Dans cette interview, le patron de l’Intelligent d’Abidjan le journal fondé il y a 22 ans, promoteur de l’aidant Media Forum Alafé Wakili éclaire sur ses projets du moment. L’observation du scrutin présidentiel du 25 octobre et le Forum des médias ivoiriens qui a lieu le 18 septembre 2025. Il en profite pour jeter un regard analytique sur l’élection à venir en ses différents enjeux.
À travers l’Ong La société civile l’Africanisme, vous venez de lancer une opération de recrutement en vue de mener une mission d’observation du scrutin du 25 octobre. Pouvez-vous nous éclairer un peu plus sur votre initiative ?
Nous avons observé le processus électoral en cours, depuis au moins la dernière révision de la liste électorale. Nous avons suivi les principales étapes dont l’opération de parrainage. Nous nous sommes dit que puisque tout cela visait à arriver à l’élection présidentielle, il est important d’être présent à cette étape décisive , en renforçant le dispositif de sensibilisation et d’observation. C’est dans ce sens que nous avons lancé cet appel à manifestation d’intérêt dans le cadre d’un processus qui se veut transparent et participatif.
Je rappelle que vous avez investi le terrain pour l’observation de l’opération de parrainage des candidats. Vous aviez relevé de bons points pour la Cei en matière de transparence et vous avez noté également des défis logistiques. Comment se posent ces défis et pensez-vous que ces mêmes défis pourraient entacher l’élection du 25 octobre prochain ?
Tout à fait ! L’un des défis est celui de la mise à disposition des tablettes. 100 tablettes par candidat. Nous avons eu 60 candidats qui ont déposé . Si les tablettes ont été remises simultanément, cela fait 6000 tablettes. Il semble que la CEI avait prévu 10 mille tablettes et 100 candidats. L’on voit qu’au niveau de la CEI , le filtre que devait constituer le parrainage n’est pas déclenché au départ. Cela peut être un facteur d’inclusivité certes, mais dans aucun pays au monde la démocratie ne rime avec une élection présidentielle ayant 50,100,200 candidats effectifs . Comment la CEI fera s’il y’a 500 ou 1000 candidats voulant des tablettes. De plus, seul un candidat avons nous appris , et constaté, à utilisé à 100%, les tablettes . Les autres ont préféré prendre leur temps et travailler à l’ancienne sur fichier Excel. Nous pensons que même si le principe du parrainage doit rester maintenu , il reste important d’en améliorer la collecte et l’organisation.

Pour vous, journaliste analyste et membre de la société civile, comment voyez-vous cette échéance qui suscite déjà des inquiétudes chez certaines personnes face au risque d’exclusion des candidats Gbagbo et Thiam qui drainent quand même une bonne partie de l’électorat ? Peut-on vraiment faire sans eux ?
Par le passé , les élections présidentielles ont été faites sans Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo en 1995. Certes ce n’était pas une absence pour ne pas dire une exclusion comme d’autres pourraient le dire en 2025. Après 1995, il y a eu l’élection présidentielle de 2000, qui s’est faite sans Henri Konan Bédié ni Alassane Ouattara. Ces élections se sont déroulées plus ou moins bien. La crise qu’il y a eu en 1999 ( 4 ans après 1995 ) et en 2002 ( 2 ans après 2000 ), peut-on la lier à l’absence ou aux exclusions ? En 2020, il y a eu des absences et non exclusion , de grands leaders. 5 ans après , le pays n’a pas sombré. Pourquoi pense-t-on qu’il va forcément sombrer en 2025 ? Je rappelle qu’en 2010, sans exclusion de grand leaders le pays a sombré avec 3000 morts. Finalement notre pays a vécu plusieurs cas. Il revient aux acteurs politiques de savoir faire la part des choses aussi bien les exclus , que les inclus , pour éviter de franchir la ligne rouge. Moi, j’ai choisi de ne pas envisager le pire , car la vie ou le destin de la Côte d’Ivoire va au delà du 25 octobre 2025. On peut penser que le pire est possible. On peut même faire plu que le penser et dire haut et fort le pire est inévitable, on peut aussi le souhaiter ou le craindre de bonne foi. Mais pourquoi peut-on , ou doit-on le repêcher un aveuglement, ou une mauvaise. Pour ma part, si je souhaite, si je prédis qu’il n’y aura pas dix morts, 100 morts , 1000 morts ou même plus de 3 mille comme en 2010, c’est eparce que les uns et les autres ont tiré les leçons. Si les faits me donnent tort, je n’aurais rien perdu par rapport au pari pascalien sur l’existence de Dieu. Si je dis que les choses vont bien se passer, et que les choses se passent mal , je ne risque rien. Mais si je dis que ça va mal se passer et que ça se passe mal, qu’est ce que je gagne si le pays est détruit , si les gens meurent, si tout se mélange . Et que gagnent les uns et les autres . Enfin, si je dis que ça va mal se passer, et que ça se passe bien, est-ce que je serai heureux Moi je suis comme la mère de l’enfant , la vraie . Je laisse pour moi à Dieu , ou à la fausse mère , dans l’espoir de récupérer l’enfant demain. Donner la joue gauche face à l’offense , n’est pas faiblesse .
Comment analysez-vous le record de candidatures enregistrées cette année avec 60 aspirants dont 8 femmes ?
Malgré les parrainages, on voit un engouement . On verra à l’arrivée . Selon moi, ce n’est pas sur le dépôt des candidatures, mais plutôt sur la base de la liste électorale définitive , que l’on doit juger le record de candidatures. Dans une certaine mesure , le nombre de 60 n’est pas fait pour nourrir et alimenter le narratif de l’inclusion.
Devrait-il y avoir la prochaine fois des mesures restrictives ou alors vous vous dites, c’est l’expression de la démocratie donc laissons faire ?
Il y a déjà des mesures restrictives ( la caution de 50 millions Fcfa , le parrainage , l’âge car il faut avoir 35 ans moins ). Cela n’empêche pas d’enregistrer beaucoup d’intentions de candidature. Je pense qu’il faut éviter de mettre d’autres obstacles tout en trouvant des mécanismes pour une meilleure implémentation des dispositifs déjà en vigueur.
Il y a aussi l’Amf, un autre challenge qui vous tient. L’édition de cette année est placée juste à la veille d’un grand évènement en CI, la présidentielle 2025. Simple coïncidence ou volonté de porter un message ?
Pas une simple coïncidence. J’avais même voulu organiser dans la période du 25 octobre 2025 pour montrer qu’il y a la vie et la réflexion malgré l’élection, dans l’élection, et pour montrer que la vie reste normale et suit son cours malgré l’enjeu et les craintes de tension. AMF pendant l’élection, c’est aussi la présence d’acteurs de plusieurs horizons pour réfléchir sur le rôle des médias . Sous réserve d’un autre événement en cette période du 25 octobre 2025, nous avons choisi la session septembre 2025, pour passer le message de la normalité , de l’espoir et de la responsabilité au niveau des acteurs et professionnels des médias.
Votre forum se tient depuis 2018, quel bilan succinct peut-on en faire aujourd’hui ?
Le meilleur bilan est de noter qu’il existe malgré les différences de l’environnement des médias. Il se tient dans la période anniversaire de l’intelligent d’Abidjan. Nous existions depuis 22 ans . Tous les jours les humains , qu’ils soient pauvres ou riches, en bonne santé ou non, disent merci à Dieu d’etre en vie. Pourquoi après avoir dit merci d’être en vie, je ne dois pas dire merci pour la vie et les 22 ans de l’intelligent d’Abidjan en y associant tous ceux qui nous aident, les anciens qui ont fait le média ? Cet acquis de l’existence du média qui porte Abidjan Média Forum, et l’existence de quatre éditions , dont un bilan déjà inestimable. Après l’histoire du monde est remplie de forums et d’événements de toute nature , sans que l’on puisse demander ce que cela change au jour le jour.
Pensez-vous qu’il a pu changer la façon de faire du journalisme en Côte d’Ivoire ? Les unes des journaux proches des chapelles politiques sont toujours aussi enflammées.
Pour votre observation sur la une des journaux, ou les titres sur les sites, je pense que cela appelle la responsabilité des médias. L’on peut tout dire ou presque , mais la différence réside dans la manière de le dire. Être partisans, avoir un parti pris , est possible, c’est permis, mais il reste possible d’exprimer cela dans le respect des règles déontologiques et professionnelles. Le rendez vous du 18 septembre 2025 permettra de rappeler cela. Après, je ne pense pas que le Abidjan Medias Forum puisse tout seul changer , ou faire changer les choses. Il s’agit d’une action collective et permanente, allant au-delà de 4 éditions et de nos 22 ans. En attendant nous nous attelons à notre modeste niveau, à être un modèle de responsabilité et de transparence. C’est dans ce sens que nous avons engagé notre média dans un processus de certification avec le Journalism Trust Initiative (JTI ). en bénéficiant de l’accompagnement de Reporters Sans Frontières et ses partenaires. Nous sommes en train de nous soumettre à un processus d’évaluation et de contrôle , pour assurer une pratique journalistique éthique. Nous aspirons à jouer notre partition sans avoir la prétention tous seuls, de changer les choses. Je voudrais terminer en remerciant votre média , ainsi que les bonnes volontés qui nous aident, sans oublier les annonceurs, partenaires, institutions et surtout nos fidèles lecteurs.
Par SD à Abidjan
sdebailly@yahoo.fr
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