Hors zone franc, le Ghana surpasse la Côte d’Ivoire en développement humain

Prao Yao Séraphin

Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a publié son rapport annuel sur l’indice de développement humain (IDH) pour l’année 2025. Dans le rapport intitulé « Une question de choix : les individus et les possibilités à l’ère de l’IA », datant du 6 mai 2025, la Côte d’Ivoire enregistre un Indice de Développement Humain (IDH) s’élevant à 0,582. La Côte d’Ivoire gagne dix précieuses places et occupe le 157e rang parmi 193 nations évaluées. Les autorités ivoiriennes ont vite manifesté un enthousiasme démesuré alors que le Ghana voisin qui a sa souveraine monétaire, est mieux classé que la Côte d’Ivoire. Dans les lignes qui suivent, nous passons en revue les trois dimensions de l’IDH : la santé et la longévité, l’éducation et le niveau de vie. Nous montrons qu’à part le PIB par habitant, le Ghana, classé 143e avec un indice de 0, 628, fait mieux que la Côte d’Ivoire.

Considérons dans un premier temps, le niveau de vie dans les deux pays. Le Ghana enregistre un PIB de 76,63 Milliards USD (2 330 USD/habitant) en 2023. L’économie ghanéenne repose essentiellement sur l’exploitation des matières premières – or, pétrole, gaz, cacao – et les activités de service qui s’y adossent. Le Ghana est à nouveau le premier producteur d’or en Afrique – ayant repris la place à l’Afrique du Sud en 2022 – et le deuxième producteur mondial de cacao après la Côte d’Ivoire.

La Côte d’Ivoire enregistre un PIB de 78,9 milliards USD courants (FMI, 2023) avec un PIB/habitant de 2537 dollars (FMI, 2023). La Côte d’Ivoire s’impose comme la première puissance économique de l’UEMOA, contribuant à 40 % du PIB de l’Union. Le pays contribue à 42% des exportations de la zone et abrite la base industrielle la plus développée. Leader mondial sur les marchés du cacao (39 % de part de marché en 2024) et de l’anacarde (40 % de la production mondiale en 2023. La Côte d’Ivoire s’appuie sur une économie diversifiée : un secteur primaire (14,8% du PIB en 2024) dominé par l’agriculture, un secteur secondaire (23,7 % du PIB en 2024) centré sur l’industrie extractive, l’énergie, l’agroalimentaire et le BTP, et un secteur tertiaire majoritaire (61,6 % du PIB), tiré par les télécommunications, les transports, le commerce et les services financiers. Si on considère le PIB par habitant de 2 330 USD/habitant du Ghana en 2023 et le PIB/habitant de 2537 dollars (FMI, 2023) de la Côte d’Ivoire, alors, on peut dire que le niveau de vie de la Côte d’Ivoire est plus élevé que le Ghana. Avec ces chiffres, la Côte d’Ivoire est plus riche que le Ghana.
Considérons dans un second temps, la santé. Sur ce point, on note une espérance de vie à la naissance au Ghana de 65,5 ans là où la Côte d’Ivoire se contente de 61,9 ans. L’espérance de vie à la naissance est l’indicateur le plus global de l’état de santé d’une population. Il intègre synthétiquement tous les facteurs qui contribuent à la longévité. Avec ces chiffres, on voit bien que le Ghana offre une vie beaucoup plus longue de la Côte d’Ivoire. Mais le Ghana ne surpasse pas la Côte d’Ivoire par hasard car c’est le fruit de bonnes politiques de santé menées par le gouvernement ghanéen. Lorsqu’on prend les dépenses de santé, de 2010 à 2022, les dépenses de santé publique en pourcentage des dépenses totales, se situent en moyenne à 26, 40%, en Côte d’Ivoire. Au Ghana, le pourcentage de ces dépenses de santé est de 47,04%, sur la même période. Concernant les dépenses de santé en pourcentage du budget, elles se situent à 8,54% sur la période 2010-2022 pendant que la Côte d’Ivoire se contente de consacrer seulement 5,43% de son budget aux dépenses de santé. Pour les dépenses de santé en pourcentage du PIB, de 2010-2022, elles se situent à 1,88% pour le Ghana et 0,95% pour la Côte d’Ivoire.

En 2022, avec environ 4.850 médecins formés en Ghana, on dispose d’environ 0,14 médecins pour 1000 habitants. Là encore, une comparaison s’impose : au niveau mondial, ce standard est de 1,71 médecin pour 1000 habitants et dans l’UE, il est même de 4,12. En Côte d’Ivoire, le ratio est d’environ 0,17 médecins pour 1000 habitants. S’il y a plus de médecins en Côte d’Ivoire qu’au Ghana, la qualité des services de santé est meilleure au Ghana. Sur une échelle de 0 (mauvais) à 100 (très bon), la Côte d’Ivoire a un score de 14 là où le Ghana enregistre 26.

Considérons, en troisième lieu pour finir, l’éducation. En Côte d’Ivoire, le taux brut de scolarisation au primaire a connu une progression significative, atteignant 105,4% en 2022/23. Ce taux brut, qui indique le nombre total d’élèves inscrits au primaire par rapport à la population en âge scolaire, dépasse 100% en raison de l’inscription d’élèves en dehors de l’âge scolaire. Parallèlement, le taux d’alphabétisation a connu une amélioration, passant de 51% en 2002 à 43,8% en 2015, puis à 43,70% en 2019 et 47% en 2021, selon le MENA.  En 2024, les taux d’achèvement scolaire ont progressé, atteignant 85,2 % au niveau primaire. Le taux brut de scolarisation au primaire a également augmenté pour atteindre 110,7 % lors de l’année scolaire 2023-2024. Le taux d’achèvement au secondaire a atteint 46,2 % en 2024. En Côte d’Ivoire, la durée moyenne de scolarisation des adultes qui représente la durée totale de scolarisation qu’un adulte moyen a reçue s’élevait à 4,9 ans. Quant aux années de scolarisation espérées, qui mesurent le nombre total d’années d’éducation qu’un enfant peut espérer obtenir en supposant qu’il termine le niveau d’éducation actuel et qu’il reste scolarisé, elles ont augmenté de 10,2 à 11,4 ans.

Au Ghana, le taux brut de scolarisation (TBS) au Ghana a augmenté, atteignant 76,78% dans le secondaire en 2022, selon Statista. Ce chiffre représente une augmentation de 1,5 point de pourcentage par rapport à 2021.Le taux d’alphabétisation des adultes au Ghana est estimé à environ 79%. On observe des différences entre les hommes et les femmes, avec un taux plus élevé chez les hommes (84,49%) que chez les femmes (76,19%). Le taux d’alphabétisation des jeunes est également élevé, avec environ 80% des jeunes ayant la capacité de lire et écrire. 

Lorsqu’on considère également le taux d’achèvement du cycle primaire, le Ghana fait partie des 16 pays d’Afrique ayant les plus forts taux d’achèvement de l’école primaire (source : Unesco) mais pas la Côte d’Ivoire. En effet, le Ghana enregistrait un taux de 94% en 2018 là où la Côte d’Ivoire se contentait de 79% en 2019. L’accès à l’éducation progresse, mais la qualité de l’apprentissage et la maîtrise des compétences de base restent des défis. La durée moyenne de scolarisation des adultes au Ghana, selon les données du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement), est de 6,5 ans selon le Rapport sur le développement humain de 2021/2022. La durée de scolarisation escomptée au Ghana est de 13,3 ans, soit 13 ans et 4 mois, selon les données de 2021 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Ce chiffre reflète le nombre moyen d’années qu’un enfant au Ghana peut espérer passer à l’école, prenant en compte les différents niveaux d’éducation du pays. 

Ces résultats sont le fruit des politiques gouvernementales en matière d’éducation. Pendant que le Ghana consacre 19,84% de son budget aux dépenses d’éducation, sur la période 2010-2022, la Côte d’Ivoire a fait mieux avec un taux de 20,19%. Mais lorsqu’on considère la part de la richesse consacrée à l’éducation, le Ghana fait mieux que la côte d’ivoire. En effet, les dépenses d’éducation en pourcentage du PIB, en moyenne sur la période 2010-2022, sont respectivement de 4,59% et 3,44% pour le Ghana et la Côte d’Ivoire.

Le Ghana accorde une place importante à l’éducation par rapport à la Côte d’Ivoire. Et cela se démontre au niveau international concernant le classement des universités. Le Ghana fait partie du classement dirigé par Quacquarelli Symonds, un cabinet britannique fournisseur de données dans le domaine de l’éducation, comprend en tout 1 500 établissements d’enseignement supérieur, dont 40 basés en Afrique. Selon donc le classement 2023 des universités africaines selon QS World University, avec 15 universités africaines, l’Egypte est le pays le plus représenté dans le classement. Elle devance l’Afrique du Sud qui compte 11 universités au classement. Vient ensuite la Tunisie avec 4 universités, puis le Ghana, le Kenya, le Nigeria avec respectivement deux universités chacun. L’Ethiopie, le Maroc et l’Ouganda se contentent d’un seul représentant chacun. Notons qu’aucune université ivoirienne n’est présente dans le classement.

Dépenses en recherche et développement en pourcentage du PIB, en 2016 était de 0,07, pour la Côte d’Ivoire, et 0,38 pour le Ghana, pour 2010. Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire ne dépense que 0,1 % de son PIB en recherche et développement, contre par exemple 0,82 % du PIB pour l’Afrique du Sud.

La Côte d’Ivoire gagnerait à placer le capital humain au cœur de sa stratégie de développement car l’indice du capital humain est faible en Côte d’Ivoire. Le capital humain est le niveau potentiel de performance qu’un système de formation est capable d’offrir aux citoyens d’un pays. En Côte d’Ivoire, ce chiffre est de 38% selon la Banque Mondiale. Ce chiffre décrit l’affaissement du système éducatif ivoirien. Le système de formation, de santé, d’institutions qu’on a aujourd’hui, donnera des citoyens qui vont fonctionner à 38% de leur potentiel alors que la moyenne est de 40% en Afrique contre la moyenne des pays développés qui est de 71 à 75% du potentiel des citoyens.

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