Ziad Takieddine, l’intermédiaire sulfureux entre Paris, Tripoli et Karachi, est mort à 75 ans
L’homme d’affaires franco-libanais Ziad Takieddine est décédé mardi 23 septembre à Beyrouth, à l’âge de 75 ans, des suites d’une crise cardiaque. Figure controversée de la scène politico-financière, il était au cœur de plusieurs affaires judiciaires majeures, dont le financement présumé de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007 par la Libye de Mouammar Kadhafi.
Une fin agitée à Beyrouth
Selon son avocate française, Me Élise Arfi, Takieddine était détenu depuis un mois dans une prison de Tripoli (nord du Liban) à la suite d’un différend financier avec l’un de ses anciens conseils libanais. Il a succombé à l’hôpital, après un malaise cardiaque. Son décès survient alors que la justice française devait rendre, ce jeudi, un jugement important dans l’affaire dite du « financement libyen ».
Un témoin clé dans l’affaire Sarkozy-Kadhafi
Connu pour ses déclarations changeantes, Takieddine avait à plusieurs reprises affirmé que Nicolas Sarkozy avait bénéficié de fonds libyens pour sa campagne de 2007, avant de se rétracter puis de confirmer ses accusations. Ces revirements successifs lui ont valu la réputation d’« homme à manipulations » et ont contribué à plomber la défense de plusieurs personnalités, dont l’ancien président français.
Condamné dans l’affaire Karachi
En parallèle, Takieddine avait été condamné en 2020 à cinq ans de prison ferme dans le cadre de l’affaire Karachi, un vaste dossier de rétrocommissions sur des contrats d’armement conclus dans les années 1990 avec le Pakistan et l’Arabie saoudite. Cette condamnation avait été confirmée en appel en début d’année 2025. Peu avant son premier jugement, il s’était enfui au Liban, pays qui n’extrade pas ses ressortissants.
Un parcours entre affaires, luxe et scandales
Né en 1950 dans une grande famille druze libanaise, Takieddine avait commencé sa carrière dans la publicité avant de s’exiler en France durant la guerre civile libanaise. Dans les années 1980, il prend la direction de la station de ski Isola 2000, dans les Alpes-Maritimes, et tisse des liens avec de nombreuses figures de la droite française. Son entregent lui permet d’accéder aux coulisses des grands contrats d’armement, jusqu’à devenir un intermédiaire incontournable dans les années 1990 et 2000.
Mais son ascension s’interrompt avec l’éclatement des affaires judiciaires, son divorce houleux et la rivalité féroce qui l’oppose à un autre homme d’affaires influent, Alexandre Djouhri. De proche des cercles du pouvoir, il devient progressivement persona non grata, rattrapé par les dossiers Karachi et Kadhafi-Sarkozy.
Une mort qui laisse un vide judiciaire
Le décès de Ziad Takieddine survient alors que plusieurs procès étaient encore en cours. Pour ses anciens alliés comme pour ses adversaires, il restera une figure énigmatique, tour à tour présenté comme un informateur précieux ou un menteur manipulateur. Sa disparition prive la justice française d’un témoin central dans certaines des affaires politico-financières les plus explosives de la Ve République.
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