ONU: Washington coupe les vivres, un quart des Casques bleus sur le départ

Les Nations Unies s’apprêtent à réduire d’environ un quart leurs effectifs de maintien de la paix dans les prochains mois. En cause : la décision des États-Unis de Donald Trump de diminuer drastiquement leur contribution au budget onusien, plongeant plusieurs missions dans l’incertitude.

Des coupes budgétaires sans précédent

Traditionnellement, Washington assure environ 25 % du financement des opérations de maintien de la paix de l’ONU. Pour l’exercice 2025-2026, cette part représentait 1,3 milliard de dollars (environ 1,1 milliard d’euros) sur un budget global de 5,4 milliards. Mais la Maison-Blanche a ordonné une coupe massive dans les dépenses extérieures, incluant les contributions aux Nations Unies et à l’aide au développement.

Résultat : l’ONU doit faire face à un déficit de financement estimé à plus de 2,4 milliards d’euros. Les États-Unis ont certes promis un versement partiel de 680 millions de dollars, mais cela ne suffira pas à éviter une réduction significative des effectifs.

Neuf missions directement affectées

Selon un haut responsable onusien, la mesure concernera entre 13 000 et 14 000 Casques bleus, policiers et personnels civils, répartis dans neuf missions :

République démocratique du Congo (MONUSCO)

République centrafricaine (MINUSCA)

Soudan du Sud (MINUSS)

Abyei, zone disputée entre le Soudan et le Soudan du Sud

Liban (FINUL)

Kosovo (MINUK)

Chypre (UNFICYP)

Sahara occidental (MINURSO)

Plateau du Golan (UNDOF)

Ces missions, cruciales pour la stabilité de régions fragiles, devront revoir leurs mandats à la baisse. Certaines pourraient même être fusionnées ou mises en veille, selon les arbitrages du Secrétariat général.

Une menace pour la stabilité mondiale

« Nous savons que cela aura des conséquences sur la surveillance des cessez-le-feu, la protection des civils et la coopération avec les ONG humanitaires », a averti un haut fonctionnaire de l’ONU à New York.

La réduction des effectifs pourrait fragiliser plusieurs zones déjà sous tension, notamment en Afrique centrale. En RDC et en Centrafrique, les Casques bleus jouent un rôle essentiel dans la protection des populations et la sécurisation des processus électoraux. Un désengagement de l’ONU pourrait ouvrir la voie à une résurgence des milices locales et des groupes armés.

Une décision aux relents politiques

Cette décision s’inscrit dans la continuité de la politique isolationniste de Donald Trump, qui accuse depuis longtemps l’ONU de « dilapider l’argent américain pour des causes inutiles ». Le président républicain avait déjà réduit la contribution des États-Unis à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et suspendu plusieurs programmes de coopération internationale jugés « trop coûteux ».

Pour de nombreux analystes, il s’agit d’un message politique adressé à la communauté internationale : les États-Unis entendent recentrer leurs priorités sur leurs intérêts nationaux, quitte à affaiblir le multilatéralisme.

Des conséquences directes pour l’Afrique

En Afrique, où sont concentrées plus de la moitié des missions de maintien de la paix, les conséquences pourraient être dramatiques. La MONUSCO en RDC, déjà en phase de retrait, risquerait d’être écourtée dans un contexte de recrudescence des violences dans l’est du pays. En Centrafrique, la MINUSCA peine déjà à maintenir l’ordre face à la montée des groupes rebelles et aux influences étrangères.

Cette nouvelle contraction des moyens internationaux pourrait contraindre les États africains à renforcer leurs propres dispositifs régionaux de sécurité — un défi financier et logistique de taille.

Un tournant pour le multilatéralisme

Avec cette réduction sans précédent des Casques bleus, c’est l’efficacité même du système de sécurité collective mis en place après 1945 qui se trouve questionnée. Entre réalignement géopolitique, crises budgétaires et montée des politiques nationalistes, l’ONU traverse l’une des périodes les plus critiques de son histoire récente.

Le secrétaire général Antonio Guterres a promis d’engager des consultations d’urgence avec les principaux contributeurs financiers afin de « préserver les missions les plus vitales et garantir la continuité de la protection des civils ». Mais sur le terrain, la peur d’un vide sécuritaire s’installe déjà.

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