejet des candidatures Gbagbo et Thiam. L’appel d’Habiba Touré traduit la volonté de reprendre l’initiative face à un pouvoir qui verrouille les institutions. »

Un pouvoir sur la défensive

La réponse du gouvernement ne s’est pas fait attendre. Plusieurs témoins rapportent la présence, dimanche soir, d’un important dispositif de police devant la résidence de Pascal Affi N’Guessan, président du FPI, à Cocody-Angré, officiellement pour protéger l’ambassade du Cameroun voisine. Pour l’opposition, il s’agit d’un message d’intimidation. Le domicile de Noël Akossi Bendjo, vice-président du PDCI, aurait également été surveillé.

Cette montée en puissance de la répression s’inscrit dans un climat préélectoral marqué par l’exclusion de figures majeures de l’opposition, des arrestations de militants et des manifestations interdites. Le gouvernement d’Alassane Ouattara campe sur une lecture stricte de la loi, tandis que ses adversaires dénoncent une dérive autoritaire.

Vers une confrontation inévitable

À dix jours du scrutin du 25 octobre, l’enjeu dépasse la simple compétition électorale. Le Front commun mise sur la rue comme levier politique, tandis que le RHDP cherche à éviter tout scénario de chaos susceptible de remettre en cause la crédibilité du processus électoral.

Les appels répétés à manifester laissent planer le risque d’une confrontation directe entre forces de l’ordre et militants. Habiba Touré insiste toutefois sur le caractère « pacifique » mais déterminé de la mobilisation : « Nous ne céderons pas à la peur. Le peuple doit reprendre sa voix et défendre sa dignité. »

Dialogue ou confrontation : la Côte d’Ivoire à la croisée des chemins

Alors que la Commission électorale et le Conseil constitutionnel tentent de préserver les apparences d’un processus maîtrisé, la rue ivoirienne redevient, comme en 2000 et 2010, l’arbitre des colères et frustrations politiques. Le pays semble glisser vers une nouvelle crise de légitimité : un pouvoir sûr de sa légalité face à une opposition convaincue de sa légitimité populaire.

La prochaine marche annoncée par le Front commun constituera un test décisif pour les deux camps : celui de la mobilisation pour l’un, principalement pour Laurent Gbagbo, et celui de la maîtrise du terrain pour l’autre. Mais au-delà des calculs partisans, un mot d’ordre domine désormais : dialogue ou confrontation.

Côte-d’Ivoire: quand le CNS interdit aujourd’hui ce que le RHDP contestait hier

Commentaires Facebook

Laisser un commentaire